Lors de la dernière assemblée de notre épiscopat à Lourdes, il y eut, pour les journalistes présents à cette occasion, comme un moment de vérité, qui suscita chez tous, quelle que fut leur sensibilité, une inquiétude qui ressemblait à de l’angoisse. Que seront nos diocèses dans dix ans, alors qu’il ne sera même plus possible de maintenir le maillage sacerdotal qui s’est imposé dans la période post-conciliaire à partir de grandes paroisses territoriales ? Les réponses apportées par deux évêques chargés d’une réflexion sur le rôle des prêtres dans l’avenir ne suffisaient pas à calmer les doutes, tant la perspective d’une France « post-chrétienne » et d’une Église très minoritaire se dessinait de façon implacable. Alors surgissaient les habituels subterfuges : quand se décidera-t-on à ordonner des hommes mariés, demandaient quelques-uns. Mais le véritable problème n’était-il pas d’un autre ordre ? Une Église qui ne renouvelle plus ses générations de prêtres n’est-elle pas tout simplement en manque de fécondité spirituelle, et à vouloir compter sur des solutions alternatives, ne se résigne-t-on pas à une fuite en avant sans beaucoup d’espoir ?
Reconnaissons qu’il est difficile à nos évêques de « tout mettre sur la table » sur pareil sujet, d’autant que leur consensus n’est pas assuré, du fait de situations très diverses et même de divisions de fond chez les prêtres et les laïcs. Certains évêques ont accompli – tel le cardinal Lustiger – leur révolution, il y a un quart de siècle, créant un autre cadre de formation dans une perspective théologique et spirituelle bien définie. Le résultat est que Paris est aujourd’hui mieux pourvu que tous les autres diocèses en prêtres jeunes et bien formés. Cela n’a pas été sans effet d’attirance pour nombre de séminaristes qui ont choisi le dynamisme de la capitale au détriment des incertitudes de la Province. Quelques évêques sont en train de mettre en place un dispositif de type lustigérien, tandis que quelques autres ont adopté une stratégie atypique, qui fait de leurs diocèses des espaces singuliers avec un rôle plus important dévolu aux communautés nouvelles, l’appel à des éléments venus parfois de l’étranger. Ces diocèses, au total, ont un dynamisme qui contraste avec beaucoup de zones grises.
Il ne sera pas possible de rester longtemps dans l’indécision ou la gestion de plus en plus malaisée de la pénurie. Les cadres de l’épiscopat se sont modifiés, et l’on doit s’attendre à la redéfinition de plus en plus commune des perspectives. C’est pourquoi cette année 2008 devrait être accueillie par les catholiques français avec cette confiance surnaturelle à laquelle Benoît XVI nous appelle dans sa belle encyclique sur l’Espérance. C’est sans doute sur la création et la multiplication des pôles de vitalité sur l’ensemble du territoire qu’il conviendra d’orienter les efforts, afin de montrer à tous qu’un nouvel âge d’évangélisation se profile. N’oublions pas que la visite annoncée du Saint-Père dans notre pays pour le cent-cinquantenaire des apparitions de Lourdes constituera un moment très fort pour cette année, avec d’autres étapes possibles dans les hauts lieux de notre pays.