NOTA : le Professeur Carlin développe une argumentation en faveur d’un changement à la règle du célibat des prêtres ; inutile d’insister, ce n’est pas dans mes idées, ni au sein de Catholic Thing (qui ne prend pas position). C’est un remède brutal pour ce qui peut se révéler comme un problème brutal. Nous le publions en tant qu’argument au sujet de l’homosexualité au sein du clergé Catholique.
Robert Royal.
Des années durant, j’étais hostile à l’idée, pour l’Église Catholique, d’abandonner sa règle de célibat des prêtres. Ceci pour deux raisons. D’abord, c’était une suggestion avancée par les Catholiques « de gauche ». Persuadé qu’un glissement à gauche mènerait peu à peu l’Église Catholique d’Amérique à sa ruine, je crains que répondre aux demandes de gauche — même fondées — l’amènerait à son effondrement. Par ailleurs, je crains que l’abandon de l’obligation de célibat soit un choc violent chez les croyants moyens qui souhaitent le maintien des traditions de l’Église.
Les changements apportés par Vatican II étaient relativement mineurs, mais ces écarts minimes à la tradition se sont révélés comme un choc violent chez nombre de Catholiques, y-compris prêtres et religieuses.
Mais j’ai changé d’avis — grâce au Cardinal Theodore McCarrick, Archevêque à la retraite de Washington, récemment présenté comme homosexuel ayant au moins une fois, voici cinquante ans, été coupable d’abus sexuel sur un mineur. Le meilleur récit de l’horrible affaire McCarrick que j’aie lu jusqu’à présent se trouve sous le titre « Cardinal McCarrick, tout le monde était au courant » par Rod Dreher.
Selon le récit de Dreher, le comportement sexuel de McCarrick ne se limita pas à un acte au début de sa carrière ecclésiastique. Loin de là. …Très loin de là. Il entama des séances de séduction homosexuelle avec de jeunes adultes — séminaristes et jeunes prêtres — alors qu’il était évêque de Metuchen (New Jersey). Dreher ne relate pas ce qui s’est passé au cours de l’ascension de McCarrick dans la hiérarchie ecclésiastique ; il devint Archevêque de Newark, puis de Washington. J’imagine qu’on en apprendra prochainement davantage.
J’ignore le nombre de prêtres catholiques homosexuels. Je doute que quiconque puisse savoir. Vraiment. J’ai vu des estimations comprises entre quinze et cinquante pour cent. Tout le monde susceptible de faire une estimation sensée semble d’accord pour une fourchette bien supérieure chez les prêtres à celle de la population en général (environ 2 à 3 %). Naturellement, tous les prêtres ayant une orientation homosexuelle ne s’y adonnent pas. Et puisque la population de prêtres est vieillissante, il est vraisemblable que ceux qui s’adonnaient à l’homosexualité ne pratiquent plus. Et comme tant de nos prêtres vieillissent, il est vraisemblable que nombre de ceux qui pratiquaient s’abstiennent désormais. Ou bien le désir s’est calmé, ou bien, ils ne peuvent plus s’y adonner.
Et le problème n’est pas seulement le nombre de prêtres gais. Ils constituent un réseau au sein du clergé. Ils s’agglutinent. Ils se protègent mutuellement. Ils s’aident l’un l’autre dans leur carrière. Le cas McCarrick en est un exemple typique.
Ce n’était guère un secret pour les gens informés qu’il était un homosexuel actif, ce qui ne le freina pas dans son ascension, simple prêtre, puis évêque d’un petit diocèse (Metuchen, NJ), puis archevêque de Newark NJ, puis archevêque de Washinton, et enfin prince de l’Église. Et nul n’a arrêté sa progression. Il était bien protégé.
Une fraction de représentants d’un groupe n’a pas besoin de se compter 51% pour dominer tout le groupe ; dans une grande entreprise, 10 % suffisent généralement pour la contrôler. À l’époque de l’attaque des trains, une bande bien organisée d’une quinzaine de bandits suffisait pour détrousser un millier de voyageurs.
L’Église catholique des États-Unis a, d’évidence, un penchant homosexuel. Si (comme moi) vous aviez des doutes jusqu’à présent, l’horrible affaire McCarrick devrait suffire pour vous ouvrir les yeux.
Ne nous étonnons pas si rares — très rares — sont les prédicateurs qui dénoncent l’homosexualité ou le mariage de mêmes sexes. Ne nous étonnons pas si les évêques ne s’élèvent pas contre le mouvement gai, quand bien même ce mouvement tente jour après jour de persuader des milliers de jeunes Catholiques que leur religion est dans l’erreur, erreur datant de deux mille ans par son enseignement : la sodomie est un péché contre nature.
Est-il alors étrange que l’Église d’Amérique n’oppose virtuellement aucune résistance à notre culture de liberté sexuelle ? Comment une religion tachée d’homosexualité pourrait-elle s’élever contre la fornication et la cohabitation hors mariage ? Peut-elle même s’afficher hostile à l’adultère ?
Et qui donc s’étonnera de la faiblesse de l’Église en Amérique dans la lutte contre l’avortement ? Car si vous vous opposez à l’avortement, il vous faudra aller contre la liberté sexuelle ; et l’opposition à la liberté sexuelle vous mènera naturellement à combatte la sodomie. Chaque domino fait tomber le précédent.
Et un prêtre, parfaitement non-gai pourra-t-il être un bon conseiller dans le domaine sexuel — que son interlocuteur soit normal ou gai — au sein d’une Église animée d’un penchant guère sévère envers l’homosexualité ?
Il faut dé-homosexualiser l’Église dès que possible. La meilleure méthode, peut-être la seule, est d’ouvrir la prêtrise aux hommes mariés, ainsi que la prêtrise a été ouverte aux hommes mariés depuis des siècles dans les Églises Orthodoxes.
Un risque à courir. Un choc pour nombre de Catholiques attachés aux traditions. Et un encouragement potentiel pour les Catholiques libéraux qui militent de plus en plus pour ouvrir la prêtrise à des femmes. Cocasse : de quoi encourager les libéraux à solliciter l’ordination pour des hommes ouvertement homosexuels (et des femmes?) qui feraient le vœu sincère d’un véritable célibat.
Mais il faut courir le risque. Y renoncer serait folie. Grâce aux révélations sur McCarrick le secret est éventé. Il ne sera plus possible de leurrer le paroissien moyen. Nous marchons vers une religion dominée par la culture « gai ». Bien des facteurs, non seulement celui-ci, minent l’Église Catholique d’Amérique. Mais ce dernier est particulièrement mortel.
Formons l’espoir qu’il soit encore temps. Souhaitons avoir encore au sein d’une masse critique d’évêques courageux des guides clairs et sans compromis.
Note du traducteur.
Cet article m’avait échappé avant que je traduise l’article « Halte au feu sur le célibat » (publié le 17 juillet) , qui est une réponse.
Merci, amis lecteurs de pardonner ce contretemps.
https://www.thecatholicthing.org/2018/06/29/de-homosexualizing-the-american-church/