Sur les deux rives de l’Atlantique, l’affaire Weinstein, comme un détonateur, a déclenché une vague de néo-puritanisme sans précédent, un demi-siècle après le raz-de-marée laxiste et sexualiste de Mai 68 et des « Sixties ».
Phénomène très particulier, ce néo-puritanisme virulent au style anglo-saxon se manifeste par une vague presque mimétique de dénonciations à l’encontre de la gent masculine : dans la foulée de la campagne hâtive « Balance ton porc », les accusations de viols ou de harcèlement sexuel se sont multipliées à un rythme effréné sur la scène médiatique, en prenant pour cibles des hommes politiques ou des personnalités masculines du « show-business ».
Ceci à tort ou à raison sur le plan des faits, mais en oubliant qu’une plainte et une accusation relèvent de la Justice, et non pas de médias avides de sensations, sinon de lynchages psychologiques au déclenchement aveugle …
La question juridique de la charge de la preuve se trouve ainsi escamotée d’une façon dangereuse pour l’équilibre et même pour la paix de l’ensemble de la société. Cela même si on comprend tout à fait le souci légitime de rétablir le respect pour les femmes trop souvent offensées, malmenées ou agressées.
En outre, ce néo-puritanisme se conjugue curieusement avec un ultra-féminisme persistant qui en fait une campagne de moralisation à sens unique : d’un côté, on somme les hommes, souvent à juste titre, de renoncer à des attitudes envahissantes, abusives, irrespectueuses ou même gravement répréhensibles ; mais de l’autre, dans ces objurgations, on paraît oublier de souhaiter plus de discrétion, de retenue, voire de pudeur aussi de la part des femmes : soit dit sans pudibonderie, ce discours trop unilatéral est tenu dans un contexte où certaines modes vestimentaires féminines, des images publicitaires racoleuses, certains spectacles, et les comportements induits demeurent provocants, avec les risques que cela peut entraîner.
Dès l’âge de l’école, on assiste à une banalisation désastreuse de l’irrespect et de l’obscénité, jusqu’à la violence entre garçons et filles, sur fond d’accès précoce à la pornographie via Internet, racine possible mais peu dénoncée de bien des drames.
Même si elle peut s’expliquer par des craintes légitimes, on ne peut que déplorer la brusque montée d’une délation électronique tous azimuts : en résulte un déballage massif de litiges privés, justifiés ou non, sur la nouvelle place publique des « réseaux sociaux ». Une ambiance délétère de règlements de comptes en découle : le risque est alors grand de voir la vie en société détruite dans un climat passionnel, au lieu d’être assainie avec sang-froid… Après la lutte des classes, serait-ce l’heure d’une absurde lutte des sexes ?