Dans le Symbole des Apôtres, confession de foi chrétienne antérieure au symbole de Nicée – Tertullien le cite quasiment en entier vers 200 –, il est dit qu’après sa mort, et avant sa résurrection, Jésus « descendit aux enfers ». Pour quoi faire ? La réponse est très simple : pour mener à bien jusqu’au bout son opération de sauvetage de l’humanité.
On se rappelle que certains pharisiens avaient reproché à Jésus de guérir des malades le jour du shabbat (Mc 3, 1-6). Jésus avait répondu, conformément du reste à l’opinion la mieux établie chez les rabbis de l’époque, qu’il était parfaitement permis, selon l’esprit de la Loi, de rompre le repos du shabbat pour sauver un homme ou une bête tombés au fond d’un puits. À plus forte raison, le jour du dernier Shabbat – le jour du Samedi saint –, alors que les disciples étaient frappés de stupeur et que planait sur eux l’aile noire du néant, Jésus-Christ est descendu hardiment dans le cul-de-basse-fosse de la mort, pour aller chercher les âmes des Justes. « Car, dit saint Pierre, il est allé prêcher aux esprits en prison. […] L’Évangile a été aussi annoncé aux morts, afin qu’ils vivent selon Dieu » (1 P 3, 18-19 et 4, 6).
Pour bien comprendre la signification de cette descente, il convient de préciser le sens du mot « enfers » et d’examiner les motifs de cette expédition. Les « enfers », ici, ne doivent pas être confondus avec l’Enfer, puisqu’ils désignent simplement le monde des morts en général, que les Juifs nommaient le « schéol ». Il ne s’agit donc pas de l’Enfer au sens eschatologique, c’est-à-dire du lieu des damnés. Ces derniers – s’il y en a – Jésus-Christ n’est pas allé les voir, pour la simple et bonne raison qu’ils se sont rendus, par eux-mêmes, inaccessibles au pardon.
L’Enfer est un état de l’âme
De surcroît, nous devons nous défier de toute représentation matérialisante de ces réalités spirituelles : l’Enfer, surtout quand il s’agit des âmes séparées de leur corps, n’est pas et ne peut pas être un lieu. C’est un état de l’âme, l’état des âmes recroquevillées volontairement sur elles-mêmes et refusant l’amour de toutes leurs forces. Jésus ne saurait s’y frayer un passage, non qu’il ne veuille le faire, mais parce qu’il est logiquement impossible – même à Dieu – de contraindre une liberté à vouloir le contraire de ce qu’elle veut.
Pour se représenter correctement la descente du Christ aux enfers, il faut donc y voir la libération intérieure, par un grand souffle de grâce, de toutes les âmes repentantes qui aspiraient à la lumière – et dont les Patriarches sont les figures symboliques.
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