Communion sur la langue et sur la main - Dispositions requises, notion de choix - Hygiène. - France Catholique
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Communion sur la langue et sur la main – Dispositions requises, notion de choix – Hygiène.

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La présente réflexion ne porte pas sur la question suivante : ‘’Doit-on communier sur la langue ou dans la main ?’’, mais bien sur les dispositions requises, la notion de choix et la question de l’hygiène et de la propreté. Il s’agit d’une réflexion collective où plusieurs prêtres, oblats ou séculiers, furent consultés et donnèrent leur avis.


Jésus donne le pain et le vin consacrés alors que ses disciples sont allongés et accoudés au sol, sur des coussins, près d’une table basse… Jésus n’a donc probablement pas donné la communion ni sur la langue ni dans la main à chacun de ses disciples. Les apôtres ont « pris » : « Prenez et mangez », « Prenez et buvez ». Cela veut dire que Jésus n’a pas privilégié l’une de nos manières de communier, Il a fait autrement, selon les coutumes de l’époque et les circonstances de la Cène. Il était libre !

Dans l’une de ses Catéchèses, saint Cyrille (315-386), évêque de Jérusalem, écrit : « (…) Quand donc tu t’approches pour le recevoir, ne t’avance pas sans respect, les mains grandes ouvertes et les doigts écartés. Mais puisque sur ta main droite va reposer le Roi, fais-lui un trône de ta main gauche, et dans le creux de ta main reçois le Corps du Christ et réponds : Amen ! (…) » L’hostie se reçoit donc sur l’une des mains, alors que l’autre la porte à la bouche. Elle ne se prend pas de la main du ministre de la communion : c’est un Don qui se reçoit. En cela, il est un geste d’adoration, digne et respectueux. Ainsi, durant le premier millénaire, on communiait habituellement, mais pas exclusivement, dans la main…

C’est au Moyen Âge qu’on voulut réserver aux prêtres le contact direct avec les choses saintes. Cette pureté donnera naissance à de véritables excès, au Québec et en France, où les laïcs – et nous sommes au XXe siècle – ne pouvaient en aucun cas toucher le calice ou la patène sans commettre un péché véniel (France) ou mortel (Québec)… même vides, sans la présence des Saintes Espèces. De plus, il ne fallait surtout pas, disait-on parfois, que l’hostie touche les dents ni le palais sous peine de péché très grave (Québec)… Un simple discernement de « bon sens » nous permet de voir ici une profonde exagération, un non-sens, une déformation, une importance exagérée donnée à quelque chose de secondaire… Pourtant Jésus disait, rappelons-le ceci : « Prenez et mangez-en tous… » Le verbe grec utilisé ici devrait plutôt être « mastiquer », moins élégant probablement que « manger » mais tout de même révélateur du sens voulu par Jésus. Toujours est-il que nos ancêtres communiaient alors sur la langue… mais de plus en plus rarement. Indignité morale d’un côté et – peut-être ? – les risques de maladie de l’autre suscitèrent un tel éloignement et une pratique rituelle de plus en plus détachée de la Parole de Jésus : « Faites ceci en mémoire de moi ».

L’Eucharistie devenant la « messe du prêtre » et non celle d’un peuple en marche : pas de concélébration évidemment pour les prêtres et, pour les laïcs, plutôt des actes de dévotion comme le chapelet ou le Chemin de Croix, durant le Sacrifice, impensable aujourd’hui. Vatican II retournera aux sources.
Fort heureusement, alors que le fait de communier était devenu rarissime, sauf une fois l’an, rappelons-nous, le XIXe siècle voit renaître le désir de communier plus souvent, même en semaine, ce que Pie X autorisera pour le bien de tous en 1905. C’est en effet le 20 décembre 1905 que le pape Pie X mit fin, par le décret Sacra tridentina synodus, à des siècles de communion (très) rare. Dès saint Ambroise en effet (fin du IVe siècle), apparaissent les traces d’un relâchement des chrétiens envers la communion. Le mouvement s’amplifia au Moyen Âge, si bien que le quatrième concile du Latran (1215) édicta ce qui devint un des « commandements de l’Église » : « Dieu ton Sauveur tu recevras au moins à Pâques dignement. » Un concile ? Si un concile a dû rappeler aux chrétiens de communier au moins une fois par an, on imagine l’état de la pratique ! Ce ne sont donc pas les jansénistes (XVIIe siècle) qui, par leur rigorisme, comme on les en accuse souvent, sont à l’origine de cette abstinence. Nous voyons ici une sensibilité qui donnera au moins le devoir de communier une fois l’an, après s’être confessé. Mais une loi édictée amène souvent, au fil des siècles, à une interprétation étroite, restrictive, abusive. Tout prêtre de cette longue période, jusqu’au Concile Vatican II, ne s’attendait plus à ce que l’on communie à la messe. En donnant l’autorisation de communier aux enfant de plus de 7 ans, Pie X amorce un mouvement inverse. On s’oriente de plus en plus vers un assouplissement des règles en vigueur afin de redécouvrir la valeur essentielle pour tout chrétien de communier.

