3103-Les coptes d'Égypte - France Catholique
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3103-Les coptes d’Égypte

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Le mot copte est une déformation du grec aigúptios : égyptien. Les coptes sont les descendants des anciens Égyptiens du temps des pharaons – dont ils ont conservé en partie la langue – et considèrent qu’ils sont donc les « vrais Égyptiens ». Pourtant, ils se sentent parfois étran­gers dans leur propre pays. Tout est d’ailleurs fait, à travers mille et un détails de la vie quotidienne, pour les en convaincre. Il faut dire qu’ils sont une minorité avec un handicap majeur aux yeux du reste de la population égyptienne : ils sont chrétiens !
Il est difficile d’avoir des chiffres co­­­hé­­rents sur le nombre de chrétiens en Égypte. L’Église copte orthodoxe re­vendique 17% de la population. Ses re­gistres de baptêmes recenseraient 12 mil­lions de baptisés. Le gouvernement estime qu’ils sont entre 2 et 3 %… 10% est un nombre généralement admis…

Pour désigner les coptes, certains es­timent que l’expression orthodoxes orientaux, que l’on distinguera ainsi des orthodoxes grecs serait plus appropriée. Le monastère orthodoxe de Sainte-Ca­the­rine, dans le Sinaï, est rattaché au pa­triarcat orthodoxe grec d’Alexandrie, qui est chargé de l’action missionnaire or­thodoxe grecque en Afrique…

Pour les coptes catholiques, les esti­mations varient entre 150 et 250.000 personnes.

Il existe aussi des coptes protestants, ultra-minoritaires. Ils ont eu les premières imprimeries modernes au XIXe siècle. Et c’est à eux que l’Église copte orthodoxe, inquiète de leur possible influence, a pris, avec le pape Cyrille VI, prédécesseur de Chenouda III, l’idée de l’école du dimanche, à laquelle le prodigieux renouveau spirituel de l’Église copte orthodoxe depuis les an­nées 60 doit beaucoup.

Les coptes orthodoxes sont des « or­thodoxes pré-chalcédoniens » comme les Arméniens, les Éthiopiens et les Sy­riaques. L’Église or­thodoxe égyptienne n’a en effet pas reconnu le Concile de Chalcédoine en 451 (condamnation du monophysisme). Il semblerait que la séparation fût surtout le résultat de malentendus sémantiques (on disait la même chose mais de ma­nière différente) mais plus encore de consi­dérations politiques : Alexandrie au­rait mal vécu son déclassement de second Patriarcat dans la préséance honorifique, au profit de Constantinople lors du transfert de la résidence impériale romaine sur le Bosphore au IVe siècle. On est un peu loin de l’Évangile mais les acteurs de l’Histoire ne nous ressemblent-ils pas ?

Les relations officielles entre coptes ortho­doxes et coptes catholiques sont au mieux indifférentes et au pire franchement médiocres. J’ai parlé d’étrangers : c’est la manière dont les orthodoxes regardent les catholiques. Il peut y avoir de bons contacts personnels entre les uns et les autres, y compris au niveau des évêques, mais les relations sont au point mort. Dans certaines régions d’Égypte des évêques ca­tholiques ont plus de difficultés avec les orthodoxes qu’avec les musulmans !

Et pourtant, la situation préoccupante des chrétiens en général inviterait plutôt à une réconciliation.

« Sur le papier, si on fait les comptes » déclare Mgr Antonios Aziz, évêque copte catholique de Guizeh (Pyramides), « dans 10 ans, il n’y a plus de chrétiens au Proche-Orient, Égypte com­prise ! » Mais l’évêque reste confiant : les courbes sta­tistiques ont leur pertinence mais ne sont pas prophétiques. Dieu veille sur son peuple et une bénédiction particulière repose sur l’Égypte, terre où la Sainte Famille a trouvé refuge dans sa fuite de Bethléem. Mgr Antonios cite le cas de la diaspora. Statistiquement, elle aurait dû diminuer par assimilation des deuxième et troisième générations. Or, elle reste profondément attachée à l’Égypte et s’ac­tive pour sou­tenir l’Église sur place, financièrement et po­litiquement, par lobbying dans les pays où elle est nombreuse (États-Unis, Australie, Eu­rope).

