Classiquement, on distingue deux formes de connaissance : la connaissance abstraite, d’un côté, qui a pour objet toutes les vérités que l’on peut exprimer par des concepts ; et la connaissance intuitive, de l’autre, qui a pour objet la chose elle-même, appréhendée directement par les cinq sens ou par l’esprit. Exemple de connaissance abstraite : vous connaissez l’Italie car vous avez lu en entier le Guide vert qui lui est consacré. Exemple de connaissance intuitive : vous connaissez l’Italie car vous y avez séjourné longtemps.
On se tromperait, bien sûr, en opposant systématiquement ces deux sortes de connaissance, en essayant d’établir une hiérarchie entre elles. Les deux sont nécessaires à une connaissance la plus complète possible. Les concepts sans intuitions sont vides et secs ; les intuitions sans concepts risquent d’être confuses, sinon aveugles.
Le livre des livres
Pour Dieu, il devrait donc en aller de même : il est bien évidemment possible d’apprendre à connaître Dieu par la lecture de livres, à commencer par le livre des livres, le livre qui est une bibliothèque à lui tout seul – ta biblia en grec, la Bible. Vous y apprendrez toutes sortes de choses que la raison naturelle, livrée à ses seules forces, n’aurait pas pu découvrir sur l’identité de Dieu, sa nature, son dessein pour la création, son œuvre de salut. Comme dit saint Paul : « Toute Écriture divinement inspirée est bonne et utile pour enseigner, pour convaincre, pour corriger, pour former à la justice, afin que l’homme de Dieu soit parfait, apte à toute bonne œuvre » (2 Tm 3, 16). Le célèbre épisode de la conversion de saint Augustin, dans les jardins de Milan, met précisément la lecture au point de départ de son retournement : « Prends et lis – Tolle, lege » lui ordonne une voix céleste, lui désignant les épîtres de Paul (Confessions VIII).