À partir de 1953, on assouplit notamment les règles du jeûne eucharistique. Et Vatican II accordera même la communion sous les deux espèces (Constitution sur la liturgie, n. 55), rendue plus accessible encore par la nouvelle édition du Missel romain en 2002.

Venons-en maintenant à l’objet de cette réflexion sur les conditions actuelles d’un mieux faire concernant la communion. La réception de la communion, dans la main et sur la langue, doit se faire selon les dispositions requises : dignement et respectueusement, en état de grâce, après un jeûne d’au moins une heure, avant la messe, en lien avec une vie chrétienne cohérente, animée par l’Évangile du Christ.

Saint Justin disait, à juste titre, dans son Apologie (1, 66, 1-2) : « Parce que ce pain et ce vin ont été, selon l’expression ancienne, « eucharistiés », nous appelons cette nourriture Eucharistie et personne ne peut y prendre part s’il ne croit pas à la vérité de ce qu’on enseigne chez nous, s’il n’a reçu le bain pour la rémission des péchés et la nouvelle naissance et s’il ne vit selon les préceptes du Christ. »

Forts de cette conviction due à la grandeur de l’Eucharistie, nous savons pertinemment que le fait de communier est indissociable de l’écoute de la Parole de Dieu proclamée à chaque messe. Ne devrions-nous pas nous abstenir de communier si nous arrivons en retard à la messe, par négligence ou paresse ou mauvaise organisation de son temps, sauf si un devoir de charité nous y oblige ? Un retard justifié, c’est plutôt rare, disons-le !
Communier sur la langue ou dans la main devrait être envisagé par chacun comme deux manières de faire qui impliquent, autant dans un cas que dans l’autre, une grande dignité et un grand respect de notre part. Nous sommes devant un mystère qui nous dépasse tout en nous englobant.
Il serait donc incongru, voire nuisible pour la vie spirituelle elle-même, de privilégier l’une en dénigrant l’autre, encore pire, en jugeant ceux et celles qui ne font pas comme moi.

Communier est et restera toujours un acte libre, en conscience, qui se traduit aussi par ma manière non exclusive de communier. Je ne devrais pas être conditionné par une piété déformée, acquise par une connaissance partielle, un préjugé, parfois par la lecture ou les propos rapportés par des révélations privées, approuvées ou non par l’Église. Je n’ai pas non plus à faire de « prosélytisme ». Ici, seul le Magistère est guide et le pape en fait partie en tant que premier législateur. De Paul VI à François, aucun pape n’est allé à l’encontre des directives émises par l’Église bien que chacun ait fait selon sa sensibilité, parfois du moment, suscitant ainsi une communion entre tous et chacun : on a vu Jean-Paul II, par exemple, donner la communion autant dans la main que sur la langue, selon les circonstances. Il était libre intérieurement !

