Il y a peu, j’ai écrit ici un article intitulé « la féminité toxique », et qui n’avait rien à voir avec la féminité toxique. J’y parlais par contre du besoin qu’a notre culture de rétablir des normes de « gentilhommerie » et de trouver de meilleurs moyens de préparer les jeunes hommes à une pleine maturité, y compris aux responsabilités qu’entrainent le mariage et la famille. Les êtres humains sont biologiquement « adultes » – c’est-à-dire qu’ils peuvent reproduire l’espèce – vers 15 ou 16 ans. Les sociétés doivent décider de les rendre capables de prendre ces responsabilités, ou en supporter les conséquences. Nous avons simplement décidé d’en supporter les conséquences.
A la suite de la parution de cet article, une bonne amie, mère de trois garçons, m’a écrit pour me dire « C’est un bon article, mais… »
Uh – oh.
Elle avait, disait-elle, une « sérieuse question ». C’est une femme passionnée et intelligente que je connais depuis de nombreuses années, et elle est elle-même un écrivain accompli, aussi, permettez-moi de la laisser parler pour elle-même.
« Où irait un jeune homme adulte de nos jours », voulait-elle savoir, « pour trouver un adulte avec lequel se retrouver pour pouvoir mûrir ? Qui, dans la vie publique, semble être adulte à votre avis ? Je pourrais mettre en concurrence chacun de mes trois fils, du socialiste de 22 ans au bébé de la famille de 15 ans, qui a encore beaucoup à grandir, à pratiquement tous les professeurs qu’ils ont rencontrés au collège et au lycée (à part une ou deux glorieuses exceptions) pour la vertu chrétienne et la virilité (et je ne parle pas des leaders civiques, des personnalités des sports ou du spectacle). »
Elle marque un point. Il y a très peu de personnalités de la vie publique qu’on pourrait considérer comme un bon modèle pour de jeunes hommes. Cela a beaucoup à voir avec l’appauvrissement du discours public et la corruption des media d’information. Il y a très peu de conversations « adultes » dans les media modernes. Tout est consacré au « divertissement ». Et un adulte raisonnable et mature, qui s’exprime sur un sujet avec passion mais intelligemment, n’est pas aussi distrayant qu’un cinglé qui lance des bombes.
Aussi faut-il renoncer aux personnages publics. Un fils a besoin de s’engager dans des activités où la sécurité et le bien-être des autres dépendent du fait qu’il exerce un talent avec excellence, et où sa sécurité et son bien-être à lui dépendent de ce que les autres font leur boulot avec adresse et excellence.
Mais retournons à notre mère dévouée : Elle fait cette demande :
« Quelque chose que je n’avais pas compris avant d’élever des garçons, et avant de faire de la direction spirituelle avec des femmes, c’est que le cœur d’un homme est en fait plus fragile que celui d’une femme sous certains aspects, et beaucoup de femmes n’ont pas la moindre idée d‘à quel point elles peuvent être cruelles envers les hommes dans leurs vies. Je regarde mes fils, et je vois, malgré leurs défauts, comme leurs cœurs sont bons, et purs, et nobles, combien ils veulent faire plaisir, et je vois combien le monde est tout le temps décidé à leur dire qu’ils sont épouvantables, et à penser d’eux le pire, et j’ai peur qu’ils ne soient abattus et ne deviennent cyniques.
« Même des jeunes femmes catholiques, par ailleurs intelligentes, que je connais, passent leur temps à dire des choses comme : ‘Je vais élever mon fils en lui apprenant à ne pas être toxique’ comme si elles considéraient leurs petits garçons innocents – qui savent à peine marcher – et voyaient en eux des monstres en herbe – une nature qu’il va falloir abattre ou transformer, plutôt qu’une merveille faite pour être aimée et admirée, et aidée à mûrir.
« Dans mon expérience, TOUTES les institutions et les personnes qui sont supposées être leurs défenseurs et leurs champions, sont défaillantes. J’ai mentionné des mamans qui croient devoir rediriger leurs garçons toxiques.
Mais aussi les lycées de leurs garçons, où l’administration du campus est tenue par des femmes et où toutes les retraites ne traitent pas de Jésus et du désir de Lui ressembler, mais par contre, ont pour point de départ la conviction qu’ils sont agressifs et furieux, et qu’on doit leur faire indéfiniment la leçon pour qu’ils ne soient pas brutaux et cruels. En bref, personne dans le domaine de la culture, ne les AIME, et personne ne croit en eux, ni ne s’attend à ce qu’ils soient bons. On prend ces belles âmes pleines de nobles aspirations et ayant le désir d’être nobles, et on les accuse sans fin de mauvaises intentions qu’il faut abattre. On les voit comme des problèmes, de qui le meilleur qu’on puisse attendre est une certaine retenue bas de gamme pour qu’ils n’aient pas une conduite criminelle. C’est déprimant. Et dans certains cas, cela risque de créer le ressentiment même qu’on est en train d’essayer de contrer.
« J’ai pris très à cœur ce qui est arrivé aux garçons Covington1 » a-t-elle dit. « Un de mes fils a un grand sourire large et maladroit, comme le principal de ces garçons. Cela aurait pu être lui. La facilité avec laquelle le propre collège de ces garçons, leur évêque, la direction de la marche pour la Vie, etc… ont sauté à la mauvaise conclusion n’avait, à mon avis, rien d’exceptionnel. Personne n’aime ni ne comprend les garçons et ceci, en soi, est une cruauté massive et toxique. »
En tant que mère de trois fils, je suppose qu’elle doit savoir.
Personne ne devrait avoir envie de réintroduire des stéréotypes qui n’ont pas été utiles dans le passé, et seraient pire aujourd’hui, tels que les rôles soi-disant « traditionnels » qui n’ont pas vraiment existé avant les années 1950 en Amérique, et n’existent plus depuis longtemps. Nous devrions plutôt considérer plus sérieusement les difficultés qui sont survenues quand les pères de famille se sont mis à travailler pendant de longues heures loin de la maison. Admettons, cela n’aide pas de faire la même chose avec les mamans, mais les enfants que ce soit les filles ou les garçons, vont mieux avec leurs deux parents pour les élever et les éduquer avec le souci de les rendre capables de devenir de bons parents à leur tour bientôt.
Une culture qui passe très peu de temps à éduquer ses adolescents pour qu’ils vivent une vie de couple réussie et qui passe la plus grande partie de son temps à leur parler de sexe – comme si c’était la seule chose qu’ils avaient besoin de savoir à propos du mariage – tout en cherchant par-dessus tout à ce qu’ils fassent des carrières « réussies » dans les affaires financières, les prépare à des peines de cœur répétées et de nombreuses années de solitude inutile.
27 février 2019
https://www.thecatholicthing.org/2019/02/27/a-mother-raising-boys-speaks-out/