Il existe des correspondances frappantes entre l’immense émotion populaire qui avait suivi les attentats de janvier dernier et celle que soulève la tragédie de vendredi. On retrouve des gestes analogues, aussi bien du côté des autorités que de la rue. La détermination manifestée au sommet correspond à l’attente unanime de l’opinion publique. On chante la Marseillaise. On annonce des mesures décisives… La question qui se pose pourtant est de savoir si on a vraiment progressé depuis janvier. Il serait défaitiste de prétendre qu’il ne s’est rien passé, d’autant que notre pays est celui qui, en Europe, a consenti les engagements les plus décisifs dans la lutte sur les terrains extérieurs, aussi bien en Afrique qu’en Irak et en Syrie. On ne saurait oublier l’engagement permanent sur notre propre territoire des forces de l’ordre, qui sont, au témoignage de leurs représentants, dans un état de fatigue et de tension extrême.
Il n’en reste pas moins que la menace djihadiste subsiste avec la même intensité et que nous sommes tous contraints d’admettre un état de guerre qui ne souffre aucun relâchement. Le président de la République a annoncé hier, à Versailles, un certain nombre de mesures pratiques dont l’adoption devrait contribuer à parfaire nos moyens de résistance. Mais il faudra aussi se confronter à des objectifs de nature plus subtils peut-être, car le djihadisme est d’abord une pathologie d’ordre idéologique qui doit se combattre dans les esprits. Rien de décisif ne saurait être accompli dans ce domaine sans l’aide de nos compatriotes musulmans. Si désagréable que soit la réalité, il faut admettre que le djihadisme est une pathologie qui concerne l’islam et l’on ne s’en sortira pas sans que les musulmans s’engagent complètement dans la bataille idéologique.
Pierre Manent dans son essai récent a indiqué quelques lignes de réflexion et d’action pour s’attaquer à ce problème, soulignant la priorité de l’intégration des musulmans dans la communauté nationale. C’est bien dans cette direction qu’il faudra marcher, dans un esprit de véritable unité française.
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 17 novembre 2015.