Aimer l’Église, c’était un leitmotiv, cher au bienheureux pape Paul VI et je l’ai souvent entendu dans la bouche du cardinal Lustiger. D’évidence, il s’agit de deux références prestigieuses mais nullement exclusives. Cette expression me revient, car en période de troubles, lorsqu’on agite des scandales, comme ceux dont nous nous sommes entretenus hier, on peut s’interroger sur l’esprit qui préside aux dénonciations et à l’étalage desdits scandales. S’agit-il d’une exigence déontologique, celle qui requiert qu’on aille au bout d’une enquête, si désagréable qu’en puissent-être les résultats ? Je ne nie pas qu’une telle exigence existe, mais elle n’est pas toujours modérée par un esprit de justice et de véritable exactitude. Il y a forcément en perspective le choc des formules et des couvertures provocantes.
De plus, lorsqu’il s’agit de l’Église, et particulièrement du Saint-Siège, il y a comme un plaisir malin d’une sorte de transgression. Secouer une institution qui a un statut sacral, pour reprendre simplement les notions d’une sociologie a-religieuse telle celle de Durkheim, c’est forcément agiter des passions troubles. Mais ce n’est qu’une partie du problème. On est obligé de constater que, très souvent, ceux qui s’emparent de sujets concernant l’Église, ont, en fait, leur philosophie bien établie. Ils ont leur idée de l’institution, hostile ou partisane. Hostile, il ne leur déplaît pas de régler leurs comptes. Partisane, ils entendent, de fait, imposer leur conception des choses, leur théorie sur l’avenir d’une institution dont ils imaginent le remodelage.
C’est pourquoi je reviens à mon propos initial. Aimer l’Église, ce n’est pas défendre inconditionnellement tous les aspects de l’institution, et encore moins justifier l’injustifiable. C’est avoir quelque idée, ou au moins quelque respect pour sa nature profonde, pour son mystère, ce qui en fait un objet tout à fait singulier. Mais pour cela, il faut consentir à cet objet, ne serait-ce qu’en revenant aux textes fondamentaux ou à un livre aussi essentiel que celui du père de Lubac, intitulé Méditations sur l’Église. J’y ajouterai un tout petit livre de Bernanos sur Jeanne d’Arc, expliquant que notre Église est l’Église des saints. Lisez. Après, nous pourrons discuter.