Bergers d'un troupeau blessé - France Catholique
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« Ô Marie conçue sans péché »
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Bergers d’un troupeau blessé

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Ces jours-ci, les yeux sont tournés vers Rome, attendant de voir ce que sortira du Synode sur l’Amazonie. Les pères synodaux, comme chacun le sait maintenant, ont flirté avec l’idée d’ordonner des hommes mariés afin de mieux assurer les besoins sacramentels des habitants de l’Amazonie. Certains villages reculés n’ont la visite d’un prêtre qu’une fois ou deux l’an. En même temps, il y a de bonnes raisons pour que beaucoup voient l’impulsion à ordonner des viri probati comme un prétexte pour un référendum sur le célibat des prêtres bien au-delà de l’Amazonie. Si un manque de prêtres est une cause suffisante pour ordonner des hommes mariés en Amazonie, pourquoi ne pas faire de même à Dublin ou Munich.

Ici aux Etats-Unis, des arguments contre la discipline du célibat ecclésiastique surgissent souvent dans le contexte de la crise des abus sexuels. L’exemple le plus voyant du genre était, il y a quelques mois, une première page de ‘The Atlantic’ titrant « abolir la prêtrise ». L’article a bien moins de valeur comme argumentation que comme marqueur culturel indiquant à quel point la perception de la prêtrise catholique a changé – à la fois chez les catholiques et chez un public bien plus vaste.

Depuis l’été passé, la plus grande partie de la discussion sur la crise des abus s’est focalisée sur la justice pour les victimes, la responsabilité des évêques et le rôle que les laïcs peuvent et doivent jouer dans le renouveau de l’Eglise. Il y a des raisons évidentes pour cette insistance. Pourtant, dans un coup de théâtre quelque peu ironique, on a porté moins d’attention à la façon dont nos prêtres ont subi la crise.

Pour de nombreux prêtres avec qui j’ai parlé, l’an passé a été une double épreuve. Ils ont ressenti la même colère, la même frustration et le même sentiment de trahison que les laïcs qu’ils servent mais ils ont eu également à porter la connaissance additionnelle que des hommes avec qui ils partagent un lien fraternel ont commis ces péchés et ces crimes. Que ce soit équitable ou pas, nos prêtres doivent faire avec la pagaille que leurs frères ont créée. Ils doivent être bergers pour des brebis qu ont appris à ne pas faire confiance aux bergers.

Ce n’est pas seulement avec la culpabilité par association (ou au minimum la suspicion par association) que nos prêtres doivent se débrouiller ; les répercussions de la crise ont eu de réels impacts sur la vie paroissiale. Ces derniers mois, combien de récits avez-vous entendu de baisse de l’assistance à la messe ? Ou de l’implication dans la paroisse qui faiblit ? Ou de la quête hebdomadaire qui s’amoindrit ?

La plupart des récits de ce genre que j’ai entendus ne sont que cela : des récits. Des anecdotes. I y a moins de dix-huit mois, l’affaire McCarrick a éclaté. Les effets à long terme de la crise sont difficile à évaluer. Ces difficultés sont-elles directement liées à la crise des abus ? Comment ces difficultés varient-elles d’une paroisse à l’autre ou d’un diocèse à l’autre ? La crise a-t-elle été ressentie pareillement dans les riches paroisses de banlieue et dans les pauvres paroisses urbaines ou rurales ? Et les paroisses des minorités ?

Et nos séminaristes ? Quelle sorte d’homme répond à l’appel en un temps comme celui-ci ? Et dans quelle mesure les hommes jeunes – séminaristes et prêtres nouvellement ordonnés – voient-ils les choses autrement que des prêtres qui ont été ordonnés dans une époque très différente, quand l’avenir de l’Eglise aux Etats-Unis semblait devoir suivre une trajectoire bien différente ?

J’ai des tas de questions comme celles-ci.

[L’auteur termine l’article en invitant ses lecteurs à suivre en streaming une table ronde qui abordera ces questions.]

Stephen P. White est membre des Etudes Catholiques au Centre d’Ethique et de Politique Publique de Washington.

Illustration : séminaristes lors d’une messe dans l’archidiocèse de Baltimore, en septembre de cette année

Source : https://www.thecatholicthing.org/2019/10/17/shepherds-of-a-wounded-flock/