Après la mort de trois adolescents en moins d’une semaine en Île-de-France, au cours d’affrontements entre bandes rivales, le philosophe orthodoxe Bertrand Vergely, interrogé par le site Atlantico, affirme qu’il importe avant tout « de ne pas désespérer ». Il répond ainsi au fatalisme de tous ceux qui haussent les épaules en disant : « Cela a toujours existé… », et qui feignent d’ignorer que la violence émane de bandes de plus en plus jeunes, de 13 à 15 ans, et armées de couteaux…
Ainsi, au-delà de la nécessaire fermeté, combien se révèle actuel l’adage fameux de saint Jean Bosco : « Occupez-vous de la jeunesse, ou la jeunesse s’occupera de vous. »
Comment ne pas voir, en particulier, que les bases de l’autorité ont été sapées pendant des décennies par l’idée du pédagogisme ? Lequel, prétextant que l’enfant possède en lui toutes les ressources nécessaires, le laisse en réalité sans autre repère que lui-même – situation terriblement angoissante…
Oubliant aussi qu’étymologiquement, la racine indo-européenne du mot autorité signifie « plein de force divine » qui permet de faire grandir. Et voilà comment, cinq décennies plus tard, nous nous réveillons avec certains jeunes littéralement incultes, au sens culturel du terme, mais aussi cultuel : « sans culte » !
Besoin d’une vision
Ce que la jeunesse attend en effet en priorité des générations qui précèdent, c’est un sens, une vision globale, un ordre et une explication donnés aux choses, pour leur permettre de dominer la complexité du monde. Cette vision porte un nom, hélas tombé aux oubliettes même dans le discours religieux : c’est la Providence, l’intervention de Dieu dans l’histoire.
Or cette notion est capitale, car c’est cette Providence, même mystérieuse, qui est la force permettant de ne pas désespérer face à l’ampleur des problèmes.
Mais il importe de bien la comprendre : elle n’est pas une puissance implacable qui agirait sur les hommes comme sur des marionnettes. Cela, c’est le destin des Grecs, implacable, inhumain.
Au contraire : la volonté divine dans le christianisme n’est pas un plan « établi à l’avance », rappelle le jésuite Jean Galot, elle « s’adapte aux réalités et aux événements. » Et suppose aussi l’acceptation de notre propre liberté – donnant à chacun prise sur le cours des événements. C’est donc une volonté d’amour d’un Dieu qui se fait homme, pour apprendre en retour aux hommes à Lui faire librement confiance, par la prière notamment.
Ne pas abandonner le terrain
Faire autrement, c’est abandonner « l’univers entre les mains de l’Ennemi de Dieu », souligne encore Jean Galot. Et c’est bien ce qui semble se passer aujourd’hui : nous avons chassé Dieu de notre univers, et la place est prise par un autre, provoquant violences et désordres en série. C’est donc là que se situe le combat de la foi – et la victoire sur le monde qui en est le terme.