Le Notre Père, échelle du Salut - France Catholique
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« Ô Marie conçue sans péché »
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Le Notre Père, échelle du Salut

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Curieuse idée que de parcourir la prière du Notre Père en commençant par la fin. Pourtant, chez Alain Noël, ce n’est pas une fantaisie de marketing ni une recherche d’originalité, mais une intuition qui l’habite depuis une trentaine d’années : « Durant la prédication d’une retraite, j’ai eu l’image du Notre Père comme une échelle destinée à nous sauver », raconte-t-il à France Catholique. À l’image d’une échelle de sauveteur, lancée au promeneur qui est tombé dans une crevasse en montagne, ainsi le Notre Père est une échelle déroulée par le Christ pour sauver l’homme et le « hisser jusqu’au Père ». Telle est l’idée de départ étoffée au fil des ans par ce laïc père de famille. Une intuition qui a trouvé un écho chez le cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, qui explique dans la préface : « Ce qui fait l’originalité de l’ouvrage, c’est que l’auteur ne se contente pas de méditer les différentes demandes du Notre Père, les unes après les autres. Il invite le lecteur à prendre le Notre Père « en sens inverse », une démarche avec laquelle je me suis toujours senti en grande connivence intérieure. Cela peut paraître surprenant, mais c’est un parcours spirituel riche et fécond qui part de la dernière demande pour remonter jusqu’à la première. »

Le Notre Père n’est pas « à réciter à l’envers » mais à « parcourir en sens inverse », précise Alain Noël : « Quand on déroule une échelle vers quelqu’un, celui qui déroule est en haut et le destinataire est en bas. Il doit donc commencer par le bas », le but étant de dire le Notre Père « comme Jésus l’a dit ». Par ce parcours hors du commun, le chrétien découvre que « le Notre Père n’est pas simplement une prière à réciter ni une formule magique », mais « un chemin spirituel à parcourir, une attitude intérieure ». C’est une prière, insiste ce prédicateur de retraites et animateur de conférences, « qui nous invite à devenir et à être ce que nous sommes potentiellement par notre baptême : des fils de Dieu. C’est une prière de fils de Dieu ».

Et dans ce cadre, le Notre Père est un chemin pour « prendre conscience qu’on est pleinement fils de Dieu ». D’ailleurs, fait observer Alain Noël, le parcours du livre se décline à la première personne : il s’agit d’approfondir le « je » avant de pouvoir dire « nous » : « Que signifie « nous sommes sauvés » si je n’ai pas conscience que « je suis sauvé » ? » L’expérience chrétienne est une expérience à la fois « très personnelle » et « indissociable d’une expérience communautaire ».

En faisant lui-même ce parcours, l’auteur s’est aperçu qu’il voyait la prière enseignée par le Christ sous un autre angle, tel le montagnard qui admire un autre panorama lorsqu’il parcourt un chemin de montagne en sens inverse. Un exemple ? « Je me suis rendu compte que la première demande du Notre Père « que ton nom soit sanctifié » n’évoquait rien pour moi, je ne l’avais jamais approfondie. Auparavant je récitais le Notre Père comme on dévale un escalier… je sautais les premières marches ! » Même après avoir récité le Notre Père « des milliers de fois », certaines parties de cette prière peuvent ne pas « résonner en l’homme ». Ce parcours propose donc de se poser les bonnes questions. « Évidemment, on peut toujours faire du blabla, donner un étayage intellectuel », fait observer Alain Noël, qui se défend d’avoir écrit un commentaire ou d’avoir voulu faire de l’exégèse. C’est un livre très personnel, ajoute-t-il, qui « fait faire du chemin ».

