Mgr Casmoussa, évêque de Mossoul, appelle à soutenir les chrétiens d’Irak qui luttent pour leur survie
et celle de leur pays.
Monseigneur, pouvez-vous nous décrire la vie quotidienne des chrétiens irakiens ?
Nous sommes une toute petite minorité (4% de la population). Jusqu’en 2006, les chrétiens étaient relativement tranquilles, mais depuis, des groupes clandestins et armés persécutent les chrétiens sous couvert de l’islam. En réalité le combat religieux n’est qu’un prétexte destiné à cacher leur véritable objectif : l’argent. Ils font pression sur des familles chrétiennes comme ils ont fait pression sur les musulmans.
J’insiste : les chrétiens d’Irak sont de souche et le christianisme en Irak est plus ancien que l’islam. Nous sommes donc complètement solidaires de tous les Irakiens.
Comment expliquez-vous alors cette émigration des chrétiens ?
Nous vivons dans un pays occupé sans raison où règne la gabegie : problèmes de sécurité liés à l’occupation (voitures piégées, bombardements…), groupuscules semant la terreur (kidnappings, rançons, vols de maison etc.). Le résultat est là : près de 40% des chrétiens ont quitté leur ville ou leur pays, c’est une catastrophe pour une si petite communauté et pour le pays tout entier.
Les exilés invitent-ils leur famille à les suivre ?
C’est difficile à dire car les chrétiens irakiens aiment profondément leur pays et ne partent que sous la contrainte. Nous vous demandons de bien accueillir les chrétiens irakiens : ils partent le plus souvent dans la panique. En demande d’asile, sans ressources, ils se sentent vraiment abandonnés.
Parlez-nous de vos prêtres, deux d’entre eux ont été enlevés ?
Dans mon diocèse, il y a 22 séminaristes et 22 prêtres. Le dimanche 14 octobre, le père Pios Affas et le père Mazen Mattoka ont été kidnappés. Le père Mazen est un tout jeune prêtre ordonné le 1er septembre. Quant au père Pios Affas, âgé de 68 ans, il est de faible santé et était sur le point de prendre la direction du Centre Biblique de Mossoul, un centre que l’AED finance en partie. Ils ont finalement été libérés le dimanche 21. Ces kidnappings sont très éprouvants, ils ajoutent à un quotidien déjà très difficile.
Craignez-vous pour votre propre sécurité ?
Bien sûr, j’ai déjà été moi-même kidnappé mais quelle pourrait être ma propre sécurité sans celle de mes prêtres et de mes fidèles ? Nous n’avons pas le droit d’avoir peur ! Un de mes prêtres a récemment dit à ses paroissiens d’être « prêts à toute éventualité ».
Avez-vous un message à nous adresser ?
Nous ne sommes pas de simples marionnettes ou du bois à jeter au feu. Ne nous abandonnez pas sur l’autel des intérêts politiques et économiques ! Les efforts des chrétiens en Irak sont certes leur survie immédiate mais consistent surtout à participer à l’amélioration des conditions de vie de tous les Irakiens. Notre situation est extrêmement préoccupante. Priez pour nous !