Pie X : « la foi dépérit quand on néglige la catéchèse.»
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On critique fréquemment le Pape Pie X pour avoir demandé en 1910 à tous les prêtres de prononcer un serment anti-moderniste. On ne sait guère qu’en 1905 il donna aux prêtres du monde entier un commandement tout autre, sans doute plus difficile à suivre. Demanda-t-il une plus grande dévotion à la gloire de l’Eucharistie? Plus d’action en faveur des missions? Ou leur reprocha-t-il un manque de sainteté? Bien qu’il eût pu choisir l’un de ces thèmes, voici ce qu’il leur demanda, une simple tâche sur laquelle se concentrer : passer une heure chaque dimanche à faire le catéchisme aux enfants de leurs paroisses.
Il leur demanda également d’offrir aux adultes une heure de catéchèse lors des fêtes d’obligation et pendant le carême. Au bout de quatre à cinq ans, ils auraient fait le tour des grands sujets : le Symbole des Apôtres, les Sacrements, les Dix commandements, le Notre-Père, et les préceptes de l’Église.
« Si la foi dépérit de nos jours, — disait-il — si pour beaucoup elle a quasi-disparu, la cause se trouve dans l’insuffisance, si ce n’est la négligence, de l’enseignement du catéchisme.» Par conséquent la tâche majeure des prêtres ne consistait pas à prononcer des sermons savants ni à publier des ouvrages érudits. Il fallait un enseignement consistant des vérités de base de la foi. Les enfants — en fait, tous les catholiques — devaient, et doivent encore, apprendre les bases simples mais fondamentales de la foi et de la morale pour vivre leur vie de Chrétiens.
S’ils n’apprenaient pas ce qui est juste et bon, il ne leur serait guère possible de vivre selon les règles. Pour Pie X la doctrine chrétienne «révèle Dieu et Son infinie perfection bien plus clairement que ne saurait faire la seule intelligence de l’homme.» En d’autres termes, les humains pourraient se croire capables de découvrir Dieu et de choisir leur comportement simplement par la réflexion ou une sorte d’osmose intellectuelle. En réalité, ils ont besoin de recevoir un enseignement.
Le meilleur don d’un prêtre à ses ouailles était l’enseignement de la véritable doctrine chrétienne car «on peut toujours espérer qu’un comportement pervers se réformera tant que luira la lumière de la foi; mais si une moralité dépravée, car ignorante, est privée de la foi, alors il n’y a pas de remède au mal, et le chemin de la ruine s’ouvre droit devant.» Les prêtres qui, plutôt qu’enseigner les fondements de la foi, préféraient écrire des livres ou prononcer des conférences devant un auditoire d’intellectuels, mettaient leurs priorités à l’envers. Il valait mieux, et c’était plus ardu, apporter la doctrine chrétienne à des jeunes peu instruits plutôt qu’à des esprits réceptifs; ce qui impliquait un travail de préparation et plus de subtilité.
Les prêtres pouvaient aussi être tentés de penser, en raison de leur charge de travail, à se décharger sur quelqu’un d’autre de la tâche du catéchisme. Le Saint Père semble avoir envisagé une forme d’aide par des laïcs, mais il ne pouvait être plus net sur la responsabilité: «Sans le moindre doute cette tâche fort importante repose sur tous les pasteurs des âmes.» En fait «il n’y a pas de devoir plus grave, ni d’obligation plus contraignante.»
D’évidence les prêtres ne passent plus une heure le dimanche à faire le catéchisme aux enfants de la paroisse, et ils ne consacrent plus de temps lors des fêtes d’obligation à la catéchèse des adultes. En raison de la pénurie de prêtres ils prêchent et célèbrent fréquemment plus d’une messe, et entendent les confessions. Ils ne s’assoient pas pour regarder la télévision toute la journée. Mon curé, par exemple, célèbre cinq messes du samedi soir au dimanche soir dans trois différentes églises. Il ne lui viendrait sans doute pas à l’esprit, ni à la plupart de ses confrères de par le monde qu’ajouter une heure à ce genre d’emploi du temps serait une bonne chose. Ajoutons la crise des « affaires pédo-« , qui rend les prêtres réticents à se rendre devant des assemblées d’enfants, et on comprendra que le rôle des prêtres de nos jours est rien moins qu’éloigné de ce à quoi Pie X pensait.
Le commandement de Pie X d’enseigner la doctrine tous les dimanches n’est plus à l’ordre du jour et les prêtres n’y sont plus soumis. Cependant l’aspect doctrinal de l’encyclique est toujours valable. Enseignement et prédication sont au cœur de la prêtrise. Selon Vatican II les prêtres sont « les vigoureux proclamateurs de la vérité, afin que les fidèles ne soient pas emportés par les vents de doctrines ». Les prêtres sont actuellement soumis à une condition difficile et exigeante, leur temps est accaparé par nombre de requêtes légitimes. Et pourtant, Pie X exprime clairement le fondement de leur mission: «Il serait vain d’attendre d’un Chrétien qu’il accomplisse son devoir s’il n’en a même pas connaissance.» Les Catholiques ont, encore plus que du temps de Pie X, besoin de prêtres pour leur enseigner la doctrine.
Finalement, certains trouveront qu’enseigner la doctrine, particulièrement aux enfants, serait une perte de temps pour un prêtre confronté à un monde plein de pauvreté et de misère, mais le pape réfute cette objection: «s’il est certain que l’aumône par laquelle on soulage les pauvres est hautement louée par le Seigneur, alors, combien plus précieux à Ses yeux seront le zèle et le travail consacrés à l’enseignement et à la prédication, consacrés non à la satisfaction de besoins éphémères du corps mais au profit de l’âme pour l’éternité! Rien n’est plus désirable, acceptable, aux yeux de Jésus Christ, Sauveur des âmes, qui fait porter témoignage à Isaïe: «Il m’a envoyé porter aux pauvres la bonne nouvelle.»
Todd Hartch enseigne l’Histoire de l’Amérique Latine à l’Université de Kentucky Est.
Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2011/doctrine-please.html