Benoît XVI a donc voulu célébrer le vingt-cinquième anniversaire de la première rencontre interreligieuse d’Assise décidée par son prédécesseur, en se rendant à son tour dans la ville de saint François. Ceux qui se souviennent de cet événement tout à fait inédit n’ont pas oublié non plus dans quel climat de tension intense il s’était produit. Peu de temps avant, la visite de Jean-Paul II à Lyon s’était déroulée sous une exceptionnelle protection policière, tant on redoutait des attentats islamistes. C’est d’ailleurs une des raisons qui avait déterminé le Pape à prendre cette initiative audacieuse. Seule une confrontation, qui rassemblerait des représentants de tous les courants religieux du monde, serait en mesure de désamorcer le processus de haines interconfessionnelles.
Bien sûr, Jean-Paul II était conscient du risque de dérive syncrétiste qui pouvait en résulter. Une vive contestation traditionaliste allait s’opposer à la rencontre d’Assise, au nom de la pureté de la foi et de l’unicité du salut en Jésus-Christ. Le psaume 15 étant abondamment rappelé : « Tous ces dieux des païens sont des démons. » Il était absurde de s’en prendre au pape sur ce terrain, d’autant que lui-même était conscient de la confusion qui existait chez beaucoup. C’est pourquoi il demanderait au cardinal Ratzinger d’énoncer toutes les distinctions nécessaires dans un document très important intitulé Dominus Iesus (« Sur l’unicité et l’universalité salvifique de Jésus-Christ et de la Bible »).
Si Benoît XVI a décidé de se retrouver à Assise du 26 au 28 octobre au milieu des représentants des grands courants spirituels, c’est qu’il est persuadé que la culture du dialogue et du respect non seulement n’exclut pas les nécessaires discernements mais favorise plus la quête de la vérité que la confrontation hostile et stérile. Le premier fruit espéré de cette audace est une culture de paix, fondée sur les meilleures aspirations des hommes de bonne volonté. L’expérience des deux précédentes rencontres dans la cité du Poverello a permis de déterminer plus rigoureusement les conditions d’un dialogue qui tire vers le haut et se refuse aux équivoques du relativisme religieux.