À lire la presse de ces derniers jours, il y avait de quoi avoir la chair de poule. Le Point se demandait en couverture si l’on était à la veille d’une nouvelle révolution française. Le Nouvel Observateur si les années trente étaient de retour. Les années trente, je veux quand même le rappeler, c’est une période de crise sérieuse pour la IIIe République, mais c’est aussi celle où un certain Adolf Hitler arrive au pouvoir en Allemagne, selon des procédures d’ailleurs tout à fait légales. Je n’aurai pas l’outrecuidance de demander si un nouveau Führer se profile à l’horizon de l’Europe, mais il faut quand même se méfier lorsqu’on manie les symboles et les références historiques. Je sais bien que nous vivons une crise profonde qui présente nombre d’analogies avec celle des années trente, mais il faut quand même faire attention aux rapprochements un peu trop sollicités. Lorsque je lis que le climat créé par la Manif pour tous est d’ordre « pré-insurrectionnel », je me frotte les yeux.
Je continue ma lecture du Nouvel Obs : « Quand la galaxie des fachos rencontre les croisés de l’ordre moral, certains rêvent d’insurrection. La manifestation du 21 avril contre le mariage gay sera un test. » Tiens, on l’a vue cette manifestation du 21 avril ! Tous ceux qui attendaient des débordements en ont été pour leurs frais. D’ailleurs, qui de sérieux pouvait en douter ? S’il est vrai que quelques groupuscules extrémistes ont tenté, les soirs de la semaine dernière, de provoquer des batailles ouvertes avec la police, ils étaient toujours aux marges extrêmes, essayant de surfer sur une vague de contestation populaire qui s’est développée sans eux et qui n’a aucun rapport avec eux. On s’en est bien aperçu hier après-midi. Toutes les précautions avaient été prises, et les groupuscules en question ont été réduits à l’impuissance.
Alors, il faudrait arrêter de se faire peur, de construire des réquisitoires fondés sur des amalgames, des constructions arbitraires. Tous ceux, qui ont joué sur la peur et la montée des extrêmes, devraient y réfléchir à deux fois. L’opinion ne se laissera plus prendre à ce type de propagande. Le débat en cause, l’avenir de la famille, est une chose trop sérieuse pour servir d’exutoire aux stigmatisations et aux fantasmes. Peut-on revenir à un minimum de sagesse pour poser les bonnes questions ?