3109-Euthanasie : cas emblématique - France Catholique
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La justice de Dieu
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3109-Euthanasie : cas emblématique

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Il n’a pas fallu longtemps aux médias pour donner sa pleine force émotionnelle à la revendication d’une femme gravement malade de se voir administrer la mort.

C’est d’abord une image. Une image choc qui s’imprimera durablement dans la tête de millions de Français. Celle d’une femme de 52 ans, victime d’une impressionnante tumeur qui lui déforme le visage au point d’exorbiter ses yeux. Et pourtant, dès qu’elle parle, c’est la vie et la vivacité de Chantal Sébire qui prennent le dessus. Mais c’est bien la mort qu’elle demande au président de la République, comme l’avait fait Marie Humbert pour son fils. Sa maladie est incurable. Ses douleurs physiques sont mal régulées par les analgésiques. Allergique à la morphine, ex­plique-t-elle, elle refuse les sédatifs par volonté de ne pas être « mise dans un état second ». Le 20 heures de France 2 du 26 février 2008 aura donné à son cas valeur embléma­tique dans une sé­quence dont l’émotion ne peut que renforcer l’adhésion d’une immense majorité des Français à l’euthanasie légale. Chacun des trois enfants entourant la patiente soutiendrait sa revendication. Un certain malaise plane cependant quand on perçoit une dimension « altruiste » dans les mobiles de la patiente : « Mon fils et mes filles n’en peuvent plus de me voir souffrir ».

Même si Chantal Sébire ne se pose pas en militante de l’euthanasie sans condition, l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) pense avoir trouvé la nouvelle figure de proue de son combat au moment où elle rend pu­blique une campagne de pétition pour une loi en faveur de « l’aide active à mourir ».

Jean-Luc Romero annonçait dès le 26 février sa volonté de se rendre auprès de Chantal Sébire « dans les tout prochains jours » avec une délégation de l’association qu’il préside. La stratégie des tenants du suicide médicalement assisté est de promouvoir les situations les plus extrêmes afin de faire valoir l’exception, conscients que cela suffirait à ruiner la règle de l’interdit du meurtre. Or, le cas aujourd’hui médiatisé – peut-être au-delà du souhait de l’intéressée, semble-t-elle avouer – réduit presque au silence les opposants à l’eu­thanasie légale. Derrière le visage de plus en plus déformé de Chantal Sébire, on devine une volonté de fer et un grand courage. Or, cette femme a successivement perdu le goût, l’odorat et la vue. Il y a là de quoi impressionner le commun des mortels. Et, par ailleurs, elle s’exprime avec une redoutable efficacité. Contrairement au jeune Vincent Humbert dont le kinésithérapeute avait révélé qu’il souffrait de troubles du comportement causé par son traumatisme crânien, Chantal Sébire se présente comme « un patient conscient, qui exprime sa volonté avec détermination, sans être atteint par la moindre pathologie psychiatrique ».

Âgée de 12 ans, sa plus jeune fille évoque ce qui serait une contradiction de notre société : un droit au suicide sans droit à l’euthanasie. L’ADMD fait de même. Pourtant si le fait de tenter de se suicider n’entraîne plus de poursuites pénales, le suicide ne constitue pas un droit positif : aucun suicidant ne pourrait obtenir réparation en justice contre ceux qui l’auraient sauvé, et ceux qui l’auraient laissé mourir pourraient même être attaqués pour « non assistance à personne en danger ».
Chef du service de réanimation du CHU de Montpellier, le professeur Olivier Jonquet se montre prudent sur cette situation médicale tout en évoquant « son caractère dramatique » : « Il y a d’abord la question de la douleur physique à propos de laquelle il m’est difficile d’être affirmatif bien que je sois un peu surpris par ce qui est dit. La morphine n’est peut-être pas à la première place pour traiter le type de douleurs entraînées par cette tumeur. J’ose espérer qu’il y a d’autres substances qui se montreraient plus efficaces que les traitements classiques. Ensuite, il y a la souffrance mo­rale, notamment celle qui est liée à l’aspect physique de la patiente et qui, je pense, explique largement cette médiatisation. Elle me pousse à redire que la personne humaine (comme sa dignité) n’est pas réductible à son aspect phy-
sique, ni d’ailleurs à son intégrité intellectuelle. »

Or, derrière la force d’âme de Chantal Sébire, on constate la volonté de ne pas se coucher devant la maladie : « Je l’ai combattue pendant sept ans, je ne veux pas que cette tumeur ait le dernier mot » lançait-elle à l’AFP. Son médecin ex­plique son refus de se suicider en la décrivant comme une « battante qui veut terminer la tête haute » et « veut rester lucide jusqu’au bout et (…) que le corps médical l’accompagne dans sa volonté ».
Derrière un cas exceptionnel par sa gravité, on retrouve les mobiles habituels de la tentation d’euthanasie : peur de souffrir, peur de peser, peur de perdre de nouvelles capacités. En réclamant l’aide de la société pour « partir dignement », la patiente exprime, à sa façon, le désir de maîtrise qui taraude de plus en plus nos contemporains devant le scandale de la souffrance et de la mort.

Pendant que Marie Humbert fustige « le gouvernement qui bloque ce que comprennent les Français », le député Jean Leonetti, auteur de la loi fin de vie dont le fils de Chantal Sébire demande de « nuancer les termes », répond : « Le débat ne doit pas être initié ou relancé par des histoires individuelles, dans un contexte émotionnel ».