Il reste que les difficultés sont per­manentes. Pour construire ou ne serait-ce que rénover une église, il faut une autorisation, ce qui est normal, mais elle n’arrive quasiment jamais, ce qui l’est moins. En réa­lité, il faut également une autorisation pour les mos­quées mais elles sont en général cons­truites avant d’avoir l’autorisation (l’ad­mi­­nis­tra­­tion égyptienne sem­ble assez lente), en sachant très bien que de toute fa­çon, personne ne viendra démolir une mos­quée ! La différence avec les églises vient aussi du fait qu’il faut l’autorisation du gouverneur de la province pour les églises, ce qui retarde encore les choses.

Difficulté supplémentaire, lorsqu’une demande de permis de construire pour une église est déposée, il y a souvent très rapidement construction d’une mosquée le plus près possible de l’endroit prévu. La construction d’une église devient alors impossible… Pour les églises existantes, il y a toujours dans leur proximité immédiate une ou plusieurs mosquées, à tel point que l’on m’a donné une définition intéressante de mot « église » : bâtiment entouré par au moins quatre mosquées !

À l’école, les manuels d’Histoire font l’impasse sur les six premiers siècles de notre ère : on passe des pharaons à la conquête islamique, « libération » de l’occupation romaine. Dans la fonction publique, les chiffres sont éloquents : les chrétiens représentent au moins 10 % de la population égyptienne et 1,5% des fonc­tionnaires. Même si on peut conce­voir qu’une minorité ait à assumer son statut minoritaire, l’écart traduit tout de même une discrimination nette.

Viennent ensuite les violences, verbales ou physiques, de la part de musulmans qui s’en prennent à des chrétiens (l’inverse est rarissime). Des séminaristes m’ont dit qu’on leur posait parfois la question dans le métro : « quand est-ce que vous allez quitter notre pays ? »

Des incidents surviennent régulière­ment, opposant des musulmans et des coptes. En juin, quatre personnes ont été hospitalisées et trente-cinq ont été arrêtées à la suite d’une querelle entre familles musulmanes et coptes dans le village de Saft Meydoum, dans le gouvernorat de Beni Souwef, au sud du Caire. L’incident a éclaté après qu’une jeune musulmane eut été percutée par un copte circulant à vélo, les parents de la jeune femme s’étant alors rués vers la maison de la famille chrétienne pour la lapider.

Treize musulmans et coptes ont été mis en détention à la mi-juin à Alexandrie après un autre incident devant une église du quartier d’al-Dekhela. Cet épisode, qui a fait des blessés, témoigne d’un regain de tension dans ce grand port du nord de l’Égypte. Son origine est une bagarre entre un jeune copte et le fils de l’imam de la mosquée Bilal, provoquant une mêlée entre les fidèles de l’église de la Sainte-Vierge et quelques dizaines de mu­sulmans. De nom­breux véhicules de police anti-émeutes ont été déployés de­puis lors dans ce quartier où cohabitent des membres des deux communautés.
Ces incidents sont intervenus un mois après de sérieux heurts qui avaient éclaté dans le village de Bamha, à 25 km au sud du Caire, autour d’un projet de transformation d’une église. D’une ma­nière générale, les chrétiens vivent avec un sentiment de ten­sion permanente. Un laïc chrétien m’a parlé d’étouffement. Un autre m’a dit au moins vingt fois « Je n’ai pas peur ! », mais son insistance signifiait sans doute le contraire.

Dans le domaine de la peur, on a parfois l’impression que ce sont les mu­sulmans qui ont peur des chrétiens, de leur contact, des prêtres qui sont considérés un peu comme des magiciens, peur que leurs enfants ne se convertissent à ce Dieu qui est Amour : tout est donc fait pour éloigner et comme préserver les musulmans des chrétiens.

Alors, quel avenir pour les chrétiens et quelles solutions se présentent à eux ? Il y a l’émigration, mais elle est devenue difficile avec des visas plus restrictifs et des possibilités financières plus réduites : les gens n’ont simplement plus les moyens de partir ! Il y a aussi la conversion à l’is­lam : on m’a parlé d’une prime de 10.000 livres égyptiennes (1.500 €), ce qui constitue une fortune pour beaucoup d’Égyptiens (un professeur gagne 50 € par mois). Il y a enfin la véritable conversion qui est demandée à tous les chrétiens et qui consiste à sans cesse laisser plus de place au Christ dans nos vies. L’avantage, s’il y en a un, de la situation des chrétiens en Égypte, c’est qu’ils sont directement confrontés à l’essentiel et sans cesse ap­pelés à renouveler les trois vertus de foi, espérance et charité.

Cela n’empêche pas que nous puissions les aider en les soutenant matériellement et spirituellement. Ne les oublions pas, ils comptent sur nous !