Tel était le thème du pèlerinage de Benoît XVI
en 2006, mais l’appel
reste d’actualité.
Cet encouragement reste nécessaire en effet pour cette Église, victorieuse de cinquante ans de persécution, mais blessée par la chute de certains de ses membres.
Le 9 mars 2006, l’Église polonaise a reconnu la collaboration de certains prêtres avec la police secrète communiste et demandé pardon pour tout le mal qu’ils ont infligé. L’Église polonaise avait décidé en effet d’enquêter sur des prêtres espions et « collabos » infiltrés en son sein pendant la période communiste. « Il faut tout simplement enquêter sur cette affaire, nous ne devrions pas craindre la vérité », avait déclaré le père Robert Necek, porte-parole de l’archidiocèse de Cracovie.
Les évêques polonais avaient alors relevé que « dans le terrible système (communiste) qui brisait les consciences humaines, certains hommes d’Église ont eux aussi failli aux attentes ». « Nous le regrettons et demandons pardon, surtout auprès de tous ceux qui ont souffert à cause d’eux », pouvait-on lire dans un texte publié par les évêques.
Dans leur déclaration, les prélats assurent que « l’Église ne fuit pas les questions qui portent sur les problèmes les plus pénibles de son histoire », mais « elle s’oppose à la simplification du problème ».
Selon des estimations de l’Institut de la mémoire nationale (IPN), une institution chargée d’enquêter sur les crimes nazis et communistes et qui dispose des archives de l’ancienne police secrète communiste, plus de 10 % des prêtres polonais ont collaboré avec les services secrets communistes. Encore faut-il s’entendre sur la pertinence de toutes les archives, où la présence de noms peut recouvrir plusieurs réalités.
Mgr Dziwisz, l’archevêque de Cracovie, avait ordonné la création d’une commission. Pour lui, la période communiste a été « un temps de persécution pour l’Église, souvent sanglante et brutale ». Il s’agit par cette étude, notamment, de mettre en valeur « l’attitude héroïque » des prêtres sous le régime communiste, avait-il argumenté en expliquant sa décision. Des historiens de l’Église ont également examiné les dossiers de la police politique.
Et on ne peut contester le très lourd tribut payé par l’Église sous la double occupation nazie et communiste. Ainsi, selon une historienne du musée d’Auschwitz, près de 500 religieux, prêtres et moines y ont été déportés, ainsi qu’une trentaine de religieuses ; près de 40 % d’entre eux y sont morts. Un rescapé du camp de concentration d’Auschwitz a témoigné qu’à leur arrivée au camp, les prêtres savaient qu’ils avaient très peu de chances de survie.
Les prêtres étaient perçus comme les représentants les plus patrio-
tiques de la société polonaise et ils ont été particulièrement visés par le plan d’extermination de l’intelligentsia polonaise.
Le père Zdzislaw Gardocki, 89 ans, qui vit aujourd’hui au monastère des Capucins de Rywalt Krolewski, a été détenu d’abord neuf mois à Auschwitz puis quatre ans à Dachau. Il ne veut pas en parler : « C’est trop difficile. Il a vécu l’enfer. Quand il est sorti de Dachau, il pesait à peine quarante kilos ; il faut le laisser tranquille », explique son supérieur. Environ 2 800 prêtres de différents pays d’Europe ont péri à Dachau. 60 % étaient polonais. Malgré le risque d’être envoyés de suite à la mort, les prisonniers se confectionnaient des chapelets avec de la mie de pain, bien que le pain manquât. Malgré l’interdiction, les prêtres célébraient des messes en cachette, confessaient ou donnaient l’extrême-onction aux mourants. Comment ne pas évoquer ici la figure de St Maximilien Kolbe ?
De ces innombrables sacrifices sont issues de très nombreuses vocations sacerdotales et religieuses, au service de l’Église aujourd’hui en Pologne, mais aussi dans le monde entier.