Le « chemin », c’est justement le message central de l’ouvrage, qui invite non pas à collectionner de nouvelles connaissances mais à prendre conscience de la nécessité de se mettre en marche. Ainsi Alain Noël encourage à « faire en sorte que notre foi chrétienne ne soit pas une croyance au panthéon de toutes les croyances : on croit que la Terre est ronde, on croit qu’après le printemps c’est l’été… on croit un certain nombre de choses… Mais ces croyances n’ont souvent aucune incidence sur notre vie. Le fait que la Terre tourne et qu’elle soit ronde, ne change rien à ma vie. Si notre croyance au Christ reste au panthéon de toutes nos connaissances, elle ne change rien dans notre vie ». Telle l’exhortation de saint Paul aux Romains, Alain Noël invite à « renouveler votre façon de penser » (Rm 12,2). Le parcours du Notre Père est un chemin où « notre mode de pensée, notre manière de voir les choses, se modèle petit à petit sur la manière évangélique, donnée par Jésus, de voir les choses ». Un livre qui est donc « une invitation à une révolution », et même « à une mort à nous-mêmes ». L’image n’est pas trop forte pour Alain Noël, qui estime que « l’intelligence est la plus dure à convertir » : « On peut même convertir notre cœur, aimer Jésus, avoir de l’affection pour la Vierge, en continuant à avoir une intelligence qui fonctionne à la manière du monde ». Benoît XVI, fait-il d’ailleurs observer, a largement contribué, par ses textes et discours, à « une explicitation claire du renouvellement de l’intelligence ». L’effort sous-entendu pour le croyant est de développer sa raison, qui ne doit pas devenir « raisonnante » mais « évangélisée, renouvelée par l’Esprit-Saint ».
L’ouvrage s’ouvre par un chapitre sur le mot de la fin « Amen », un terme qui est loin de signifier « Ouf, c’est fini », souligne Alain Noël avec humour : « Ce terme est capital. C’est le nom du Christ dans l’apocalypse. Dès le premier mot, le Notre Père est christologique, c’est une prière centrée sur le Christ, pour aller au Père, car ce n’est qu’avec le Christ que l’on peut rejoindre le Père. »

Puis le livre se poursuit par la doxologie : « Car c’est à toi qu’appartiennent le règne, la puissance et la gloire, pour les siècles des siècles », formule traditionnelle qui n’est pas « un barreau de l’échelle » mais qui représente « les montants de l’échelle : le règne étant le montant gauche, la puissance étant le montant droit, et la gloire étant la lumière qui nous accompagne tout au long de cette remontée ». Cette doxologie est « fondamentale » : elle indique « l’attitude » dans laquelle doit être le chrétien qui récite le Notre Père. En l’occurrence, explique Alain Noël, « ce n’est pas mon règne que je cherche, ce n’est pas ma puissance que je vais utiliser, ce n’est pas ma gloire que je cherche. D’entrée de jeu, nous sommes invités à une révolution dans notre manière de nous comporter et de voir les choses : nous ne nous appuyons plus sur notre force, mais véritablement sur ce que le Christ a fait ».

Un enracinement biblique pour illustrer ce parcours ? L’échelle de Jacob : « Il eut un songe : une échelle était dressée sur la terre, et son sommet touchait le ciel ; des anges de Dieu montaient et descendaient » (Gn 28,12). Pour Alain Noël, cette image vient « confirmer le fait que nous devons vraiment remonter cette échelle : dans le livre de la Genèse, les anges « montaient et descendaient » et non pas « descendaient et montaient ». Ce type d’approche est donc justifié ». De même, chez les Pères de l’Église, saint Bonaventure voit le Christ comme une échelle. Et sainte Rose de Lima affirme qu’« en dehors de la croix il n’y a pas d’autre échelle pour monter au Ciel ». Enfin, lors d’un voyage en Terre sainte, au mont des Béatitudes, Alain a trouvé une illustration du Notre Père gravé sur une croix en forme d’échelle, dans un magasin de souvenirs. Un signe de confirmation… providentiel.

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ALain Noël, Le Notre Père, échelle du Salut, Éditions Mame, Collection Monastère invisible, 168 p., 14,90 euros