LE TEMPS DE JÉRÉMIE - France Catholique
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Funérailles catholiques : un temps de conversion
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LE TEMPS DE JÉRÉMIE

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Depuis le voyage de Mme Thatcher à Moscou, sa longue rencontre avec Sakharov1 et d’autres personnalités de l’opposition, et après avoir lu ses propres commentaires de ces événements, ainsi que ceux de son opposition, il semble que l’on peut croire à la bonne volonté de M. Gorbatchev et à sa sincérité2. Il semble bel et bien que, miraculeusement, un homme ait réussi à grimper tous les échelons. du PCUS, à occuper un poste éminent dans l’appareil policier le plus inhumain de l’histoire, à manœuvrer tout cela pour parvenir à la première place, et à garder le désir de le faire sortir d’un état de barbarie invétérée maintenant par trois quarts de siècle de coutume. Telle est du moins ma conjecture3. S’il en est bien ainsi, et puisqu’il détient le pouvoir absolu, tous les espoirs sont donc permis ? Va-t-on bientôt l’entendre déclarer à l’Occident : « nous savons bien que vous ne nous attaquerez jamais; nous savons bien que cette course aux armements est une folie ; nous savons bien que seule la peur que nous vous avons inspirée l’a déclenchée, entretenue et aggravée ; alors, prenons ensemble la décision que le monde attend : détruisons tout cet arsenal et vouons désormais tous nos effort à des œuvres de paix » ?4 Oui, peut-on se dire, puisqu’il détient le pouvoir absolu et si vraiment son désir est qu’il en soit ainsi, qu’attend-il donc ? S’il ne l’a pas encore fait, ne serait-ce pas la preuve qu’au contraire elle n’est pas sa volonté secrète, et que ses gestes et ses paroles ne visent qu’à nous endormir ? C’est ce que répètent chaque jour la plupart des observateurs et des dirigeants occidentaux ; quand on détient le pouvoir absolu, on décide comme on veut ; or il parle beaucoup, il libère les détenus politiques les plus voyants, il va peut-être autoriser l’exode de quelques milliers de juifs, il organise même quelques scrutins libres au niveau le plus bas, mais il n’annonce aucun changement dans le système lui-même. Donc il nous trompe. Ce qui semble sans réplique. Cependant tout le problème réside dans la nature de ce pouvoir absolu qu’en effet il détient, que le Parti Communiste de l’URSS, le PCUS, détient. Les idées que je vais développer ne sont pas de mon invention. On les trouve le plus clairement exprimées dans l’œuvre de Zinoviev5, et elles semblent si paradoxales que Zinoviev, le banni, le critique impitoyable, le peintre sarcastique, amer et colossal de la société soviétique qu’il a décrite avec une géniale et même parfois lassante minutie. Zinoviev lui-même est souvent commenté avec perplexité non seulement par les « soviétiques » occidentaux, mais par certains de ses compagnons d’exil. On peut résumer d’un mot l’analyse du pouvoir soviétique par Zinoviev : ce pouvoir n’est absolu que sur les personnes ; il est pratiquement nul sur la société soviétique. La société soviétique est un état de fait vécu par près de trois cents millions de personnes; c’est un état de fait, non de droit; c’est-à-dire qu’il existe bien des lois en Union Soviétique, et que même ces lois ne sont pas plus mauvaises que bien d’autres, mais qu’il est impossible de survivre dans leur respect et qu’elles ont donc engendré un tissu étroit, serré et universel de mœurs illégales, inébranlablement installé au départ par les abominations des destructeurs de l’ordre ancien, Lénine puis Staline, renforcé encore par les abominations hitlériennes, et qui depuis le début échappe de plus en plus, et désormais échappe presque complètement au pouvoir lui-même6. Les voyageurs qui visitent l’URSS sont généralement frappés par l’expression morose, voire hostile des visages dans la foule. La plupart l’identifient à de la xénophobie. Ils y voient le résultat de l’obsédante campagne d’opinion des médias contre les « menaces » du monde extérieur, et notamment des innombrables films qui, à la TV ou au cinéma, reviennent sans cesse sur la « Guerre nationale de libération ». Ce qu’elle fut en effet, mais enfin, il y a bientôt un