J’ai récemment entendu dire par plusieurs sources qu’un Américain sur six entre 18 et 34 ans est sans travail ou en prison. Pourtant, cela ne suscite absolument aucune réaction, de personne. Les bureaucrates de nos chancelleries pourraient prendre un peu de temps sur celui passé à siroter leur thé pour poser cette simple question : « Comment diable avons-nous laissé les choses devenir si mauvaises pour nos jeunes frères, surtout à notre époque, quand nous avons si désespérément besoin de leur énergie et de leur dynamisme ? »
Si nous devions jeter toutes les innovations « éducatives » que les colporteurs politiques ont exploré sur notre dos dans les quatre-vingt dernières années, et n’enseigner simplement ce qui était alors considéré comme la norme pour une personne avec un bagage à moitié décent dans les arts et les lettres et la nommer « classique », nous étancherions l’hémorragie dans nos effectifs et donnerions en même temps à nos jeunes un ou deux points d’écart sur leurs homologues scolarisés.
Pourquoi ne faisons-nous pas cela, face au délabrement que nous constatons, je ne sais pas. Ce qui est devenu un cortège de vieilles habitudes destructrices a la vie dure.
L’un des paramètres de notre Automate Éducatif est le suivant : « Éducation mixte à n’importe quel prix ». Cela aussi est à revoir. Je pense que les résultats le prouvent. L’éducation des garçons, en grande partie par des femmes qui ne réfléchissent pas en profondeur aux besoins et aux points forts des garçons, a prouvé qu’elle était un échec impressionnant.
Peut-être y a-t-il quelque chose dans la nature des garçons, nature déchue ou autre, qui résiste à la soumission quotidienne aux femmes pour toutes les choses, petites et grandes, lorsqu’ils savent que ces femmes trouvent que leur masculinité est un irritant. Et peut-être y a-t-il des garçons, un bon nombre en fait, qui ne sont tout simplement pas équipés pour apprendre bien des femmes, une fois passé un certain âge.
Je ne suis pas en train de parler de la relation d’une mère avec ses fils. Mais je parle d’un besoin que toutes les cultures ont reconnu. D’une manière générale, s’il n’y a que les hommes qui peuvent transformer les garçons en hommes, et si l’éducation d’un garçon a irréductiblement pour objet qu’il devienne un homme, alors on peut s’attendre que certains garçons s’épanouissent vraiment lorsqu’ils seront enseignés par des hommes. Ce sera comme prendre une plante qui n’aime pas les sols bien drainés et la planter près d’un étang, ou comme permettre à un animal sauvage d’être lui-même en toute liberté. Cela ne signifie pas nécessairement quelque chose de mal concernant les sols sablonneux ou les zoos.
Curieusement, c’est dans la mesure où une femme aime les hommes et leur masculinité, qu’elle sera exactement le genre de femme qui enseignera très bien aux garçons. Et une telle femme est aussi exactement le genre de personne qui préfèrera que ses garçons soient enseignés par des hommes et pas par ses consœurs. Elle comprendra également que ce besoin n’est pas quelque chose que l’on peut simplement souhaiter écarter, ni gommer, par la propagande politique.
Les gens qui disent que les garçons doivent apprendre à être dirigés par leurs sœurs ne comprennent ni les garçons, ni ce qu’est le leadership. On n’apprend pas à être dirigé, pas plus qu’on apprend à tomber amoureux, ou à jouir du grand air et des grands espaces. L’initiative appartient au dirigeant, qui doit inspirer le plaisir de le suivre, et ceux qui le suivent partagent sa vision et son action.
Si cette inspiration manque, la faute en revient à celui qui veut diriger, et pas à ceux dont les cœurs et les esprits n’ont pas été touchés. Je parle en tant que personne plutôt consciente de son incapacité à être jamais à la tête d’un mouvement politique.
Pour les chrétiens, il y a une conséquence supplémentaire. Notre Seigneur nous a enseigné que le premier sera le dernier et le dernier, premier. Et que celui qui veut être grand dans le royaume des cieux doit être l’esclave des autres. « Ne soyez pas comme les Gentils, dit Jésus, que leurs dirigeants dominent et qu’ils appellent leurs bienfaiteurs. »
La direction chrétienne est service, ce qui ne peut signifier autre chose que : le dirigeant se donne lui-même pour conduire ceux qu’il dirige à de grandes choses. Sa direction est pour leur bien : ils sont ce pourquoi il dirige, tout comme n’importe quel père convenable sera heureux de voir son fils devenir grand et fort, et au cœur pur.
Il en découle qu’une femme qui va diriger des garçons doit en quelque sorte voir en eux les futurs pères, les dirigeants d’autres hommes ; et cela implique pour elle quelques difficultés. Elle veut élever des fils pour en faire des hommes qui protègeront les femmes et qui n’utiliseront pas l’avantage considérable de leur force ni de leur tolérance à l’agression et au danger, pour mettre les femmes dans des situations à risques.
Mais elle ne peut pas inspirer à des garçons les nobles fonctions de protecteur et de fournisseur tout en leur assurant qu’ils ne sont pas différents de leurs sœurs, ou en leur rappelant qu’ils leur sont inférieurs dans leurs niveaux respectifs (parce que les garçons trouvent qu’être assis à l’école est presque insupportable, ou parce que leurs cerveaux ne fonctionnent pas de la manière que leurs professeurs trouvent confortable, ou parce que les matières qu’ils aiment étudier, comme l’histoire militaire, ont été éliminées du cursus). Ce doit être pour une de ces raisons, ou quelque autre similaire, parce qu’il est un fait évident qu’ils ne sont pas moins intelligents que les filles.
On ne peut pas tout avoir conforme à ses propres désirs. Je peux souhaiter que les êtres humains ne soient pas enclins au vice, de telle façon que, si on leur donne licence illimitée concernant le sexe (ou l’argent), ils vont apprendre de manière magique à en faire bon usage, et que nous vivrons tous au Pays des Fées, nourris de boules de gomme et de gâteaux à la vanille. Mais cela n’arrivera pas.
Voici les faits. Les garçons doivent être éduqués, et de manière à en faire de vrais chrétiens. Ce sont là des nécessités absolues. Elles n’admettent pas de compromis. Rien de ce que nous faisons ne parvient au succès complet. Mais nous pouvons faire beaucoup mieux que ce que nous faisons à présent. Il est temps de reconstruire.
— – Anthony Esolen est conférencier, traducteur et écrivain. Ces derniers livres sont Reflections on the Christian Life: How Our Story Is God’s Story (« Réflexions sur la vie chrétienne : notre histoire est l’histoire de Dieu ») et Ten Ways to Destroy the Imagination of Your Child (« Dix moyens de détruire l’imagination de nos enfants »). Il enseigne à Providence College (Rhode Island).
Illustration : Champions : 1936 Source : https://www.thecatholicthing.org/2016/05/21/remember-the-boys/
— – Anthony Esolen est conférencier, traducteur et écrivain. Ces derniers livres sont Reflections on the Christian Life: How Our Story Is God’s Story (« Réflexions sur la vie chrétienne : notre histoire est l’histoire de Dieu ») et Ten Ways to Destroy the Imagination of Your Child (« Dix moyens de détruire l’imagination de nos enfants »). Il enseigne à Providence College (Rhode Island).
Illustration : Champions : 1936 Source : https://www.thecatholicthing.org/2016/05/21/remember-the-boys/
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