La journée de Pâques a eu, cette année, une tonalité assez particulière. Certes, tous les ans, nous avons l’habitude d’entendre les papes énoncer, depuis la Place Saint-Pierre, les inquiétudes et les drames du monde. Et souvent les mêmes régions sont en cause, avec des conflits qui ne s’éteignent pas. Mais cette fois-ci, il y avait eu le drame de Garissa au Kenya, révélant la volonté explicite de tuer des chrétiens. La pape François s’est élevé contre l’indifférence à l’égard de ces crimes comme l’avait fait, lors de l’Office de la Passion, le père Cantalamessa : « Nous risquons tous – institutions et individus du monde occidental – de devenir des Ponce Pilate qui se lavent les mains. »
C’est un fait : ce sont aujourd’hui les chrétiens qui sont le plus directement menacés par le terrorisme djihadiste. Notre pays est sans doute en train d’en prendre conscience. Le fait que Laurent Fabius ait posé la question dans les termes les plus nets à l’ONU doit être salué. Faut-il interpréter dans le même sens le message tout à fait inédit du Premier ministre, insistant pour saluer les chrétiens de France à l’occasion de leur grande fête pascale ? C’est en tout cas mon sentiment. Il est possible aussi que Manuel Valls ait voulu réagir à l’impression désastreuse produite par la direction de la RATP, refusant obstinément de mentionner la cause des chrétiens du Moyen-Orient sur les affiches annonçant un concert des Prêtres.
Cette affaire est insupportable. Il n’y a pas que les chrétiens à avoir réagi, mais on est en droit de s’interroger sur l’étrange détournement du concept de laïcité et de celui de neutralité d’une entreprise publique, que suppose cette censure qui s’apparente à la police de la pensée selon Orwell. Il y aurait ainsi des mots interdits ! En premier lieu, celui de « chrétien ». On a souligné à juste titre l’inconvenance grave qui consistait à refuser de prendre parti en faveur de personnes en grand danger face à une entreprise terroriste. La justice, étrangement, va devoir trancher, là où le sens commun devrait suffire à établir le droit. Voilà une des raisons qui ont assombri cette Pâque. Mais nous savons que la victoire de la Vie suppose un combat qui ne cessera pas tant que nous serons encore en chemin, in via, vers l’accomplissement du Royaume.
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 6 avril 2015.
Pour aller plus loin :
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- La France et le cœur de Jésus et Marie
- SYRIE : ENTRE CONFLITS ARMES ET DIALOGUE INTERNE
- Liste des ouvriers pastoraux, Evêques, Prêtres, Religieux, Religieuses et Laics tués en 2011 et 2010
- Père Lombardi : Ce n’est pas la façon de voir du Saint-Siège