Cette mise en garde pourrait utilement être mentionnée sur les formulaires de demande de subventions si l’on en croit les conclusions du rapport sur les aides publiques dommageables à la biodiversité que viennent de remettre à Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’Écologie, du Développement durable, des Transports et du Logement, Vincent Chriqui, directeur général du Centre d’analyse stratégique (CAS) et Guillaume Sainteny.
Ce travail est issu d’un groupe d’experts de la biodiversité, d’économistes, de représentants de syndicats, d’entreprises, d’associations environnementales et de l’administration mis en place par le CAS fin 2010, à la demande du ministère. Il s’inscrit dans les recommandations formulées par l’OCDE et les dispositions du Grenelle de l’Environnement qui demandent d’évaluer l’impact des politiques publiques, fiscales ou autres, sur l’environnement et la biodiversité. La loi d’août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’Environnement prévoit en effet que soit dressé un état des mesures fiscales défavorables à la biodiversité pour adapter progressivement la fiscalité aux nouveaux enjeux environnementaux. De même, la dernière Conférence des parties à la Convention des Nations- Unies sur la diversité biologique, d’octobre 2010 à Nagoya, a adopté un plan stratégique de lutte contre la perte de biodiversité d’ici à 2020 qui passe par la réforme, la suppression ou la réduction des incitations économiques nuisibles à la biodiversité d’ici 2020.
Il était donc important que la France soit parmi les premiers États à lancer ce travail innovant car celle-ci abrite une très grande diversité d’écosystèmes et plus d’espèces de plantes et de vertébrés endémiques dans ses territoires ultramarins que toute l’Europe continentale.
Le rapport rappelle d’abord l’importance des « services écosystémiques » rendus par la biodiversité remarquable comme ordinaire : fourniture des aliments et de matériaux de construction; purification de l’air et de l’eau; modération des inondations et des sécheresses; renouvellement de la fertilité des sols; maintien des ressources génétiques et production de biens récréatifs, esthétiques et culturels. Ainsi, la valeur économique totale de la pollinisation dans le monde est évaluée à 153 milliards d’euros, celle du service d’épuration de l’eau rendu par les zones humides est estimée à 272 € par hectare et par an et celle associée au stockage du carbone est chiffrée à 414 € par hectare et par an en moyenne pour la forêt tempérée et à 320 € par hectare et par an en moyenne pour les prairies permanentes en France.
Le rapport s’est ensuite intéressé aux subventions, aux dépenses fiscales, aux avantages d’origine réglementaire, à la non-application ou l’application partielle de la réglementation ainsi qu’aux subventions implicites. Une aide publique a été considérée comme dommageable à la biodiversité à partir du moment où elle augmente une ou plusieurs des cinq pressions suivantes : la destruction et la dégradation des habitats, la surexploitation des ressources naturelles renouvelables, les pollutions, le changement climatique et la dissémination d’espèces exotiques envahissantes.
Le rapport recommande d’agir dans 5 directions: lutter contre l’artificialisation des sols, en réduisant les dépenses fiscales favorables à l’étalement urbain, pour privilégier plutôt la densité urbaine; inclure le coût de la biodiversité réduite, lors de l’évaluation socio-économique des projets d’infrastructures de transport; réformer la taxation des rejets industriels dans l’eau en intégrant les 13 substances dangereuses prioritaires de la directive cadre sur l’eau dans une redevance pour pollution non domestique; réduire les émissions atmosphériques de métaux lourds et rendre les redevances plus incitatives, par exemple celles perçues par l’État pour toute occupation ou utilisation privative du domaine public.
La ministre a salué la qualité de ce travail, concret et très complet, et a déclaré souhaiter s’en inspirer pour répondre à la demande du Président de la République, à l’occasion du 4ème anniversaire du Grenelle de l’environnement, de créer un fonds national de préservation de la biodiversité. Ce fonds, qui sera au moins alimenté par le redéploiement des incitations fiscales peu efficaces, soutiendra la préservation et la restauration de milieux naturels et de continuités écologiques.
Le développement durable passe donc aussi par le recyclage des mauvaises taxes.
Pour aller plus loin :
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- Édouard de Castelnau
- Liste des ouvriers pastoraux, Evêques, Prêtres, Religieux, Religieuses et Laics tués en 2011 et 2010
- Sur le général de Castelnau et le Nord Aveyron.
- Dénoncer les abus sectaires dans la vie consacrée et passer l’épreuve en union au Christ Epoux