La nomination de Christine Lagarde à la direction du Fonds monétaire international est plutôt considérée comme une bonne nouvelle, en France, en Europe et dans le monde. Un éditorialiste d’un quotidien d’opposition va jusqu’à « saluer l’habileté du camp français dans ce tour de force diplomatique ». Avec Martine Aubry en route pour la candidature à l’Élysée, l’avènement de la nouvelle directrice du FMI signifierait la promotion des femmes au plus haut niveau. Que les féministes s’y retrouvent, c’est de bonne guerre, et on leur accordera qu’il vaut mieux soutenir sa cause à partir de réussites parfois éclatantes qu’avec des récriminations victimaires.
Mais voilà. A peine propulsée à Washington, Christine Lagarde se retrouve nez à nez avec la révolte de la rue à Athènes. La colère des Grecs ne cesse d’enfler, à mesure que les sacrifices demandés s’avèrent drastiques.
Imaginons un seul instant qu’on nous impose à nous autres Français ce genre de médications assénés à nos amis hellènes. La colère emplirait nos rues. Tous les syndicats seraient vent debout, et l’ensemble de la jeunesse serait mobilisée. Trouverions-nous même un gouvernement de droite ou de gauche pour imposer cette austérité massive, avec la baisse des salaires toutes catégories, y compris les plus modestes, la réduction des retraites, la privatisation des entreprises publiques et jusqu’à la vente de nos ports et de nos plages aux Chinois ?
On répondra à cela qu’il fallait être plus sage, que la Grèce n’a pas été sage, que ses citoyens ont été inciviques et ne font que payer l’addition de leur inconduite et de leurs erreurs. Dira-t-on la même chose, si demain l’Irlande, le Portugal ou l’Espagne sont contraints aux mêmes efforts ? Toujours est-il que Christine Lagarde sait probablement que parvenue au faîte des honneurs, elle se trouve face à une redoutable épreuve. Elle que l’on disait libérale très classique et très convaincue se serait transformée en avocate de la régulation. Il y a fort à parier que les convictions idéologiques devront céder le pas à un solide pragmatisme. Bonne chance, Madame, nos vœux vous accompagnent, comme vous accompagne l’attention inquiète du monde.
30 juin sur Radio Notre-Dame