Le début d’une nouvelle année est généralement un moment plein d’espoir, une chance de prendre un nouveau départ. Etant donné ce par quoi l’Église est passée l’année dernière, l’optimisme habituel qu’apporte une nouvelle année – et une nouvelle décennie – semble légèrement diminué.
Mais tout n’a pas été mauvais. En fait quelques grands pas ont été accomplis dans la bonne direction. Les évêques américains sont allés faire une retraite à Mudelheim ; Théodore Mc Carrick a été réduit à l’état laïc ; les présidents des conférences épiscopales du monde entier se sont réunis à Rome pour un sommet sur les abus sexuels des clercs ; le pape François a publié de nouvelles normes universelles (vos estis lux mundi) pour responsabiliser les évêques .
En Juin, l’USCCB a pris de son propre fait des mesures modestes mais importantes. Le pape François a levé le secret pontifical sur un certain nombre de cas et d’accusations, entre autres sur les abus sexuels du clergé. Il a remonté l’âge statutaire établissant la pornographie infantile (18 ans contre 14) et a ouvert de nouvelles possibilités d’intervention pour des laïcs canonistes, dans des procès à l’encontre de prêtres accusés d’abus criminels.
Pris individuellement, aucun de ces changements ne pourrait être pris pour une révolution, mais additionnés les uns aux autres, ils forment quelque chose de conséquent. Chose au moins aussi importante, certains signes montrent que les paramètres par défaut de notre culture ecclésiale sont en train de changer – lentement, mais sûrement vers de la transparence et de la responsabilité, du moins en ce qui concerne les abus sexuels. Ceci étant dit, voilà quelques raisons d’espérer – du moins d’une façon de parler – dans l’année qui vient.
Le rapport Mc Carrick. Rome a promis de faire paraître un rapport sur le cas de Théodore Mc Carrick, mais n’a pas dit pour quand. Certaines rumeurs disaient qu’il sortirait avant la fin de 2019. Puis début 2020. Bien qu’il en soit encore temps, il est également possible que le rapport soit encore beaucoup retardé. Indépendamment du jour où le rapport Mc Carrick sortira, il est certain qu’il rallumera la colère et les frustrations, et relancera la crise des abus sur le devant de la scène.
Comme nous l’avons appris par le retard inhabituel et de dernière minute de la béatification de l’archevêque Fulton Sheen, le Vatican (et certains évêques américains) sont très sensibles au fait qu’il y a une enquête civile dans de nombreuses juridictions des USA, y compris New York, New Jersey, et Washington DC – endroits où Mc Carrick a passé de grandes parties de sa carrière ecclésiastique. Le fait de ressortir un rapport officiel du Vatican à propos de qui, à Rome, savait quoi et quand sur les dépravations de Mc Carrick (en supposant que le rapport soit exact) au milieu d’une enquête civile en cours sur les mêmes sujets, pourrait impliquer des complications légales inopportunes pour l’Église.
À propos de sujets de loi, pratiquement tous les Etats qui permettent des enquêtes au niveau de l’Etat, ont soit déjà commencé, soit promis de commencer, ou déjà fini d’enquêter sur la façon dont ont été traités les cas d’abus sexuels de clercs par l’Église catholique.
En plus, une vague de lois a été votée dans différents Etats, pour assouplir temporairement les règles limitant les cas d’abus sexuels sur mineurs. Le « regard par la vitre arrière » de New York vient de commencer le mois dernier, et va durer un an. Celui du New Jersey vient d’ouvrir le mois dernier et va durer deux ans. La Californie a une fenêtre de trois ans qui a ouvert hier. L’Arizona, le Montana, Hawaï et la Caroline du Nord ont tous voté des lois similaires. Le Vermont est allé au point d’éliminer complètement les règles de limitations des abus sexuels sur mineurs.
Pour dire les choses autrement, tandis que le coût spirituel à long terme de la version actuelle de la crise des abus sexuels est pratiquement impossible à évaluer, et prendra des dizaines d’années pour être complètement évalué, les conséquences légales et financières les plus significatives de cette crise qui a éclaté en 2018 commenceront à retomber en 2020.
Un autre changement qui devrait survenir cette année : les appointements des évêques. D’après mes calculs, dix sept ordinaires de rite latin (présidents des diocèses et archidiocèses) aux Etats Unis ont déjà dépassé75 ans, l’âge requis pour la retraite, ou bien vont atteindre 75 ans avant la fin de l’année 2020. Le cardinal Sean O’Malley de Boston, et l’archevêque Charles Chaput à Philadelphie ont tous les deux déjà 75 ans, de même que l’archevêque Robert Carlson de Saint Louis. L’archevêque Joseph Kurtz de Louisville n’a pas encore 75, mais est dans un très mauvais état de santé. (Prions pour lui). L’évêque Nicolas DiMarzio de Brooklyn, diocèse qui rassemble 1,5 million de catholiques a également atteint les 75 ans l’année dernière, tandis que l’évêque Gerald Barnes de San Bernardino, avec 1,7 millions de catholiques, aura 75 ans en juin 2020.
Il y a peu de chances que tous ces hommes soient remplacés dans les douze mois à venir, mais il y a de fortes chances que de nombreux archidiocèses et/ou de très grands diocèses aient un nouvel évêque avant la fin de l’année.
À propos de mises à la retraite, le cardinal Donald Wuerl aura 80 ans en novembre. Le pape François était clairement réticent à accepter sa démission en tant qu’archevêque de Washington, comme le montre la lettre élogieuse qu’il lui a écrite quand il l’a finalement acceptée. Bien que Wuerl ne soit plus à la tête du diocèse, il a maintenu sa participation à la congrégation des évêques dont il est l’un des deux seuls membres américains. Wuerl va automatiquement perdre cette participation à la congrégation le jour de ses 80 ans. A moins que le pape ne nomme un autre américain, l’année va sans doute se terminer avec le seul cardinal Cupich de Chicago comme membre américain de la Congrégation des évêques. Une dernière chose à surveiller en 2020 : Comment les évêques vont-ils se comporter en cette année d’élections présidentielles. Leur crédibilité collective est à un niveau très bas, mais cela pourrait en amener certains à se demander ce qu’ils auraient à perdre en disant ce qu’ils pensent. Nous verrons.
Sans aucun doute, la nouvelle année va apporter son lot de surprises. Peut-être qu’une des surprises de 2020 sera que cette année nouvelle dépassera toutes les attentes. Dans cette première semaine de l’année, j’ai juste assez d’optimisme pour penser que cela pourrait arriver pour une fois.
Comme ce serait bien !