Avec son cinéma, Cheyenne-Marie Carron nous ouvre le cœur à des sujets brûlants. Après L’apôtre, qui montre la conversion d’un jeune musulman au christianisme, Patrie, la recherche des sources perdues de notre enfance pour des jeunes immergés dans les banlieues profondes, La chute des hommes traite du djihadisme.
Séance le vendredi 2 décembre au Balzac à 10 h 45 – http://www.allocine.fr/seance/film-248025/pres-de-121569/
ainsi que le samedi 3 et le dimanche 4 à 10 h 45 aussi.
Ce cinéma écoute ses personnages, et les dialogues sont nourris par le fait que chacun a son double ou sa moitié. L’accompagnement musical – ici les chants sacrés – rythme le film et lui donne sa clé. Les images restent gravées en nous, signe que quelque chose a commencé à bouger. Nous sommes émus par cette sincérité brûlante à la Pialat, mais aussi la quête épurée des personnages à la manière de Robert Bresson, de l’instant de grâce à guetter, à faire naître, où tout peut être sauvé.
L’héroïne, Lucie, est bien enfant de notre siècle, jeune, attachante, fort jolie, et avec une bonne volonté, parfois un peu agaçante, qui la pousse en avant : elle ne rêve que d’approfondir sa connaissance des parfums dans cet Orient mythique où elle a été contactée de manière trop mystérieuse pour être honnête.
Mais cet Orient rêvé se révèle un cauchemar : Lucie est tombée dans le piège. Prisonnière, elle va affronter les enfants perdus du djihadisme. Pourquoi perdus ? Par notre monde aveuglé par son nihilisme consumériste ? Parce qu’eux aussi sont enfants d’un monde sans re-pères. Eux aussi sont en miroir.
La chute des hommes pourrait n’être que la chronique d’une longue descente dans l’enfer qui nous menace aujourd’hui ici ou là-bas. Mais, loin de nous laisser aller à une pitié facile, ce film nous empoigne en creusant le thème du sursaut moral, seule planche de salut, qui nous reste.
Julie, mise au pied du mur, va trouver des accents inoubliables pour témoigner de son irréductible identité face à ses bourreaux, qui exigent d’elle sa conversion à l’islam. « Ma mère est chrétienne mon père est païen »… Lucie oppose « cette liberté », que ses parents lui ont transmise, et qui fonde la vraie rencontre avec la foi chrétienne, la dévoilant à des hommes qui la refusent par défi et provocation de leur ego surdimensionné. C’est leur faiblesse intime comme le révèle le parcours d’un Français converti à l’islam, qui va retrouver le « Je vous salue Marie… » de son enfance face à la mort…
Ce film, loin d’être militant ou édifiant, affine notre liberté, celle maintenue de l’héroïne dans l’épreuve, celle perdue de ses ravisseurs, celle qui comme une résurgence va de nouveau jaillir chez le chauffeur de taxi, devenu aide-bourreau par lâcheté. Il y a chez Cheyenne-Marie Carron un mélange inimitable de patience, de bienveillance et d’âpreté. Elle montre que ces hommes, où le mal a triomphé, auraient pu être différents et se libérer de ce dévouement fanatique à notre destruction et à la leur. Elle fait jaillir dans nos déchirements le refus, le non-acquiescement, à se laisser dominer par la peur, qui serait signer la victoire de ses ravisseurs.
C’est aussi un long travail filmique de reconquête des visages, de leur pureté avec bien des retours en arrière pour tenter de cueillir les instants de paix où principalement les femmes pourront renaître à autre chose, que ce qui les a défigurées. Et si finalement, c’était cela la grâce : nous laisser irradier par cette révélation, qui seule nous accomplit par l’entremise d’un regard.
Un film donc à voir et à revoir, à méditer…
Et à commander en DVD si vous n’avez pas la chance de le voir en salle.
cheyennecarron@gmail.com
http://www.cheyennecarron.com/films.php
http://www.cheyennecarron.com/itv9.php
http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19563502&cfilm=248025.html
http://www.telerama.fr/cinema/films/la-chute-des-hommes,512250.php
La chute des hommes : la critique de Georges Collar : (France Catho n° 3518)
Lucie, jeune Française spécialisée en parfums, part pour le Proche-Orient. Mais elle est enlevée et vendue à des djihadistes.
Cheyenne-Marie Carron traite du djihadisme, considéré sous l’angle d’une prise d’otages suivie d’assassinats. La réalisatrice s’intéresse successivement aux personnages, toujours réunis par les liens d’une action unique. Bien que son cinéma se fasse en dehors des standards avec des moyens financiers très limités, elle parvient à un résultat magnifique : une belle facture cinématographique, de très justes dialogues et une exceptionnelle direction d’acteurs. Quelques longueurs, mais une fin très forte.
Fidèle à son engagement chrétien, la réalisatrice insère dans son histoire un événement frôlant le miracle. Mais la violence islamiste est affreuse. Des images complaisantes.
Drame français (2016) de Cheyenne-Marie Carron, avec Laura Lochet (Lucie), Nouamen Maamar (Younes), François Pourron (Abou), Inna Oziard (la mère de Lucie) (2h20). (Grands adolescents) Sortie le 23 novembre 2016.