De Jean Vanier, je ne puis dire plus que les innombrables témoignages sur sa personne, sa foi inébranlable, son action inlassable pour les plus pauvres des pauvres, les handicapés mentaux. Pour le comprendre vraiment, il fallait le rencontrer chez lui à Trosly-Breuil dans l’Oise, au milieu de ceux avec qui il vivait habituellement. Il vous mettait tout de suite au diapason, car invité extérieur, vous étiez immédiatement introduits dans la communauté de l’Arche, partageant les repas aux côtés des personnes accueillis ici pour leur handicap, à l’égal des autres, qui étaient là pour leur venir en aide. C’était son coup de génie. Coup de génie du cœur. Faire sortir de leur ghetto tous ceux et toutes celles qui jusqu’alors étaient relégués dans des asiles où trop souvent leur dignité n’était pas reconnue.
C’est ce coup de génie du cœur qui lui permit, avec l’admirable Marie-Hélène Mathieu, de conduire pour la première fois à Lourdes le pèlerinage de Foi et Lumière en 1971. C’était une première, un véritable coup d’audace, inimaginable pour la mentalité antérieure qui en aurait été affolée. Je me souviens du cardinal Lustiger donnant en exemple cet authentique miracle de la charité. Non seulement les personnes handicapées étaient invitées à un grand rassemblement de fête et de joie, mais on prenait aussi en compte leur personnalité spirituelle, dans une expérience de silence et de prière. Oui vraiment, à l’Arche et à Foi et Lumière, chacun était aimé et respecté.
Jean Vanier n’avait aucune attirance pour les honneurs de ce monde. Pourtant, il acceptait les décorations officielles, non pour sa gloire à lui, mais parce que c’était l’occasion de promouvoir sa cause et de mettre en valeur ses amis, introduits dans les palais officiels. C’est ainsi que le 2 décembre 2016, Manuel Valls encore Premier ministre lui avait remis le grade de commandeur de la légion d’honneur. On n’avait jamais vu ça à l’Hôtel Matignon, un tel climat de chaleur et de cordialité, avec tous ces invités inhabituels congratulant un Premier ministre très ému. Une jeune femme trisomique ne l’avait-elle pas embrassé en lui disant : « Je voulais te remercier pour le truc que tu as fait pour Jean. » Oui, Jean qui avait invoqué sur Manuel Valls la bénédiction divine et qui nous a quittés, en nous laissant un énorme héritage, celui qui tient dans la tendresse de Dieu pour nos frères handicapés.
Chronique diffusée sur radio Notre-Dame le 8 mai 2019.
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