demi-siècle et le monde a changé. Une épreuve presqu’insupportable pour un Occidental est de traverser d’un trait l’Union Soviétique par le Transsibérien : pourquoi le moindre service, y compris le moindre de ceux auxquels vous donne droit votre billet de voyage, n’est-il obtenu qu’à force de criailleries et toujours de mauvaise grâce ? Pourquoi est-on traité comme un importun voire un ennemi et un espion ? Que signifie ce comportement toujours aigre, suspicieux, voire haineux ? L’atmosphère est à la longue si irrespirable qu’on est tout étonné et soulagé quand, ayant à l’autre bout traversé la frontière, on se trouve tout à coup plongé dans la souriante foule chinoise. La Chine de M. Teng Hsiao Ping apparaît presque comme une libération ! Cependant une observation plus attentive révèle deux faits incompréhensibles : d’abord, que les voyageurs Soviétiques ne sont pas logés à meilleure enseigne ; eux aussi doivent se disputer pour avoir une couverture ou un peu d’eau chaude. Et même ne comprenant pas ce qui se dit, on voit bien que le ton est celui de la récrimination, de l’insulte et de la colère. Et surtout, on découvre que si l’on parvient à établir des relations personnelles, le plus agressif des compagnons de voyage se met à ressembler au Russe chaleureux, généreux et amical des nouvelles de Tchékov et des récits de Tourgueniev. Le bon vieux peuple russe est toujours vivant. Mais alors, s’ils sont restés eux-mêmes pris séparément, pourquoi se montrent-ils si désagréables dans leurs relations collectives et anonymes ? Il me semble que tout est là. L’exemple du Transsibérien me revenait à l’esprit ces jours-ci à la lecture d’un texte de journal diffusé par l’agence Tass et reproduit par notre presse : il analysait les milliers de lettres de mécontentement des usagers des transports en commun et aurait pu être écrit par n’importe quel voyageur occidental. Ce que nous prenons (superficiellement) pour de la xénophobie n’est qu’un état d’esprit habituel dans la société soviétique, et dont les Soviétiques sont les premiers à souffrir. Voilà un fait avéré. Reste à le comprendre, et c’est assurément difficile. Cependant imaginons que l’aimable bistro du coin, à Paris, soit un fonctionnaire mal payé à qui un client de plus ne rapporte rien. Où est son intérêt ? Il est à avoir le moins de clients possible car la foule du bistro est fatigante, surtout ce qu’il ne vend pas est autant de gagné pour compléter son maigre salaire au marché parallèle. Lui demander d’être accueillant et serviable, c’est exiger qu’il travaille contre son intérêt, qu’il soit un Saint. L’exemple est simplifié, mais très peu. Il y a en Union Soviétique d’inévitables7 incitations matérielles au travail (remember Sakharov). Mais ces incitations ont toutes un point commun : elles viennent d’en haut, et non point du client et de l’usager8. Et le destin de ces incitations, contraire à son but espéré, est celui que nous connaissons en France partout où des primes sont distribuées d’en haut, par exemple dans tels organismes scientifiques que je ne nommerai pas. Ces primes sont, au mieux, partagées à l’ancienneté ou selon de sourcilleux critères syndicaux dont la productivité est le dernier des soucis. Et au pire, elles finissent en pots de vin et faveurs amicales, et corruptrices. Le mal dont souffre l’Union Soviétique ne lui est pas particulier. Pourquoi la Nasa dont l’infaillibilité faisait il y a vingt ans l’admiration du monde, rate-t-elle maintenant tous ses essais ? C’est qu’elle fonctionne comme une administration soviétique, la crainte en moins. Dans un système intégralement fonctionnarisé, tout marcherait bien si les hommes étaient des Saints. À défaut de Sainteté, que reste-t-il au pouvoir pour redresser sans cesse ce qui par nature tend à se dégrader ? L’usage de la peur. C’est d’un tel système que M. Gorbatchev a hérité. Nous lui demandons de faire respecter les Droits de l’homme. Va-t-il les imposer par la terreur ? Et sinon comment ? Questions inextricables9. Lui-même dit qu’il ne peut agir que par la parole. La parole peut beaucoup : « au commencement était le Verbe ». Mais c’était le Verbe divin. Nous autres pauvres hommes ne pouvons que prier la parole divine d’inspirer la nôtre, fut-elle celle d’un athée. L’histoire a parfois vu cela. Elle a même vu le Fléau de Dieu accomplir ses desseins. Peut-être en sommes-nous à Jérémie, qui ne fut pas entendu. Et s’il l’avait été ? Aimé MICHEL Chronique n° 441 parue dans France Catholique – N° 2115 – 24 juillet 1987 Capture_d_e_cran_2014-11-10_a_12-28-10.png
