Face aux crimes perpétrés en Isère et en Tunisie, nous restons comme interdits. Bien sûr, on n’imagine pas qu’à chaque attentat terroriste, des millions de personnes vont envahir les rues pour protester et affirmer leur détermination à défendre la liberté. L’état d’esprit n’est plus le même depuis les attentats de janvier, et cela transparaît dans les réactions de la classe politique. Alors que le gouvernement réclame l’union, l’opposition proteste avec véhémence contre l’impuissance du pouvoir face au phénomène djihadiste. La plus radicale est Marine Le Pen, mais on a le sentiment qu’elle bénéficie d’une large écoute, tant ses propos correspondent aux inquiétudes de la population. Oui, il y a une menace spécifique, redoutable, qui réclame des moyens proportionnés pour la parer. Fermer certaines mosquées où se répand la propagande la plus violente, la question n’est pas illégitime.
Il ne s’agit pas de faire de la démagogie à l’égard de responsables dont la tâche est délicate. D’ailleurs, c’est l’ensemble du pays qui est appelé à prendre une conscience exacte du phénomène. Certaines comparaisons faites avec la montée du péril nazi dans l’Allemagne des années trente n’appartiennent pas forcément au registre des slogans faciles. La nature proprement diabolique de l’entreprise hitlérienne n’a pas été comprise tout de suite. Au moins sommes-nous protégés d’une certaine tentation totalitaire propre aux intellectuels. Aujourd’hui, il n’y a rien pour attirer l’intelligentsia dans une entreprise qui ne se justifie que par le fanatisme pur.
Il n’empêche que ce fanatisme, faute de captiver les intellectuels, a une réelle emprise sur une catégorie jeune de la population. C’est donc lui qu’il s’agit de comprendre pour mieux cerner sa sphère d’influence et prendre les mesures nécessaires à son éradication. La cause est politique, culturelle, sociale. Mais aussi religieuse. La décapitation d’un chef d’entreprise droit et estimé à Saint-Quentin-Fallavier, m’a fait penser à celle des moines de Tibhirine. Car leur témoignage demeure. Non, l’esprit religieux ne réside pas dans le fanatisme meurtrier, il réside dans un amour inconditionnel du Dieu qui aime les hommes.
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 29 juin 2015.