« À Noël, il faut être à genoux pour adorer » - France Catholique
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Marie dans le plan de Dieu
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« À Noël, il faut être à genoux
pour adorer »

À l’approche de Noël, signe d’espérance pour les chrétiens du monde entier, le cardinal Robert Sarah, préfet émérite chargé du Culte divin au Vatican, ouvre dans son dernier livre Pour l’éternité (Fayard), de nombreuses pistes pour redonner au sacerdoce son rayonnement essentiel.
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Quels souvenirs conservez-vous des Noëls de votre enfance en Afrique ?

Cardinal Robert Sarah : À la différence de l’Europe où l’accent est mis désormais sur les cadeaux et la consommation, en Afrique c’est la dimension religieuse du mystère qui s’impose. Tout petit, j’ai été éduqué dans cette perspective. Parfois on m’offrait un habit neuf, mais ce n’était pas ça le plus important. Le plus important c’était la participation à la messe. J’étais d’autant plus content d’y participer que j’étais servant. C’est cette dimension de la proximité de Dieu envers l’homme qui m’a marqué, plus que la fête familiale. On recevait à la paroisse beaucoup de gens, qui faisaient des kilomètres pour venir, afin de partager notre repas.

Quelle est l’espérance de Noël dans un contexte sombre, à vues humaines, pour les catholiques en France ?

Quand Dieu a décidé d’envoyer son Fils pour sauver le monde, la situation n’était pas brillante. C’est même pour cette raison qu’il a envoyé Jésus partager notre vie humaine, nos souffrances, nos espérances : il est venu humblement parce que Dieu est humble et qu’il nous aime. L’amour et l’humilité, c’est la même chose. La situation que nous vivons aujourd’hui ressemble à celle de Noël, quand le fils de Dieu est venu sur terre. Jésus est vraiment l’espérance du monde parce que seul et unique Sauveur. Il est la lumière du monde, le soleil vivant. Le soleil donne vie mais fait également croître l’humanité, les plantes.

L’espérance que nous apporte Noël, c’est que Dieu nous aime, qu’il ne nous oublie pas malgré nos révoltes et notre éloignement. Notre façon de l’accueillir, c’est d’ouvrir nos cœurs et ne pas le laisser dehors comme à Bethléem, où il n’y avait pas de place ni pour Marie, ni pour Joseph, ni pour lui. Nous ne devons pas imiter cette fermeture, mais nous ouvrir humblement comme les mages : ces grands rois avaient toute la science, et ils se sont humiliés devant le petit Jésus. Ils sont venus offrir leurs présents, ils se sont agenouillés. L’espérance de l’homme ne se vérifiera que s’il se met à genoux devant Dieu pour l’adorer.

Dans les situations difficiles, pourquoi avons-nous tendance à nous raccrocher à des espoirs trop humains ?

Dieu a disparu dans nos sociétés. Dieu ne compte plus. On n’a plus besoin de lui. Alors l’homme se referme sur lui-même, par sa technique et par sa science. Et malheureusement l’Église semble suivre cette direction. On ne parle que de choses horizontales, sociales. Naturellement, dans cette direction, je ne pense pas que l’on retrouvera Dieu. La seule entité qui pourrait réorienter l’humanité vers Dieu, c’est l’Église.

Il faut qu’elle retrouve sa mission première qui est d’évangéliser, de dire que Dieu nous aime et qu’il est parmi nous. Sans omettre, bien sûr, les questions humaines, politiques, celles de tous les jours, mais en orientant toujours l’humanité vers Dieu. C’est ainsi que l’Église pourra attirer le monde : en restant fidèle à sa mission propre.

Pourquoi l’Église donne-t-elle parfois l’impression d’avoir oublié la manière de s’adresser aux hommes pour leur dire cette espérance ?

Peut-être l’Église a-t-elle parfois la tentation de se couper de sa tradition. L’Église annonce Jésus-Christ depuis les apôtres. Si on se coupe de cette tradition, on invente des choses nouvelles. L’Église doit retrouver son héritage qui est très riche : une accumulation de richesses sur 2 000 ans ! On ne peut pas faire comme si cela ne représentait rien.

Retrouver sa mission première consiste à renouer notre lien avec Jésus, les apôtres, les Pères de l’Église, etc. C’est une condition indispensable pour poursuivre sa mission qui est de baptiser, d’annoncer l’Évangile et de le mettre en pratique. C’est pourquoi le premier mot de Jésus dans le premier chapitre de l’Évangile selon saint Marc est : « Convertissez-vous et croyez en l’Évangile. »

En abandonnant sa tradition, l’Église espère faire venir des gens en son sein. C’est une erreur, car ce n’est pas en attiédissant la radicalité de l’Évangile qu’ils vont venir vers nous. Au contraire, ils veulent quelque chose de fort, de nouveau, qui les engage.

Retrouvez l’intégralité de l’entretien dans le magazine.