Notes de Jean-Pierre ROSPARS du 31 juillet 2017

 

  1. Sur Andrei Sakharov (1921-1989), physicien éminent, père de la bombe H soviétique, militant anti-nucléaire et dissident, voir la note 2 de la chronique n° 433. En 1968, il publie une lettre aux dirigeants soviétiques « Sur le progrès, la liberté et la coexistence pacifique » où il plaide pour la démocratisation de la vie publique, l’abolition de la censure, la convergence de l’économie socialiste des pays de l’Est et du libéralisme politique de l’Ouest en vue d’une fin de la guerre froide. Sakharov milite pour le même genre de réformes qu’espérait le Printemps de Prague et que les chars du Pacte de Varsovie venaient d’interdire. Cela ne plait guère en haut lieu mais son statut le rend intouchable. En 1970, Sakharov et deux autres dissidents, l’historien marxiste Roy Medvedev et le physicien Valentin Tourchine, publient une autre lettre où ils montrent que les retards technologiques et économiques de l’URSS sont dus à l’absence de liberté intellectuelle et au découragement de toute création et innovation. En 1980, il critique l’invasion en Afghanistan. C’est la critique de trop : cette fois on l’envoie à Gorki, faute de pouvoir l’exiler à l’étranger, comme Soljenitsyne, sans doute parce qu’il en sait trop sur les secrets militaires. En décembre 1986, Gorbatchev fait installer le téléphone dans la maison de Sakharov à Gorki et lui téléphone en personne pour l’inviter à revenir à Moscou, envoyant ainsi au monde un signal clair de sa volonté réformatrice. Par la suite, l’alliance du dissident avec le maître du Kremlin reste surtout tactique. Se rendait-il compte que les réformes qu’il proposait auraient été destructrices du système soviétique ? En décembre 1989, lors d’un Congrès des députés du peuple, devant les caméras de télévision, Sakharov a un échange orageux avec Gorbatchev dont le pouvoir est menacé. Il meurt subitement quarante-huit heures plus tard.
  2. C’est la quatrième chronique sur les neuf publiées en six mois, de février à juillet 1987, où Aimé Michel analyse la situation d’une URSS sur laquelle Mikhaïl Gorbatchev semble vouloir faire souffler un vent de réforme après la longue « glaciation » brejnévienne. C’était il y a juste trente ans. Aimé Michel voit bien que la bonne volonté de Gorbatchev, qu’il met de moins en moins en doute, n’est pas suffisante, car l’URSS est un monstre ingouvernable et irréformable. Qu’on imagine, écrit-il, « une administration unique s’étendant de la frontière allemande à l’Océan Pacifique et au Pôle, détentrice des épiceries, des trains, des cafés, de la Police secrète, de la justice, des champs de carottes, des Postes, des mines (notamment de sel), des hôpitaux (notamment psychiatriques), de la presse. Détentrice de tout, et tellement submergée de paperasses contradictoires depuis 70 ans que plus personne en ce monde n’est plus capable d’y comprendre goutte : car telle est l’URSS. » (n° 433, Le grand cadavre somnambule – Faut-il aider M. Gorbatchev ? 27 février 1987). La société soviétique est irréformable parce ce que « tout ce qui s’y passe étant illégal, aucune loi, décision, décret, arrêté ou oukase n’y peut rien changer » (n° 435, Le Taxi et le Commissaire – Le camarade Gorbatchev serait-il fou ? 20 mars). Il semble exclu que Gorbatchev puisse réformer une telle société, « illégale, violente, autostabilisée par la police et la terreur (…) puisqu’il n’a de moyen d’action que l’appareil répressif créateur de délinquance, cercle vicieux. » (n° 436, Le Verbe et le Plan – Les lois de l’économie et l’anticapitalisme, 27 mars). D’ailleurs « l’État soviétique s’est déjà lui-même détruit un nombre indéterminé de fois, chaque nouveau conquérant du pouvoir crachant sur le précédent, sans changement aucun » (n° 439, Vertus d’une société délinquante – L’indestructibilité de l’État soviétique et le troublant M. Gorbatchev, 22 mai).
