Dans le psaume 8 nous lisons : « vous lui (à l’homme) avez donné pouvoir sur les œuvres de vos mains, sous ses pieds vous avez mis l’univers « . Ce passage rappelle le passage sur la » domination » de l’homme dans la Genèse (1:28). Cela signifie que les ressources naturelles de la terre et du cosmos sont données à l’homme afin que, par elles, il puisse vivre et accomplir son dessein.
Cette aspect est théologique. Il montre que, discernables au sein du cosmos, les choses sont liées les unes aux autres. Chaque catégorie des choses existantes, en étant ce qu’elle est, a une raison d’être. Ce caractère unique et permanent des choses existantes nous permet de les étudier et de les connaître avec notre esprit. Tous les objectifs non-humains, étant bons, sont eux-mêmes ordonnés pour le dessein de l’homme. Il en découle que si nous ne connaissons pas la raison d’être de l’homme en ce monde et d’en l’au delà, nous ne connaissons pas le dessein des choses que nous trouvons dans l’univers.
J’aborde ces commentaires sur les ressources naturelles sous un angle spécifique. Aujourd’hui, le monde n’est pas perçu comme étant « pour » l’homme, mais que l’homme est « pour » le monde. Ce revirement volontaire de la hiérarchie des finalités de l’ordre naturel signifie que l’intérêt premier de l’homme n’est pas sa propre âme, mais que c’est plutôt la capacité présumée de la terre, et peut-être du cosmos lui-même, à le porter.
« L’espèce » compte, mais pas Jean ou Julie, qui peuvent être sacrifiés. Le « futur » signifie, non pas la vie éternelle, mais la marche temporelle de la planète à travers les siècles. Le salut signifie « sauver » la planète, habituellement au détriment de certains hommes, pour le bien d’autres à venir. Dans ce contexte, les estimations (et c’est tout ce qu’elle sont) des richesses disponibles deviennent les principales préoccupations des hommes et des états. L’Ethique devient la « gestion » des économies réalisées par certains hommes par la répartition des ressources.
Parler du « droit » des arbres et des hirondelles appartient au même discours que celui « des droits de l’homme », quand le mot « droits » signifie ce ce que nous voulons ce qu’il signifie. Les « droits » ne se référent pas à quelque chose d’intrinsèque à l’être en question. Plutôt, ainsi que Hobbes le dit, ils sont ce que nous voulons qu’ils soient. Nous pouvons doter les tortues de droits, et pas les bébés dans le sein de leur mère. Cette « liberté » est ce que les « droits » sont destinés à accomplir.
Nous avons beaucoup d’égards pour le « futur » de la planète. Les êtres humains sont considérés comme la plus grande menace. Ils épuisent les ressources naturelles. Ils doivent être contrôlés pour le bien des futures générations. Nous les contrôlons en postulant une « disette » des ressources naturelles. Cette disette supposée nous oblige à distribuer ce qui reste de façon équitable.
Aucun penseur politique du passé, pas même Machiavel, n’avait imaginé une meilleure « présupposition » que cette présumée « disette » des biens dans les siècles à venir, sur laquelle baser un pouvoir absolu sur les êtres humains moyens.
Mais où est le problème ? Nos ressources ne sont-elles pas limitées? N’avons nous pas besoin de « protéger » l’environnement? Si nous demandions à un savant du 19ème siècle, ou même en 1500 avant Jésus-Christ, si la planète pourrait faire vivre une population de quelques 7 milliards d’êtres humains, comme c’est le cas aujourd’hui, il n’aurait pas vu comment ce serait possible. Pourquoi ne le verrait il pas? Parce qu’il ne pourrait pas imaginer comment l’intelligence humaine serait capable d’inventer les moyens d’utiliser les ressources de la terre pour le bien de tant de gens.
De tels ancêtres pourraient cependant comprendre que de tels êtres humains, s’ils venaient à exister dans des siècles à venir, pourraient avoir les mêmes problèmes humains , et la même destinée humaine que les leurs.
En terme de ressources naturelles, la planète est adéquate pour les desseins de Dieu. De façon évidente, ces ressources n’étaient pas destinées à rester inutilisées par chaque génération successive. En outre, il s’avère que la disponibilité des ressources est en soi sujet de la compréhension qu’en a l’esprit humain. C’est pourquoi les politiques basées sur leur disette présumée s’auto satisfont. Elles reposent sur la supposition que notre connaissance et notre compétence resteront à peu près comme maintenant.
Et puisque nous présumons que nous pouvons anticiper ce dont les êtres humains, qui existeront dans 500, 1000 ou 2000 ans (si nous durons si longtemps), auront besoin, nous basons notre hypothèse de disette sur ce qui est en fait un mythe.
L’homme lui-même est « une ressource naturelle « . Il existe sur cette planète par nature comme tout le reste. Il est différent parce qu’il a une intelligence. L’intelligence est le seul pouvoir anti-entropie de l’univers qui voit ce qui est là, et ce qu’il est. La véritable ressource naturelle est son esprit dans lequel ce qui n’est pas lui-même est connu et ordonné.
La marque de l’univers n’est pas la disette mais l’abondance. La « domination » de l’homme permet aux ressources naturelles d’atteindre leur limite. L’homme est la seule « ressource naturelle » cosmique qui doit choisir son propre dessein. Le véritable drame de l’univers se situe dans la « ressource naturelle » qu’est l’homme.
À propos de James V. Schalke, S.J.
James V. Schalke, S.J., qui travailla comme professeur à l’université de Georgetown pendant 35ans, est un des plus prolifique écrivain catholique d’Amérique. Ses plus récents livres sont : The Mind That Is Catholic, the Modern Age, Political Philosophy and Revelation : A Catholic Reading, and Reasonable Pleasure.
Source : http://www.thecatholicthing.org/2015/01/06/natural-resources/
Illustration : « Adam Nommer les animaux » par Carl BA Ruthart (1686)