On entend ici ou là que la situation actuelle de la Ve République ressemblerait fâcheusement à ce qu’était la IVe République en 1958, au moment de la crise qui déboucha sur le retour aux affaires du général de Gaulle. Je ne suis pas vraiment convaincu de la pertinence de ce rapprochement. Grâce au ciel, nous ne sommes pas au bord de la guerre civile, comme nous l’étions à ce moment critique où l’armée française se trouvait en situation de rébellion avec le pouvoir. Le président Hollande, lorsqu’il s’adresse à la nation au lendemain d’une cinglante défaite électorale, a beau faire entendre sa vive préoccupation, il n’en est pas comme son prédécesseur, le président René Coty, à en appeler à la discipline des armées. La IVe République était à bout de souffle, la Ve peut être ébranlée par les difficultés qui l’assaillent. On ne voit pas dans l’immédiat les institutions qui pourraient lui succéder. Les partisans d’une VIe République sont très loin de persuader de la pertinence de leurs solutions alternatives.
Et puis, il ne faut pas se tromper à propos des crises et des institutions. Les institutions font preuve de leur solidité, lorsqu’elles sont capables de résister aux pires secousses. Elles sont même faites pour cela. Je ne prétends pas que la Ve soit absolument immunisée contre toute éventualité. J’ai suffisamment la mémoire précise des événements de 1968, pour me souvenir que, plusieurs jours durant, le général de Gaulle a douté de la possibilité de juguler le formidable mouvement social qui avait paralysé le pays. Le spectaculaire retournement qui se produisit montra que le vieil homme savait encore manœuvrer jusqu’à liquider, sur le moment du moins, le mouvement de Mai 68. Mais, encore une fois, nous n’en sommes pas là. On peut être en désaccord avec mon jugement, mais il est permis de penser que la solidité des institutions est garante d’une possible traversée de la tempête.
Chronique lue sur Radio Notre-Dame le 28 mai 2014.
Pour aller plus loin :
- Sur le général de Castelnau et le Nord Aveyron.
- Liste des ouvriers pastoraux, Evêques, Prêtres, Religieux, Religieuses et Laics tués en 2011 et 2010
- Édouard de Castelnau
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- Vladimir Ghika : le contexte politique avant la guerre de 1914-1918