3106-Deuil anténatal - France Catholique
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Funérailles catholiques : un temps de conversion
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3106-Deuil anténatal

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Qualifié d’historique, un arrêt de la Cour de cassation reconnaît aux parents le droit de nommer, déclarer et inhumer les fœtus mort-nés. Polémique immédiate.

Une digue intenable vient d’être submergée… par des larmes. Celles de trois familles endeuillées à la suite de la perte accidentelle de fœtus, leurs bébés étant « mort-nés » après une vie intra-utérine trop brève puis traités comme des déchets hospitaliers. Destin imposé, jusqu’ici, aux fœtus pesant moins de 500 grammes ou n’ayant pas dépassé les 22 semaines de grossesse. Car la loi refusait de restituer ces petits corps à leurs parents, de leur permettre de les nommer en les inscrivant à l’état-civil et de les inhumer. Quelques années après la polémique sur les conséquences pénales des accidents involontaires provoquant la mort d’un fœtus (l’amendement Garaud avait été contré par ceux qui y voyaient une façon d’écorner le « droit à l’avortement ») le débat est revenu, plus paisiblement, au civil.
Et, cette fois, c’est un re­vire­ment de jurisprudence. Dé­couvrant qu’aucun critère n’avait été fixé par le législateur pour interdire l’inscription à l’état-civil et la restitution du corps d’un bébé mort-né, la Cour de cassation a donné droit, dans un arrêt publié le 6 février, aux parents requérants dont les fœtus pesaient de 155 à 400 grammes à leur mort et avaient entre 18 et 21 se­maines de vie intra-utérine.

Branle-bas de combat au Planning familial qui vient d’afficher joyeusement l’avortement comme la liberté par excellence, ainsi qu’à l’Association Nationale des Centres d’Interruption de Grossesse dont la vice-présidente, Chantal Birman, « s’énerve », selon Le Parisien, contre l’inscription de ces êtres à l’état-civil, en affirmant : « les femmes ne peuvent pas vivre avec de telles cimetières dans la tête ! » Du côté du Mouvement Français pour le Planning Familial (MFPF) on prédit une « usine à gaz » selon l’expression de Maïté Albagly, sa secrétaire générale qui estime qu’en pointant la souffrance de la perte d’un fœtus, « on culpabilise les femmes qui avortent ». Un avis que conteste Jean-Philippe Legros. Ce psycho­logue clinicien s’est réjoui, sur i-télé, que cesse une forme de « déni de grossesse » imposé jusqu’ici à nombre des familles qu’il accompagne à l’hôpital St-Vincent-de-Paul. C’est dans cet établissement parisien qu’est largement née la prise de conscience actuelle, par la découverte, pendant l’été 2005, d’un stock de fœtus issus de fausses-couches tardives ou d’IMG. Un anatomopathologiste surmené les avait trop longtemps oubliés.

Ceux qui accompagnent les personnes endeuillées expliquent que le déni de l’épreuve est un obstacle majeur à la consolation. Et chacun sait que l’humanité tient au res­pect du corps de ses morts. Comment répondre à ceux qui ont perdu « quelqu’un » : « ce n’était rien»? Comment nier les souf­frances personnelles et familiales in­duites par les fausses-couches tardives et même l’avortement ?

Choqués que le droit puisse reconnaître l’humanité du fœtus, les mouvements de promotion de l’avortement s’embrouillent donc dans leurs mises en garde, et le Planning familial en est réduit à brandir le spectre éculé du « retour à l’ordre moral ». Les associations de défense du droit à la vie affichent cependant une posture prudente. Fait notable, les « experts » médiatiques sont partagés : le généticien Axel Kahn dénonce un risque pour le droit à l’IVG tandis que le professeur Israël Nisand se réjouit de la décision.
Selon les commentateurs juridiques, il ne sera pas facile de transcrire dans une loi ces nouveaux droits des parents endeuillés. Jean-Paul Delvoye, médiateur de la République, es­time ainsi que le Parlement devra « définir très clairement» la notion de viabilité. Les cri­tères de l’OMS (22 semaines et au moins 500 grammes) sont désormais dépassés.
On inventera donc des justifications et des limites ar­bitraires, mais il faudra aussi dé­cider si on peut déduire de l’inscription à l’état-civil du fœ­tus des avantages sociaux liés à la naissance d’un enfant : congé parental, nombre d’annuités exigible pour une femme au moment où elle prend sa retraite… Débat législatif en perspective.