Le Chemin de Croix est une belle dévotion, particulièrement pendant le carême, parce qu’il permet de suivre Jésus tout au long du chemin qui le mène au Calvaire. Le pape Jean-Paul II le faisait également tous les vendredis de l’année. S’il s’agissait de la crucifixion de quelqu’un d’autre, nous pourrions nous y arrêter momentanément et ensuite la mettre de côté en nous disant que c’est maintenant un événement historique connu. Qu’y a-t-il donc de si particulier dans la crucifixion de Jésus ?
Eh bien, le pape Benoît XVI l’explique de cette manière : « Ce qui de l’extérieur semble simplement relever de la violence brutale, la Crucifixion, devient de l’intérieur un acte d’amour total et de don total de soi… La violence se transforme en amour, et la mort en vie. C’est là la manifestation par Dieu du don total de soi ». C’est ce qui en fait son caractère si unique.
Cet événement concernait un être humain sans péché uni à la personne du Fils Divin qui redonne éternellement au Père dans l’amour tout ce qu’il est. Il le fait en ce moment dans notre histoire. Rien ne sera plus jamais semblable. Quand nous suivons le chemin de souffrance de Jésus, nous commençons à voir : nous avons les indices spirituels du don total de soi dans l’amour qui nous sont donnés par celui qui nous a précédé. Le catholicisme est l’expression de cet amour de Dieu infini et désintéressé.
Dans le chemin de croix de St Alphonse de Liguori, l’un de ceux que je préfère, nous disons : « Tu as parcouru ce chemin pour mourir pour moi avec un amour incommensurable. » C’est l’amour qui brûle éternellement en Dieu et il est répandu sur nous ici même sur terre. De plus, suivant pas à pas ce miracle de l’amour réel qui se déroule, il y a Marie, la Mère de Jésus, contrainte de regarder son fils torturé à mort. C’est pourquoi nous chantons le Stabat Mater en passant d’une station à l’autre.
Après la première station, nous chantons par exemple : « Debout la mère des douleurs/Près de la croix était en pleurs/Quand son fils pendait au bois. »
Ensuite, nous poursuivons lentement dans la prière notre chemin en suivant les étapes de la souffrance de Jésus : Pilate condamne Jésus; Jésus accepte sa Croix ; Jésus tombe pour la première fois; Jésus rencontre sa mère; Simon aide Jésus à porter sa croix, etc.
Tout est occulté pendant ce temps. Nous concentrons notre attention sur cette triste procession d’un homme allant à sa mort, et y allant à cause de nous. Nous avons le sentiment que les préoccupations du jour sont mises de côté pendant que nous tournons notre cœur et notre esprit sur cet événement central de l’histoire de l’humanité.
Le rythme de la prière est le même à chaque station. Dans la version de St Alphonse de Liguori, à la onzième station, le Christ est cloué sur la Croix, le célébrant dit : « Nous t’adorons O Christ et nous te bénissons. » Nous nous mettons à genoux : cette prière fait participer le corps, l’esprit et le cœur. Elle unifie également le corps, l’esprit et le cœur comme nos paroles et nos actes expriment la même chose. Ici, l’attitude Chrétienne est résumée en une seule expression. Nous répondons alors : « parce que tu as racheté le monde par ta sainte croix. »
C’est là le mystère qui rayonne sur monde entier, que le monde le veuille ou non. En effet, c’est bien l’hostilité du monde qui a mis le Christ sur la croix.
Ensuite, pendant que nous nous recueillons, le célébrant évoque la scène : « Contemplons Jésus, mis sur la croix, Il étendait les bras et offrait à Son Père éternel le sacrifice de Sa vie pour notre salut. Ils lui clouèrent les mains et les pieds, et puis, dressant la croix, ils le laissèrent mourir dans l’angoisse. »
Et nous répondons : « Mon Jésus outragé, /cloue mon cœur à la croix/pour qu’il y demeure toujours pour t’aimer et ne jamais t’abandonner./ Je t’aime plus que moi-même; /Je te demande pardon de t’avoir offensé. /Permets que jamais je ne t’offense à nouveau. /Accorde moi de t’aimer toujours. Fais de moi selon ta volonté. »
Nous exprimons à cet instant les sentiments les plus profonds de notre âme. Sans doute que non ? Si ce n’est pas le cas, alors ces paroles disposent notre âme pour que cette prière commune façonne notre vie intérieure.
Si vous y réfléchissez, en suivant cette prière, nous voyons vraiment ce qu’est la vie intérieure. Nous avons la représentation de la vie de Jésus devant nous et nous sommes rassemblés en adoration et en prière. En contemplant Jésus, nos âmes apprennent à se distendre et à intérioriser la merveille du salut.
Nous ne réduisons pas l’expression d’amour de Jésus à notre dimension ; avec son aide nous nous élargissons à sa dimension. Pour « qu’il fasse habiter le Christ en vos cœurs par la foi ; enracinés et fondés dans l’amour, vous aurez ainsi la force de comprendre, avec tous les saints, ce qu’est la largeur, la longueur, la hauteur, la profondeur et de connaître l’amour du Christ qui surpasse toute connaissance, afin que vous soyez comblés jusqu’a recevoir toute la plénitude de Dieu ». (Éphésiens 3,17-19, traduction TOB)
Bevil Bramwell, prêtre Oblat de Marie Immaculée, enseigne la théologie à la Catholic Distance University. Il est titulaire d’un doctorat de l’Université de Boston et travaille dans le domaine de l’ecclésiologie.
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Illustration : XII : Le Christ meurt sur la Croix (Leonard Porter)
Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2012/stations-of-the-cross.html