Le zimbabwe, situé entre le Mozambique et l’Afrique du Sud, compte 13 millions d’habitants. Il s’agit de l’ancienne Rodhésie du Sud, colonie britannique qui a accédé à l’indépendance en 1980, après un intermède de rébellion blanche de quinze ans.* Elle connaît aujourd’hui une crise profonde : 80% de la population active est au chômage, l’inflation n’est plus contrôlée (8 000 % par an), les grèves se multiplient. Le système agricole a été détruit par les réformes du président Mugabe et le pays est au bord de la famine. La population, à bout de forces, quitte en masse le pays. Plus de deux millions de Zimbabwéens se sont réfugiés en Afrique du Sud.
Premier ministre de 1980 à 1987, puis président depuis cette date, Robert Mugabe a été réélu à la tête du pays en 2002 lors d’élections truquées. Il a déclaré vouloir reculer les élections présidentielles, prévues en 2008 où il compte se représenter (il est né en 1924). L’opposition, muselée, voit se multiplier les arrestations, les cas de torture et de disparitions. La moindre manifestation est réprimée. Des attentats dans la capitale, en mars dernier, ont donné des motifs au gouvernement pour accentuer sa politique policière. Le Zimbabwe est l’objet de sanctions internationales à cause de ses atteintes aux droits de l’homme. Son président n’a en principe pas le droit de voyager en Europe, mais il n’en a cure, annonce sa venue au sommet de Lisbonne UE/Afrique des 8 et 9 décembre prochain et il semble que l’Union Européenne s’apprête à lui céder.
Les évêques catholiques** réclament courageusement un renouveau politique. Dans une lettre pastorale publiée le dernier dimanche des Rameaux, ils ont rendu les dirigeants responsables de l’appauvrissement et de l’oppression de la population.
S’ils admettent que la crise s’enracine dans le passé colonial du pays, les évêques dénoncent l’enrichissement démesuré d’une petite élite. Ils réclament une nouvelle Constitution, la tenue d’élections libres et la fin de la répression.
Certains évêques vont plus loin dans la critique du régime. Ainsi, l’archevêque de Bulawayo, Mgr Pius Ncube, appelle à des manifestations massives pour réclamer le départ du président Mugabe. Il a lancé un appel à ses compatriotes pour qu’ils renoncent à leur « lâcheté » et aux autres responsables religieux, pour qu’ils « quittent leur confort et qu’ils souffrent avec le peuple ». L’Église continue d’aider autant que possible le peuple du Zimbabwe ; elle reste la seule voix, à l’intérieur du pays, à pouvoir encore s’élever contre le pouvoir. Le Président a reproché aux évêques de faire de la politique et de délaisser le côté spirituel de leur tâche. Mgr Ncube, quant à lui, rappelle à l’Église son rôle prophétique, qui doit « répandre la vérité quand personne d’autre n’ose le faire ». Du coup l’Église catholique est une cible privilégiée du gouvernement et de sa police.
Malgré les menaces, les évêques ont exhorté « tous les Zimbabwéens à lire la lettre pastorale comme un guide permettant de comprendre la source de notre souffrance et une inspiration pour nos prières et nos actes ».
Si Mgr Ncube, fer de lance et figure emblématique de l’opposition intérieure, a préféré démissionner, pour répondre aux accusations calomnieuses portées contre lui (accusé d’adultère par la presse du régime), d’autres évêques et prêtres continuent de défendre la liberté et la vérité, malgré de violentes menaces.
M.F.
* L’ancien premier ministre blanc rebelle, Ian Smith, vient de mourir le 20 novembre dernier.
** Les catholiques représentent 8% de la population.
http://www.afriquechos.ch/spip.php?article2684
http://www.angolapress-angop.ao/noticia-f.asp?ID=578979
Pour découvrir ou soutenir France Catholique, achetez-le en kiosques et librairies – liste des points de vente en cliquant ci-dessous :