La vie de Jean Vanier, à bien des égards atypique, constitue une illustration éloquente du message évangélique concernant les faibles et les malades, et à ce titre exclus. En fidèle disciple de sainte Thérèse de Lisieux et de sa petite voie d’enfance spirituelle, lui le brillant officier de marine, philosophe de surcroît, avait su se laisser toucher par deux personnes atteintes de handicap mental. Et les rejoindre afin de vivre avec elles, d’en faire le point de départ d’un nouveau mode de vie, d’une communauté humaine et spirituelle dans laquelle ces personnes considérées comme le rebut de la société avaient toute leur place. « Une révolution copernicienne », a ainsi affirmé à France Catholique Philippe de La Chapelle, directeur de l’OCH.
Acharnement à faire mourir
Le paradoxe est que Jean Vanier aura beau avoir été universellement célébré lors de son décès, après une vie donnée, il n’est pas sûr que son message, quant à lui, ait été encore bien entendu par notre société. Car les malades ou petits d’aujourd’hui – personnes en fin de vie, handicapées, enfants à naître – ont de moins en moins droit de cité. On peut s’étonner ainsi de l’acharnement à faire mourir Vincent Lambert, comme vient de l’annoncer pour le 20 mai prochain le médecin du CHU de Reims. S’étonner aussi que cette décision soit qualifiée de « courageuse » par les partisans de cette euthanasie qui ne dit pas son nom.
Car Vincent Lambert n’est ni en fin de vie, ni malade. Simplement lourdement handicapé depuis dix ans, à la suite d’un grave accident de moto. Et donc peu en état de communiquer avec son entourage, selon les critères habituels. Cela lui ôte-t-il le droit à la vie, de bénéficier de l’eau et des aliments nécessaires ?
« C’est l’honneur d’une société humaine que de ne pas laisser un de ses membres mourir de faim ou de soif », écrit le 13 mai l’archevêque de Reims et nouveau président de la Conférence des évêques, Mgr Éric de Moulins-Beaufort. La question posée est donc selon lui plutôt un enjeu de civilisation : il n’est pas possible de renoncer à une prise en charge adaptée, sous prétexte que celle-ci aurait un coût et « qu’on jugerait inutile de laisser vivre la personne humaine concernée ».
Structures accueillantes
Dès lors, on se prend à rêver que l’exemple de Jean Vanier conduise à créer d’autres structures aussi accueillantes pour les personnes qui se trouvent hors de nos critères d’efficacité. Comme le petit Alfie Evans, « débranché » en 2018 en Grande-Bretagne, et dont le Vatican avait affiché son intention de l’accueillir à l’hôpital bien nommé du Bambino Gesù, à Rome. Cela a toujours été la gloire de l’Église de se charger des plus faibles dans la société. C’est à cette aune également que se reconnaît une civilisation digne de ce nom.
Pour aller plus loin :
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- Jean-Paul Hyvernat