  3. Au regard des historiens, l’arrivée au pouvoir d’un réformateur tel que Gorbatchev est moins « miraculeux » qu’il n’y paraît à première vue. L’opinion de l’historien Martin Malia, professeur à l’université de Californie (Berkeley), est instructive sur ce point : « il y a tout lieu de penser que Gorbatchev, même dans sa témérité, était un pur produit du système, plus doué que la moyenne des hauts dirigeants à coup sûr, mais parfaitement soviétique quand même. Quant à l’idée qu’un totalitarisme serait incapable de mettre en avant des personnalités dynamiques, elle mérite aussi d’être reconsidérée. Ce n’était pas en transformant ses dirigeants en automates que le système fonctionnait, mais plutôt en imposant des bornes structurelles à leur horizon mental (…). S’il était arrivé au sommet, ce n’était pas par raccroc, mais parce que l’oligarchie en place avait eu un réflexe d’auto-salvation pour elle et pour le système. L’apparition d’une telle dynamo au sortir de l’immobilisme brejnévien n’était pas plus miraculeuse que celle de Staline naissant du Politburo de Lénine ou celle de Khrouchtchev sortant du Praesidium de Staline. » (La tragédie soviétique. Histoire du socialisme en Russie 1917-1991, trad. J.-P. Bardos, coll. Points, Seuil, Paris, 1995, p. 508).
  4. La course aux armements avait atteint un point culminant sous Brejnev et Andropov : il s’agissait pour l’URSS d’être au moins à parité avec les États-Unis en nombre de missiles, de têtes nucléaires, de sous-marins, etc. Elle y parvint, mais à un prix exorbitant pour sa population. « Dans les années Brejnev, la CIA estimait que les dépenses soviétiques en matière d’armement absorbaient quelque 15 % du PNB, alors qu’aux États-Unis, la moyenne de ces années-là tournait autour de 5 %. » (M. Malia, op. cit., p. 466). En fait, selon les déclarations d’Édouard Chevardnadze, alors ministre des Affaires étrangères, en 1990, elles étaient plutôt de l’ordre du quart du PNB, chiffre proprement écrasant (faute d’une comptabilité nationale fiable, ce n’était qu’une estimation, les dirigeants ignoraient le chiffre exact). Cet incontestable succès technique dépassait les capacités réelles du pays. Gorbatchev le comprit et réorienta sa politique étrangère en vue de mettre fin à cette course aux armements qui ruinait le pays.
  5. Aimé Michel voyait en Zinoviev « le plus formidable écrivain de ce temps » (n° 396, L’impossible regard froid – Dans le coupe-gorge : des Falachas à Zinoviev en passant par l’IDS, 27.06.2016).