Ma manière de communier ne devrait jamais être l’occasion de « montrer » aux autres ce qu’ils devraient faire… L’attitude fondamentale devrait être une sainte indifférence autant pour soi que pour les autres. Je me permets de communier selon mon attitude présente qui pourrait être autrement lors de la communion suivante. Il peut être très opportun, par exemple, voire nécessaire, de communier sur la langue si, on nous excusera de la trivialité du propos, je n’ai pas eu le temps de me laver les mains ; et si je n’ai pas eu le temps de m’assurer d’une hygiène buccale irréprochable, je communie sur la main. Nous ne sommes pas des anges : hygiène et propreté s’imposent ! S’ajuster, selon les circonstances, demande une liberté intérieure !

Je ne puis communier d’une manière en disant que l’autre manière est inappropriée ou « sale », voire irrespectueuse ou non voulue par Dieu ou certains saints ou théologiens ou juristes : on jugerait ainsi l’Église et ceux qui sont morts martyrs de l’Eucharistie. Nous savons tous que nous péchons plus souvent en usant de notre langue comparativement aux péchés commis par nos mains. Mais dans les deux cas, l’Écriture dit bien : « Je veillerai sur moi en toutes choses, pour ne point pécher par la langue » [Ps 38] ou encore : « Et si ta main t’entraîne au péché, coupe-la. Il vaut mieux entrer manchot dans la vie éternelle que d’être jeté avec tes deux mains dans la géhenne, là où le feu ne s’éteint pas » [Mc 9,41]. Et oui, nous sommes capables du mieux comme du pire et l’on peut se perdre en usant mal de l’un comme de l’autre.

Nous aurions intérêt à regarder la beauté et la signification de nos mains. Organes de la préhension, du toucher et de l’action, les mains réfèrent à l’activité, à la créativité, à la prise de possession, à la connaissance par l’expérience, à la puissance d’accomplissement. Instruments de la maîtrise de soi et du monde. La main peut donner ou prendre. Elle peut exprimer un soutien chaleureux et réconfortant, calmer, pacifier, ordonner, caresser, battre la mesure ou simplement toucher. Mais elle peut aider comme elle peut nuire. Elle révèle ainsi la qualité de ses sentiments les plus directs et les plus francs. Les mains sont les servantes silencieuses et obéissantes de l’esprit, le nôtre, donnant forme à ses choix. Elles se laissent diriger de l’intérieur. Situées à l’extrémité des bras, les mains représentent le stade final par lequel les actes se réalisent, précisant leur degré d’achèvement et de finesse. Elles éclairent comment le conceptuel devient réel ou comment une idée se manifeste concrètement. Elles assurent une large part du langage non verbal, ponctuant puissamment les paroles. Elles révèlent comment on se traite ou traite autrui, comment on interagit avec les autres, comment on se lie au monde, comment on veut créer, toucher, prendre ou partager. On aurait intérêt également à penser à ce qu’est notre notre langue. Elle est constituée de 17 muscles, c’est l’organe le plus puissant du corps. Elle a aussi une grande valeur symbolique : elle est toujours l’instrument par lequel l’homme dit ou chante la gloire de Dieu, manifeste l’affection du cœur, soutient l’éprouvé, donne les conseils, encourage, montre sa compassion, etc. Les mains et la langue ont été créées par Dieu, pour notre bien et celui des autres. Elles sont dignes d’éloge et de respect car nous sommes image et ressemblance de Dieu.

Si je communie sur la main je mets bien ma main gauche sous ma main droite (ou l’inverse), les deux étant propres, et, dès réception de l’Hostie, je la prends et la dépose sur la langue, devant le ministre de l’eucharistie, qu’il soit prêtre ou non. Un fidèle non ordonné, si des motifs y invitent, comme le trop grand nombre de communiants, peut en effet être député en qualité de « ministre extraordinaire » pour distribuer la Communion. L’autorisation peut venir de l’évêque ou du prêtre qui préside la célébration eucharistique. Certains disent qu’un laïc n’a pas les mains consacrées mais le diacre non plus. Et pourtant, on y va ! S’obstiner à recevoir l’Hostie consacrée de la main seule du prêtre en allant jusqu’à refuser de communier si tel n’est pas le cas reste une vision restrictive du Sacrement et une interprétation personnelle qui n’a rien à voir avec la vision et l’interprétation de l’Église. On a parfois des attitudes ou des raisonnements illogiques qui vont jusqu’à juger l’Église en dénigrant les prêtres qui demandent l’aide d’un laïc…

