La proposition de Jean-François Copé d’en appeler à une grande manifestation de rue contre le pouvoir suscite beaucoup d’émoi à gauche. Pourtant le droit de manifester n’a rien d’illégal. Il constitue même une des expressions les plus habituelles de la vie civique. La gauche, dans son histoire, y a largement recouru. Il est vrai, sans doute, qu’elle s’est souvent associée aux syndicats qui en avaient l’initiative. Mais il semble que deux éléments choquent particulièrement les contradicteurs de Jean-François Copé. Le premier consiste dans le dessein de s’opposer par la rue à une volonté qui s’est légitimement et légalement formulée à travers les élections présidentielle et législative. Pourtant, il y a des précédents, mais je n’y insisterai pas. Le second élément est le rappel des grandes manifestations pour l’école libre au moment du premier septennat de François Mitterrand.
Sur ce sujet, j’aurais lieu d’être intarissable, car, comme journaliste j’ai suivi le dossier, jour après jour, pendant quatre ans. J’en ai même écrit un livre, après avoir revu les principaux protagonistes, et d’abord le président Mitterrand lui-même. Je ferai donc remarquer que ces manifestations n’étaient pas à proprement parler politiques, même si les politiques les ont accompagnées. L’initiative, l’organisation, la logistique en revenaient exclusivement aux dirigeants des parents d’élèves de l’école libre. Je puis même préciser qu’à propos de la grande manifestation du 25 juin 1984, les réticences furent vives du côté des politiques. Jacques Chirac, alors maire de Paris, craignait qu’un rassemblement de cette importance, un des plus grands de l’histoire de la capitale, ne comporte de trop grands risques.
Mais toutes les précautions furent prises, notamment par un service d’ordre dirigé par Claude Massacrier, dont l’efficacité étonna la police elle-même. Il est délicat d’établir des analogies d’une période à l’autre. Mais il me semble que si une manifestation nationale, par exemple à l’encontre du mariage homosexuel, était décidée, elle aurait beaucoup à reprendre de ce précédent qui se signale précisément par son caractère « métapolitique ». Il est certaines causes qui peuvent soulever les foules et qui échappent au lois habituelles des conflits politiques.
Chronique lue sur radio Notre-Dame le 30 octobre 2012.
LA BATAILLE DE L’ÉCOLE . 15 siècles d’histoire – 3 ans de combat [1985] , 336 pages + 16 p. hors texte, 21 ill., sous couv. ill., 150 x 230 mm. Collection Documents actualité, Denoël -etu. ISBN 2207231151.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/assr_0335-5985_1986_num_61_2_2397_t1_0279_0000_2
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par Guillaume Tabard
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