Chef de l'État en temps de crise - France Catholique
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Chef de l’État en temps de crise

La campagne présidentielle ne peut pas ne pas être marquée par la conjoncture internationale. Celle-ci met le président en exercice dans une situation singulière qui lui confère une légitimité morale aux yeux des citoyens. Cela a été explicitement prévu par le fondateur de Ve République.
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On connaît le mot cruel du général de Gaulle dans ses Mémoires de guerre, à propos d’Albert Lebrun, le dernier président de la IIIe République qui encaissa la terrible défaite de 1940 : « Au fond, comme chef de l’État, deux choses lui avaient manqué : qu’il fût un chef ; qu’il y eût un État. » C’est bien cette conviction, qu’il fallait un véritable État et un chef, digne d’en assumer les responsabilités, qui conduisit l’homme du 18 juin à fonder les institutions de la Ve République. François Mitterrand, qui en avait été l’adversaire acharné, devait lui-même s’y rallier, en endossant complètement le modèle mis en place en 1958.

De Gaulle était bien placé pour savoir à quel point la fonction de chef de l’État expose aux plus graves affrontements. Lui-même dut faire face à la terrible question algérienne, et le moins qu’on puise dire est qu’elle ne se résolut pas dans les meilleurs conditions. Franz-Olivier Giesbert vient de l’expliquer dans un livre intitulé Le sursaut. Il y montre comment de Gaulle fut un personnage extraordinaire mais que son parcours fut parsemé de drames et de larmes. Lorsque Valéry Giscard d’Estaing devint le troisième président de la Ve République, Raymond Aron lui fit reproche d’ignorer que l’histoire est tragique. Nous comprenons mieux la vérité d’une telle affirmation avec ce qui se passe en ce moment en Ukraine. Une Europe complètement déséquilibrée, un peuple martyrisé et une issue incertaine du conflit.

Il n’est pas douteux qu’en pareille conjoncture, le président actuel de la République française se retrouve dans une posture gaullienne. L’opinion ressent que vraiment il faut qu’il y ait un État pour faire face et que cet État soit fermement tenu. Bien sûr, à la veille d’une élection présidentielle, cela ne peut que servir l’intérêt d’Emmanuel Macron qui se voit investi d’une légitimité beaucoup plus visible. À ses concurrents de démontrer qu’à sa place, ils pourraient se montrer aussi efficaces, au point d’endosser une telle légitimité. Pour eux, le moins qu’on puisse dire est que la tâche est redoutable.