Bien sûr, les Chrétiens se disent de la religion de l’incarnation. Bien sûr, pour eux, le Verbe a habité parmi nous, et son Royaume est à construire dès ici-bas. Et Bernanos confiait combien il était attaché au « doux royaume de la Terre ». Mais les Écritures leur disent aussi qu’ils n’ont pas, en ce monde, de cité permanente et qu’ils sont, d’ores et déjà, citoyens du Ciel. C’est une affirmation encore un peu plus incongrue aujourd’hui qu’hier. Pourtant, c’est la bonne nouvelle du christianisme. Les premiers documents, dans l’ordre chronologique, du Nouveau Testament, sont les deux lettres de saint Paul aux Thessaloniciens. Or de quoi parle l’apôtre en priorité aux tout premiers chrétiens ? « Nous ne voulons pas, frères, que vous soyez ignorants au sujet des morts ; il ne faut pas que vous vous désoliez comme les autres, qui n’ont pas d’espérance. Puisque, nous le croyons, Jésus est mort puis est ressuscité, de même, ceux qui se sont endormis en Jésus, Dieu les amènera avec Lui. »
C’est une certitude solidaire de la foi qui habite les Chrétiens. Les enfants qui sont nés au monde sont promis à l’éternité. Et lorsque la mort survient, la vie n’est pas abolie, elle est transformée, si bien que, pour les mystiques, il n’y a pas de doute : la mort est une nouvelle naissance, celle qui introduit à la vraie vie. Thérèse de l’Enfant Jésus l’a dit : « Je ne meurs pas, j’entre dans la Vie ». Sœur Emmanuelle, à ce propos, nous a donné un magnifique témoignage : « La mort, disait-elle, est le plus beau jour de la vie. La fiancée y rencontre son fiancé. L’enfant y rencontre son Père ! » Dans son livre posthume, où elle livre son vrai testament spirituel, c’est le même ultime message qu’elle adresse à ses interlocuteurs : « Sois sûr que nous nous retrouverons dans l’éternité, celui qui aime ne meurt pas ! C’est un mystère incommensurable, mais je l’ai vécu et j’en ai vécu. » (1)
Qu’est-ce donc que cette grande fête de la Toussaint, sinon l’attestation de l’existence de la vie éternelle, avec tous les saints, dans l’intimité de l’Amour divin ? La béatification de Louis et Zélie Martin nous a aussi préparés à cette fête, car ce père et cette mère « plus dignes du ciel que de la terre » nous font signe pour la grande demeure vers la Vraie Vie.
Gérard LECLERC
(1) Sœur Emmanuelle, Confessions d’une religieuse, Flammarion, 414 pages, 20 €.