Cathy Cenzon-DeCarlo : contrainte de participer à un avortement malgré ses objections de conscience
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En Octobre, lors d’une réunion en Europe centrale avec des collègues Pro-Vie, j’ai appris que quelques jours plus tard aurait lieu un vote au Parlement Européen au sujet de la « Clause de conscience ». Ce vote porterait sur le « Rapport McCafferty » recommandant fortement des restrictions à la clause de conscience. Par exemple, contraindre les soignants à effectuer un avortement « en cas d’urgence ». « Urgence », en l’occurrence, ne signifie pas ce que vous ou moi pourrions penser, ce terme étant défini dans le « Rapport » en question comme incluant toute menace pour la « santé » de la femme. Le mot « santé », à son tour, est un terme élastique étiré par les tribunaux pour couvrir n’importe quel cas, aussi mineur fût-il. En substance, le « Rapport » aurait sacrifié la clause de conscience devant une demande insistante d’avortement.
Le vote du Parlement Européen ne serait aucunement contraignant, selon les règles de l’Union. Mais pour la propagande politique un tel vote contre les consciences aurait un impact immense. Tenant un vote favorable, les groupes « Anti-Vie » pourraient faire le siège des gouvernements afin de faire restreindre le droit à la clause de conscience, arguant qu’un tel vote exprimait un « consensus Européen ». Et, naturellement les tenants « Anti-Vie » au sein des gouvernements en conviendraient tout de suite. (Cet argument fondé sur un prétendu « consensus Européen » a servi aux « Anti-Vie » à d’autres occasions, y-compris lors de l’affaire d’avortement ABC contre l’Irlande.) Mes amis Pro-Vie Européens pensaient que le rapport McCafferty serait aisément adopté.
Et pourtant, le vote fut finalement un petit miracle. Au lieu d’adopter les recommandations anti-clause de conscience du « Rapport », les parlementaires « Pro-Vie » réussirent à faire passer des recommandations bien plus favorables aux droits à la clause de conscience. Néanmoins ils demandèrent que les patientes soient « informées par les soignants de leurs droits légaux » (y-compris à l’avortement), actes que ces soignants refusaient d’effectuer.
Mon propos est de montrer que les agressions contre le droit à la clause de conscience ne sont pas le propre des États-Unis. Elles sont perpétrées partout. Et je pense que voir ce droit comme dangereusement menacé n’est que trop réaliste.
Aux États-Unis on peut s’attendre très prochainement à des restrictions à la clause de conscience. En décembre des poursuites ont été engagées contre les règles de protection de la clause de conscience, règles édictées par le Ministère de la Santé Publique (Department of Health & Human Services – « HHS ») vers la fin du mandat Bush, et toujours en vigueur, donc contraignant l’administration Obama; les avocats de l’administration, agissant en son nom, ont informé par écrit le tribunal que le Ministère de la Santé Publique publierait sa « révision » de la règle « Bush » à la fin du mois — soit fin février. L’administration avait dit son intention d’abolir ces règles dès les premières semaines de la présidence d’Obama, sans le faire jusqu’à présent. Ainsi la Cour a forcé l’administration Obama à faire la lumière sur ses intentions. La question se pose désormais, à savoir si l’administration Obama va « abolir » ou « réviser » la-dite règle, ou, comme beaucoup le soupçonnent, procéder à une prétendue révision telle qu’elle aboutira de fait à une révocation. On verra bientôt.
La loi fédérale Américaine assure à la clause de conscience des protections incohérentes et hasardeuses, sous forme de trois documents distincts, publiés à plusieurs années d’intervalle. Sous le Président Bush le Ministère de la Santé Publique a souhaité dissiper tout malentendu sur le domaine d’application de la protection de la clause de conscience et s’assurer qu’il aurait l’autorité pour le mettre en œuvre; on aboutissait ainsi à des règles de protection de la clause de conscience, qu’Obama est en train de défaire.
La simple existence de règles ne garantit pas pour autant qu’elles seront appliquées. Par exemple, le Ministère de la Santé Publique d’Obama n’y semble pas enclin dans un cas flagrant, l’affaire de l’infirmière Cathy Cenzon-DeCarlo. Elle a été requise pour participer à un avortement en dépit de ses objections de conscience. Une cour fédérale, sur la plainte portée par DeCarlo, a statué que les personnes dont les droits de conscience selon la loi fédérale avaient été violés, n’avaient pourtant aucun droit à exercer des poursuites pour faire appliquer la loi. Autrement dit, l’application de la loi est laissée à l’appréciation du Ministère de la Santé Publique. Jusqu’à présent, le Ministère de la Santé Publique d’Obama s’est dérobé. [NDT: une vigoureuse contre-attaque est lancée au Congrès]
L’infirmière DeCarlo a aussi déposé plainte devant la Cour de l’État de New York. Aux États-Unis, comme dans bien d’autres pays la protection de la clause de conscience n’est pas exclusivement nationale. En l’absence de loi nationale, les États peuvent édicter des règles de protection des consciences. L’association « Americans United for Life » (« AUL »: Américains unis pour la Vie) et d’autres organismes ont élaboré des propositions de lois adoptables par les États. L’Idaho a adopté l’an dernier une loi de protection des consciences selon un projet « AUL », bien que déjà les pressions anti-vie s’exercent pour qu’un amendement oblige les soignants à pratiquer l’assistance au suicide si elle devient légale dans cet État. Parmi les États, c’est en Alabama qu’il est le plus nécessaire de légiférer sur la protection des consciences.
La question de la clause de conscience se résume ainsi: devrait-on réquisitionner une personne (ou une entité) impliquée dans le domaine des soins pour effectuer un acte — ou y aider, ou réorienter vers quelqu’un apte à le faire — moralement répréhensible? La légalisation de l’avortement et de l’assistance au suicide fait dire aux tenants anti-vie qu’il est parfaitement raisonnable de contraindre les professionnels de santé à effectuer des « procédures médicales légales », et, hélas, bien des gens approuveront, ne mesurant pas les problèmes de conscience sous-jacents.
Il faut apporter en ces temps, aux États-Unis comme à l’étranger, toute l’aide possible à la liberté de conscience. Les forces anti-vie s’acharnent à éliminer la liberté de conscience. Dans cet esprit, il est regrettable que l’administration Bush ait attendu les derniers jours de sa huitième année pour établir des règles fédérales. Mais encore pire, que l’administration Obama les révoque toutes.
Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2011/conscience-protection-at-risk.html
William Saunders est premier vice-président pour les questions de droit à l’association Americans United for Life. Diplômé de la Faculté de Droit de Harvard il publie fréquemment sur nombre de sujets de droit et de politique.