Le commandement de Dieu à nos premiers parents: « croissez et multipliez » serait-il, ô surprise, suivi dans une autre direction ? Les chrétiens et les juifs semblent de nos jours de naïfs fondamentalistes en lisant le verset 1:22 de la Genèse comme un commandement pour deux parents de se multiplier en faisant des enfants. Un projet de loi en Californie propose la multiplication des parents, un enfant pouvant alors avoir plus de deux parents en toute légalité.
Si seulement Dieu avait été aussi astucieux que nous le sommes, on n’aurait pas besoin d’une telle loi. Après tout, comme le déclare au « New York Times » Mark Leno, promoteur du projet: « Il s’agit de placer le bien des enfants au-dessus de tout.»
Sans vouloir mettre en doute la sincérité ou l’amour d’un éventuel parent supplémentaire, on peut se poser la question: est-ce vraiment pour les enfants?
On voit fréquemment des adultes pleins d’amour, et même souvent d’héroïsme, se présenter pour adopter des enfants rejetés dans des conditions à vous briser le cœur. Le projet de loi Californien n’en tient aucun compte. Il vise plutôt à légitimer la présence de trois ou quatre parents par enfant en vue d’instaurer des familles affublées de l’épithète « alternatives » ou « non-traditionnelles ». Le « chapeau » du « New York Times » cite le cas de deux filles nées d’un couple marié, chacun des deux parents vivant avec une personne de même sexe, et les deux « parents additionnels » souhaitant avoir un statut légal de parents des deux filles.
Une telle combinaison bizarre n’a guère à voir avec le bien des enfants, mais indubitablement avec les penchants d’adultes qui exigent tout ce qu’ils désirent. En l’occurrence, le but est de redéfinir totalement la famille, avec l’approbation sociale et légale de n’importe quelle forme d’activité sexuelle entre adultes consentants et, en conséquence, la procréation d’enfants de n’importe quelle manière.
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Source :
http://www.thecatholicthing.org/columns/2012/parents-increasing-and-multiplying.html
Ainsi vue, une famille est une combinaison de personnes désirant pour n’importe quel motif partager un logement et élever des enfants. Les liens du sang ne sont plus des liens: c’est une volonté plus ou moins bien guidée qui choisit ce qui constituerait une famille. Et quand une volonté — dénuée de liens de nature ou de réflexion — mène la danse, rien n’est plus certain: ce dont on a envie un jour pour la famille ne sera plus désiré le lendemain. S’il s’agit de réécrire le statut légal d’une famille selon le dernier caprice, eh bien, qu’il en soit ainsi. . . .
Alors, depuis quand la « famille » dérive-t-elle? Dan Cathy, patron de « Chick-fil-A » [NDT: voir l’article « Ranime ce qui te reste de vie », 4 août], a mis en rage les tenants de la « famille alternative » et du « mariage » homosexuel en déclarant que son entreprise soutient la « définition biblique de l’entité familiale ». On peut mal interpréter cette déclaration: la famille, telle qu’entendue par la tradition Chrétienne, ne provient pas de la révélation, comme, par exemple, notre compréhension de la Trinité.
La définition biblique de la famille est un rapport d’amour et de devoirs entre un homme et une femme, et leurs enfants selon l’ordre naturel créé par Dieu. Seuls, les Chrétiens croient en la Trinité, mais tous les humains vivent au sein de la même création, et peuvent donc voir, d’instinct comme de raison, comment une famille s’articule — en d’autres termes: Aristote n’avait vraisemblablement pas lu la Genèse, mais il voyait que la cellule familiale devait se conformer aux lois de la nature, au-delà des choix humains.
« Il doit nécessairement y avoir union de personnes qui ne peuvent exister l’une sans l’autre: homme et femme, destinés à se reproduire, non par décision personnelle, mais — comme c’est le cas pour les animaux et les plantes — par un élan naturel en vue de laisser une descendance semblable à soi.» (Politique, 1252a27)
Les hommes ont de tout temps été soumis à une tension entre le désir (ce que nous voulons) et la nature (ce que nous pouvons). Nous atteignons la grandeur lorsque le désir tend à développer ce qui est conforme aux lois naturelles; athlètes, artistes, architectes en sont des exemples.
Mais quand nous tentons de contrefaire la nature, comme par les unions de même sexe ou les « familles alternatives », alors se posent des problèmes. L’athlète qui prend des stéroïdes, l’homme qui se lance dans le vide sans parachute, sont la preuve que négliger la nature peut mener à la catastrophe.
Cependant, quelle que soit l’importance des arguments selon la loi naturelle dans l’opinion publique, la tendance à céder aux désirs personnels pèse lourdement. Tout au moins actuellement. Une preuve affligeante se trouve chez les nombreux jeunes qui approuvent le « mariage de même sexe » pour la simple raison qu’il répond à une envie: si des gens s’aiment, ils doivent avoir le droit de se marier. Ce dont on a envie, on doit, selon eux, pouvoir l’obtenir.
Cette philosophie infantile fait maintenant partie de notre système légal réputé adulte, avec la redéfinition du mariage et les propositions en vue de redéfinir la famille. La nature et ses lois, comme le remarquait le Cardinal Ratzinger, sont devenues « une bonne blague » pour beaucoup, ce qui a eu pour effet de les écarter de la législation et des tribunaux en faveur de simples envies capricieuses.
Tant que les désirs non maîtrisés resteront la base du langage social, de la politique et de la législation, la « famille naturelle » ne sera qu’une option parmi d’autres, comme on choisit un restaurant ou un lieu d’habitation. Les parents pourront se multiplier sous toutes formes, colmme des relations familiales romantiques. Plus de liens contraignants: la paix et la sécurité données aux enfants et à toute la société par la famille naturelle seront emportées par une vague de cupidité.
Quand vient la tempête, nous protégeons nos biens, de peur qu’ils soient emportés. Désormais, alors que l’orage des désirs non maîtrisés approche en tempête, notre devoir est de protéger un trésor sans prix, la famille naturelle.
David G. Bonagura, Jr. , professeur assistant en théologie au Séminaire de l’Immaculée Conception à Huntington (NY).
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L’orage approche (images de Mitch Dobrowner)