L’élection de l’archevêque de Paris à la présidence de la Conférence des évêques de France était depuis quelques mois une hypothèse à envisager sérieusement. Nous l’avions évoquée ici-même à l’annonce de son cardinalat. Maintenant qu’elle est advenue, il n’est plus possible de maintenir les réserves qu’une relative incertitude imposait. Cette élection a un sens déterminant pour l’Église de France. Le fait qu’elle intervient si peu de temps après la mort du cardinal Lustiger renforce encore plus le sentiment d’une étape nouvelle pour le catholicisme en France. Cette étape ne s’annonce pas facile et l’on ne saurait l’inaugurer par des satisfecits intempestifs. D’ailleurs la personnalité du cardinal Vingt-Trois à elle seule – il est vraiment le dernier à qui on puisse en compter – nous renvoie au réalisme et à l’humilité de notre situation présente.
Mais l’unanimité morale qui a permis cette élection est déjà un gage de légitimité pour le nouveau président, qui bénéficie aussi des relais de son prédécesseur, le cardinal Ricard, dont la sagesse aura été précieuse ces dernières années. Les évêques de France savent assez, pour labourer sans cesse le terrain, les fragilités de leur Église, et qu’il s’en faut de beaucoup pour que l’avenir de nos communautés soit assuré. La raréfaction du clergé constitue un tourment continuel et l’appel aux suppléances par le laïcat ne saurait cacher l’impossibilité de paroisses sans prêtres, d’autant que le laïcat lui-même a besoin d’être fortifié, formé, et que la question de sa pérennité est également posée. Le choix d’une personnalité pour répondre aux nécessités du moment est donc solidaire d’un consensus quant à la perception de ce qu’est aujourd’hui l’Église catholique en France et des moyens à mettre en œuvre pour susciter des énergies nouvelles et mobilisées pour l’Évangélisation.
Le réalisme n’impose pas de voir l’avenir uniquement sous les aspects les plus sombres. Nos évêques ont aussi accordé leur confiance à un homme dont ils connaissent la détermination et le sens de l’action. Ce qui a été réalisé à Paris, sous l’autorité du cardinal Lustiger depuis plus d’un quart de siècle, doit beaucoup à Mgr Vingt-Trois qui, par ailleurs, depuis 2005, dirige sûrement ce diocèse dont le rayonnement s’impose même hors de nos frontières. Avec le nouveau Président, on peut être assuré que la barre sera fermement tenue, les objectifs clairement fixés, les moyens envisagés avec lucidité. Le souci pour l’éveil aux vocations sera prioritaire, avec la formation spirituelle et intellectuelle des futurs prêtres. Les laïcs seront conviés à approfondir leur foi et leurs engagements. La pastorale de l’intelligence (conformément aux orientations de Fides et Ratio) accompagnera la pastorale des paroisses et des mouvements avec une insistance particulière sur la pratique eucharistique. Certes, l’étape qui commence, n’est pas encore écrite, mais on peut envisager que ce qui a été source de renaissance sera encouragé et généralisé. ■