  6. L’impossibilité de vivre dans la légalité est bien illustré par le marché noir. Ce marché parallèle remonte au début de l’histoire soviétique et lui seul a permis de nourrir la population sous Lénine (guerre civile) puis Staline (en dépit de sa répression). Sous Khrouchtchev « le travail au noir, le vol de produits dans les usines, les détournements de fonds et la “spéculation” prospéraient, tout comme les “parasites”, ces gens qui n’avaient pas d’emploi déclaré et ne pouvaient donc vivre que de ces pratiques » (M. Malia, op. cit., p. 462). Sous Brejnev, l’économie parallèle se généralise et tente de suppléer en tous domaines aux biens et services que l’économie officielle ne parvient pas à fournir. Les entreprises d’État elles-mêmes y ont recours. Des mafias se créent ; elles entrent en symbiose avec la hiérarchie du Parti, laquelle offre sa protection politique en échange de produits et services. Dans certaines républiques du Sud comme la Géorgie, le Parti devient même la mafia. « La logique des comportements délinquants tenait à la nature même de la planification. L’expérimentation soviétique, qui fêtait son cinquantième anniversaire sous Brejnev, avait désormais démontré qu’il était impossible de supprimer totalement le marché. (…) L’expérience avait également démontré qu’il était possible de laisser le marché opérer dans la clandestinité, et donc d’en faire une activité délinquante, tant du point de vue de la loi que du comportement social. (…) [C]haque citoyen était un délinquant à un titre ou à un autre, car chacun avait besoin pour survivre d’avoir son petit négoce ou son petit racket. (…) Il n’était pas vrai, comme le régime le soutenait, que cette économie clandestine fût le produit de certains défauts ou abus qui pourraient être corrigés par une meilleure politique ou un surcroit de discipline : cette économie souterraine était la conséquence inévitable d’un monopole économique artificiel de l’État, et le moyen pour ce monopole de se perpétuer » (Malia, op. cit. p. 464-465). Cette description ne donne cependant qu’une image imparfaite de l’état de l’URSS à l’époque quand on sait que la moitié des écoles et le tiers des hôpitaux n’ont ni chauffage central ni eau courante, que les infrastructures (routes, ponts, chemins de fer, canalisations, chaufferies, usines, bâtiments…) se délabrent dans une sorte d’apathie générale, que l’alcoolisme fait des ravages, que l’espérance de vie diminue… L’idéologie « scientifique » du régime, qui n’était fondée sur aucune observation digne de ce nom, mais se perpétuait dans un refus persistant des réalités, aboutissait à un échec économique patent et, sans doute plus gravement, à une profonde démoralisation des esprits. Telle était la situation que Gorbatchev entendait « réformer » mais sans trop savoir comment… En libérant la parole et la presse, il conduisit néanmoins à rendre publiques (c’était le sens de sa glasnost), mais non à corriger, ces tares congénitales jusque-là masquées par l’hypocrisie, le mensonge, les statistiques truquées et les promesses d’un « avenir radieux ».
  7. Le texte imprimé est « inoubliables incitations au travail » mais c’est sans doute une transcription fautive du manuscrit. J’ai corrigé en « inévitables » mais peut-être faut-il lire « indiscutables » ou autre chose ?
  8. « Venu d’en haut » est le mot clé ici. Dans le régime communiste tout vient d’en haut : « La nature des institutions soviétiques fait que le changement ne peut y venir que d’en haut » (Martin Malia, op. cit., p. 504). C’est pourquoi la révolution de Gorbatchev, sa perestroïka (restructuration) était imposée d’en haut. Paradoxalement, Gorbatchev voulait utiliser son pouvoir de secrétaire général du Parti communiste de l’Union soviétique pour libérer la société de ce même Parti. Il avait d’illustres précédents : Staline s’était appuyé sur le NKVD pour remplacer l’ancien Parti par un nouveau, Khrouchtchev avait commencé sa déstalinisation par un coup de force contre la majorité du Politburo et Mao lui-même, qui avait perdu le contrôle du Parti, avait lancé contre lui ses gardes rouges et l’armée.
  9. Imposer les Droits de l’Homme par la terreur ! Aimé Michel souligne ici par un humour un peu grinçant les « inextricables » contradictions dans lequel ne peut que s’enfoncer un réformateur du système communiste. Jean-François Revel a résumé cette contradiction par une formule : « La seule manière d’améliorer le socialisme, c’est de s’en débarrasser » (« De la réversibilité du communisme », Politique internationale, n° 41, 1988). La Chine actuelle est peut être une réfutation de ce « théorème » mais ce n’est pas encore sûr (voir note 8 de la chronique n° 321, Le chasseur et son chien – Quelques idées non politiques sur le problème chinois).