En cette fin d’année, la liturgie n’est pas avare de ses dons et de ses manifestations. Si l’on songe à tout ce qui s’enchaîne aux célébrations de l’Ascension et de la Pentecôte : la Trinité, la Fête-Dieu ! Les images venues de Rome par l’intermédiaire de K.T.O. nous montrent à quel point le Pape et l’Église de Rome célèbrent avec ferveur la procession du Corpus Christi, que Jean-Paul II avait rétablie, lui originaire de la Pologne toujours fidèle qui ne l’avait jamais abandonnée. Il y eut toute une période, qui coïncide d’ailleurs avec l’éclipse de la foi en Occident, où la piété eucharistique populaire fut brocardée, dévaluée à travers toute une justification historico-doctrinale qui se résumait à une sorte de purisme des origines. Les nouvelles communautés ont remis à l’honneur l’adoration du Saint-Sacrement que les jeunes des JMJ ont adoptée et intériorisée si bien que, souvent, ce sont aujourd’hui les nouvelles générations qui se trouvent en sympathie avec une manifestation de foi et de piété que leurs anciens avaient bien vite proclamée obsolète.
En ce qui concerne la Fête-Dieu elle-même, on n’insistera jamais assez sur la pertinence extrême de l’articulation des deux mots. La Fête de Dieu n’est-elle pas le sommet de toutes les célébrations et liesses populaires ? La sensibilité soixante-huitarde avait pourtant voulu rendre à l’événement festif sa centralité sociale, sa valeur d’expression communautaire. Mais c’est comme si Dieu s’était trouvé hors-jeu dans ces années-là. On prétendait l’avoir tiré de son confinement ecclésial, mais c’était pour le mieux renfermer dans des sanctuaires préservés. C’est toute l’ambiguïté de la réforme liturgique, fondée sur les meilleurs principes mais trop souvent dévoyée, au vif déplaisir d’un Père Louis Bouyer qui avait tant œuvré à son renouveau. Il faut donc retrouver le sens de ces grands déploiements de ferveurs, sans avoir peur des signes les plus expressifs pour organiser au Dieu eucharistique l’accueil qu’il mérite dans le faste des hymnes, des cantiques, des fleurs et des couleurs. Dans un de ses derniers textes, le cher Philippe Muray avait tenu à rappeler ce souvenir lumineux de son enfance. Que l’on nous rende la splendeur de la Fête-Dieu !