Qu’apprend-on du travail de la vigne ?
Un moine du Barroux : Il est une école du réel. Se retrouver les mains dans le cambouis, les pieds sur la terre, dans la boue, avec toutes les difficultés – car c’est vrai que c’est dur –, c’est magnifique car cela nous remet au contact de ce Dieu créateur. Gustave Thibon rappelait que si la terre pouvait être dure avec lui, elle lui donnait toujours assez. Elle était une mère pour lui. Malgré les épreuves, nous savons très bien que le Bon Dieu nous comble d’année en année. Et le fait de travailler soi-même la terre et d’expérimenter les difficultés permet de reconnaître le cadeau inouï de chaque bouteille ou de chaque morceau de pain. Actuellement, je vois sur les vignes qu’il y a de quoi faire non pas une grande, mais une jolie récolte, bien qu’il soit encore trop tôt. Il faut donc patienter ! Le travail de la vigne est une merveilleuse école d’abandon et d’admiration.
Que révèle le plaisir que nous avons à boire du vin ?
Le vin est un signe très fort que Dieu donne à l’humanité de sa volonté de la béatifier, de la rendre heureuse. Benoît XVI disait dans une magnifique homélie que « tandis que le pain renvoie à l’aspect quotidien, le vin exprime le caractère exquis de la Création : la fête de joie que Dieu veut nous offrir ». Le vin est ce plus, ce cadeau inouï que Dieu donne : il est le signe de la gratuité, de la bienveillance que Dieu donne pour que les hommes soient heureux entre eux.
Vos vins portent le nom de « Caritatis », la charité en latin. Pourquoi ce choix ?
Nous avons pris conscience qu’il fallait soutenir les vignerons de notre territoire, qui partagent avec nous ce terroir de montagne fait de multiples parcelles enchevêtrées les unes dans les autres et qui sculptent le paysage de notre Provence. Nous avons décidé depuis 2016 de proposer à ces vignerons de faire ensemble des grands vins sous la bannière Caritatis. C’est ainsi que nos vins sont des ambassadeurs de la charité.
Ce travail du vin était non seulement vecteur de justice sociale, mais quelque chose de plus grand était en train de nous dépasser et de nous relier, c’est-à-dire la charité. Nous avions quelque chose de plus à donner que le vin, ou quelque chose dont le vin pouvait être le signe, qui pouvait déborder du produit lui-même pour rejoindre les cœurs.
Le vin est indissociable du Saint Sacrifice de la messe. Y a-t-il quelque chose de sacré dans les vendanges que vous vivez ces jours-ci ?
Avant même la notion de Saint Sacrifice, il y a déjà une notion de sacré imprimée dans la Création et dans le travail, puisque l’homme fait remonter vers Dieu sa louange à travers son travail. Ce qui est certain, c’est que les vendanges nous emmènent dans un lieu qui fait revêtir au travail un caractère très particulier, puisque nous savons que le vin a servi au Seigneur pour exprimer sa charité absolue. Ainsi, chaque vendange nous ouvre à cette dimension-là de manière assez immédiate, et nous relie de manière très claire à une vision théologique de la Création et de la rédemption.
Retrouvez l’intégralité de l’entretien et du Grand Angle consacré au vin dans le magazine.