Si je communie sur la langue, je fais le nécessaire pour être propre – dents nettoyées, langue brossée, gorge gargarisée et pas seulement du matin – et je ne touche jamais les doigts du prêtre ni ne lui expire en plein visage. Est-il nécessaire de vous rappeler qu’au moment de la communion le ministre qui distribue est très proche du communiant et qu’une absence d’hygiène buccale dans l’heure qui précède la communion peut créer un véritable inconfort chez ce dernier. Il est alors plus respectueux de communier sur la main que d’observer une manière de faire qui mène directement à un manque de charité élémentaire envers le ministre de l’Eucharistie. La grâce n’enlève pas les microbes, davantage présents, et en plus grand nombre, sur la langue – et les lèvres – avec le risque plus accentué d’un contact physique. Il faut savoir que pour le prêtre cela crée un véritable malaise – alors qu’humecté par la salive d’une personne et/ou du rouge à lèvres, il doit immédiatement donner l’Hostie à la personne suivante – et parfois même la nausée – l’haleine est parfois insupportable : odeur de malpropreté, ail, maladies des muqueuses, alcool, tabac, etc. Nous n’inventons rien malheureusement.

Si je fais le signe de Croix, avant ou après la réception de la communion, je dois simplement savoir que ce n’est pas nécessaire puisqu’il ne comporte pas un sens ordonné et édicté par la liturgie. On doit s’approcher de l’Eucharistie alors que notre cœur y est déjà disposé, par la liturgie de la Parole – entendue et méditée – et par la Prière Eucharistique elle-même, et celui-ci s’incline alors intérieurement, sans nécessité de l’accompagner d’un geste physique, comme la génuflexion. Vu de l’extérieur, ce geste se fait souvent derrière la personne qui précède (!) : en plus de risquer de « casser » le mouvement de la communion et de « diviser » ainsi les communiants entre ceux qui le font et les autres. [On ne juge pas ici de l’intention des personnes.]. Il n’est pas nécessaire non plus de se mettre à genoux sauf si cela a été préparé, par exemple par la présence d’une table de communion ou d’un prie-Dieu.

Rappelons-nous que le Concile Vatican II a resitué ce geste — être à genoux – dans sa perspective pénitentielle ou sacrificielle : on se met bien à genoux au rite pénitentiel, ou à la consécration du Pain et du Vin car, ici, nous sommes en présence du Christ en Croix. C’est pourquoi le rituel en vigueur n’en parle pas au moment de la communion car communier n’est pas une pénitence, mais bien la célébration d’une rencontre, un véritable geste de résurrection, un geste qui fait vivre : la position debout est donc celle actuellement encouragée par l’Église car elle donne sens au geste qui se pose, communier au Christ, précédemment mort en Croix mais désormais à jamais vivant… D’ailleurs, à ce sujet, nos frères orthodoxes communient toujours debout, et même ils y restent pendant toute la liturgie, car c’est l’attitude, disent-ils, de celui qui est ressuscité, avec le Christ, par les sacrements.

Comme l’Église l’a fait, au moment du Concile Vatican II, sachons remettre du sens aux gestes que nous posons, et qui sont édictés et voulus par la liturgie, tout en éliminant le plus possible les gestes qui n’ont pas de sens ­– du moins là où on le fait – ou qui sont inutiles.

Le fait de communier sur la langue et sur la main importe peu, disons-le, si « l’hygiène » , morale et physique, est assurée ; le plus important reste notre adhésion au Christ, le fait qu’Il se donne en nourriture, qu’Il est « corps et sang » du pèlerin que je suis et que nous sommes tous ensemble. Le « Pain partagé » m’inscrit alors dans un davantage possible, en cherchant à me libérer, à m’élever, en me rapprochant de Lui mais aussi des autres. Saint Léon le Grand, pape et docteur de l’Église, disait :

« Je puise ma force dans l’intercession inlassable du Prêtre tout-puissant et éternel qui,

semblable à nous mais égal au Père,

a abaissé sa divinité jusqu’au niveau de l’homme

et a élevé l’humanité jusqu’au niveau de Dieu »

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