Le pape François est donc venu confirmer le grand attachement des papes de l’ère contemporaine à la figure de l’époux de la Vierge Marie et du père de Jésus. C’est à l’occasion des 150 ans de la décision de son prédécesseur, le bienheureux Pie IX, d’invoquer saint Joseph comme patron de l’Église universelle, que le Souverain pontife adresse sa lettre apostolique aux fidèles. Dans le but « de faire grandir l’amour envers ce grand saint, pour être poussés à implorer son intercession et pour imiter ses vertus et son élan ».
Nul doute qu’il recevra un accueil fervent à son initiative, tant le patronage du juste par excellence est cher aux chrétiens, qui l’invoquent dans leur vie quotidienne et dans certains moments difficiles. Faut-il sous-entendre que les fidèles du rang soient sur ce point plus attentifs que les théologiens patentés ? Lorsque saint Jean XXIII décida d’introduire le nom de Joseph dans le canon de la messe, il fut critiqué par certains liturgistes pointilleux. Mais le jésuite Jorge Bergoglio trouve dans la tradition de sa compagnie de solides appuis à sa propre dévotion. Un grand mystique du XVIIe siècle, le Père Lallemant, n’hésitera pas à invoquer saint Joseph au cœur même de sa méditation du mystère chrétien. Ce qui peut expliquer la persistance d’un attachement de la part des fils de saint Ignace.
Le gardien et le guide
Le pape François n’explique-t-il pas que, tous les jours depuis quarante ans, après les laudes, il récite une prière à saint Joseph tirée d’un livre français de dévotion des années 1800 ? On comprend qu’il ait le vif sentiment de rejoindre dans l’épreuve actuelle tous ceux qui ne font pas la Une des journaux, mais n’en sont pas moins « en train d’écrire les événements décisifs de notre histoire : médecins, infirmiers et infirmières, employés de supermarché, agents d’entretien, fournisseurs de soin à domicile, transporteurs, forces de l’ordre, volontaires, prêtres, religieuses et tant d’autres qui ont compris que personne ne se sauve tout seul ».
Joseph est l’homme inaperçu, dont la présence est indispensable à l’avènement du Salut. Il faut absolument méditer le texte magnifique de François, qui intervient aussi providentiellement à l’approche de Noël. Dans toutes les crèches du monde, Joseph est bien à sa place comme point de repère mais aussi comme premier acteur dans les circonstances de l’avènement du Sauveur. Il est le gardien et le guide, l’homme de toutes les déterminations. Et il sait, de révélation divine directe, qui est cet enfant : « Elle (Marie) enfantera un Fils, et tu lui donneras le nom de Jésus, car c’est lui qui sauvera le peuple de ses péchés » (Mt 1, 20-21). C’est Joseph qui donne son nom « Dieu sauve » à l’héritier des promesses, ce qui lui vaut à jamais notre attachement et notre tendresse.