La présence de l’archevêque de Paris au sein de la nouvelle promotion cardinalice n’étonne pas, puisque le siège prestigieux des bords de Seine appelle depuis bien longtemps à cette dignité. Mais la dimension historique ne s’impose pas seulement au titre d’une tradition qui rejoint d’ailleurs la norme de continuité apostolique. Elle s’inscrit comme exigence présente de continuité vivante, d’actualisation du message évangélique et de renouveau ecclésial. La figure du cardinal Jean-Marie Lustiger qui, pendant un quart de siècle, assuma avec éclat la charge de successeur de saint Denis, suffit à montrer comment l’Histoire peut être poursuivie, enrichie, pour une part dépassée et pour une autre ouverte à d’autres développements. Depuis qu’il a succédé à celui dont il fut si longtemps le collaborateur et l’ami, Mgr André Vingt-Trois a apporté aussi la preuve qu’on pouvait recueillir un héritage dans la même fidélité et en le servant avec ses qualités et ses aptitudes personnelles.
Ses diocésains, ses proches comme d’ailleurs ses frères dans l’épiscopat ont compris, depuis plus de deux ans, que celui qui est désormais le cardinal Vingt-Trois ne s’est pas départi, à la responsabilité éminente de Paris, de la solidité humaine et spirituelle qui permet d’emblée de lui accorder sa confiance. Membre du collège cardinalice, il sera directement associé à la mission universelle de Pierre, régulièrement présent aux réunions des dicastères romains, plus proche du Pape, mais encore certainement sollicité sur la scène internationale. On s’en réjouit pour l’Église de France qui a besoin de leaders spirituels avec une autorité largement reconnue. Ne dit-on pas que le nom du cardinal Vingt-Trois est souvent cité comme possible successeur du cardinal Ricard à la tête de la conférence épiscopale ? Même si l’intéressé se montre particulièrement discret sur ce sujet – on devine ses scrupules d’ajouter une autre responsabilité à celle déjà lourde qu’il supporte – une telle rumeur n’en est pas moins significative du crédit qu’on accorde, dans l’épiscopat français, à l’archevêque de Paris.
Sans doute son prédécesseur aurait-il amplement mérité une telle reconnaissance de ses pairs mais les temps n’étaient peut-être pas mûrs et la mission de prophète a quelque chose de trop intempestif pour susciter l’unanimité immédiate. Mais le cardinal Lustiger – on l’a bien compris lors de ses obsèques quasi-nationales – compte parmi les références de notre Eglise. Et son héritier évident, le cardinal André Vingt-Trois, est en mesure, élu ou pas par ses pairs, de poursuivre et
faire fructifier une œuvre qui se distingue par ses capacités d’éveil et de transmission de la foi dans le monde d’aujourd’hui.
