Retour à d’autres réflexions : chacun comprend qu’un habitant du Cambodge, du Bangladesh, du Pakistan, de la Libye, du Tchad, de l’Érythrée, du Mali, du Niger, des Comores etc., se voyant si misérable et sachant que nous sommes encore riches désirera tout naturellement venir chez nous partager ce qui se trouve chez nous de tout à fait désirable et guère chez lui.
Bien entendu, si j’étais dans cette situation qui les épouvante, je ferais de même : d’ailleurs, nos jeunes Français, formés par une France qu’ils ont commencé à mépriser, avec des raisons audibles, regardant du même œil concupiscent du côté des pays qui réussissent mieux dans le domaine des affaires, voilà qu’ils revêtent le vêtement des « nouveaux » émigrés, de ceux que nos chers voisins accueillent les bras ouverts quand ils ferment la porte à ceux qui nous ont envahis. Je ne puis comprendre, sauf s’il s’agit d’un exil provisoire, mais il s’affirme de plus en plus que le projet mis en route est du type pérenne.
Notre Pape François nous invite à accueillir sans restriction ces foules dont il a constaté la misère, ce qui équivaut à nous suggérer de disparaître : simplement parce que nous ne pouvons déjà plus satisfaire aux conditions normales de l’accueil. Par bonheur, ce conseil, qui a sa logique dans le monde des perfections et de la sainteté, n’appartient pas au caractère d’infaillibilité qui est le sien quand il parle de la foi. Je me répète à nouveau mais parfois la répétition seule se fait entendre : nous avons, chacun de nous, le devoir d’accueillir et c’est indubitable ; nous avons donc le devoir de le faire pour le mieux mais dans la seule mesure où accueillir nous est possible sans pour autant mettre en danger ceux qui nous sont toujours les plus proches, ceux de notre propre peuple. Voilà bien le devoir strict d’un chef d’État.
Il est vrai que les formules d’accueil sont multiples : je pense à tous ceux qui vont au devant des peuples pauvres et qui les aident, avec des moyens provenant de chez nous, à demeurer vaillamment sur place. C’est un malheur que d’avoir à s’exiler, surtout lorsque l’on se trouve être sans ressources dans un pays que l’on mettra dix ans ou plus à connaître. À plusieurs reprises j’ai exploré diverses solutions portant sur notre capacité à former les gens à toutes sortes de métiers. C’est un vrai gisement de possibilités d’accompagner chez eux de tels artisans nouveaux. Existent en Afrique des possibilités innombrables de créations d’emplois : encore faudrait-il d’abord de leur permettre d’acquérir tel ou tel métier, ensuite constituer le pécule nécessaire pour le créer en effet cet emploi qui ferait de chacun un homme heureux, capable de faire vivre « chez eux » leur famille. Il faudrait aussi un encadrement pour suivre chacun de ces artisans là où ils seraient implantés : rien de tout cela n’est impossible. Il serait plus juste et efficace de dépenser des budgets à la hauteur des ambitions que de jeter l’argent par la fenêtre dans des cités à l’agonie.
Une nation telle la France ne peut en des temps si concentrés accueillir indéfiniment de telles foules. Les statistiques sont formelles, inaccessibles aux baratins tendancieux des officialités ; aujourd’hui, nous pouvons être certains que si, comme pour le réchauffement climatique, rien n’est décidé, aucune mesure efficace n’est prise, la France entrera plus profondément encore dans le processus de perte d’identité, de perte d’âme, de perte d’esprit.
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