L’émigration des chrétiens de la Terre Sainte inquiète les instances chrétiennes du monde entier. L’Eglise y est-elle condamnée à disparaître ?
Face aux difficultés quotidiennes qu’entraînent l’occupation israélienne et la montée de l’islamisme, les chrétiens de Terre Sainte disparaissent à vue d’œil. Ils ne représentent plus que 2% d’une population de 6,7 millions d’habitants. Ils étaient 28% en 1948 pour une population quatre fois moindre. Depuis 10 ans, 80% d’entre eux ont pris le chemin de l’exil !
Le vicaire patriarcal grec-catholique melkite de Jérusalem, Mgr Haddad, constate avec impuissance l’exode des chrétiens de Terre Sainte : «Pour nous, comme petite minorité, l’impact de chaque départ se fait douloureusement sentir».
Les pressions politiques, économiques ou religieuses et des perspectives d’avenir réduites amènent des familles entières à partir. Aujourd’hui, l’émigration touche plus spécialement la Cisjordanie : Jérusalem, les villes de Bethléem, Beit-Sahour, Beit-Jallah. Certains chrétiens veulent avoir une deuxième nationalité tout en gardant un pied en Terre Sainte. Mais avec le temps, beaucoup sont tentés de s’installer définitivement en Europe, au Canada ou aux Etats-Unis.
Dans une ville comme Bethléem, il ne reste plus que 30% de chrétiens, alors que dans les années cinquante, ils représentaient plus des 2/3 de la population. A Jérusalem, ils sont moins de 12% désormais.
Mgr Haddad reconnaît que la minorité chrétienne subit des pressions de la part des islamistes. Mais il ajoute aussitôt : « Les chrétiens résistent et n’ont pas peur, car le courant musulman majoritaire est pacifique, et notre vocation est de rester comme chrétiens arabes palestiniens en Terre Sainte ».
Des initiatives, malheureusement trop peu nombreuses, sont prises pour encourager les chrétiens de Terre Sainte à rester dans leur pays. Ainsi 70 logements ont été construits par la Custodie franciscaine de Terre Sainte sur le versant Est du Mont des Oliviers, pour les familles chrétiennes les plus démunies. Ces logements, remis le jour des Rameaux, ont redonné espoir à des familles, souvent découragées par la misère, le chômage et la peur de l’avenir pour leurs enfants.
Une violence bien réelle vient parfois s’ajouter aux difficultés quotidiennes des chrétiens : le 17 août 2006, des cocktails Molotov ont été lancés à Bethléem contre la maison de Samir Qumsieh, fondateur et directeur de l’unique télévision chrétienne privée de Palestine, Al-Mahed (la Nativité). Cette télévision, dont le siège est tout proche de la basilique de la Nativité, entend construire des ponts entre chrétiens, juifs et musulmans. Cela ne plaît pas aux extrémistes de plusieurs bords. Depuis cette attaque, les menaces de mort contre Samir Qumsieh se sont multipliées. Dans le passé, il n’avait pas hésité à dénoncer à plusieurs reprises les violences contre les chrétiens de Terre Sainte, comme en septembre 2005, quand des jeunes musulmans s’étaient livrés au saccage de la bourgade chrétienne de Taybeh, à 15 km de Ramallah.
Le 14 juin 2007, c’était le couvent des Sœurs du Rosaire à Gaza qui était saccagé par des proches du Hamas, qui ont volé plusieurs ordinateurs, détruit toutes les croix qui leur sont tombées sous la main, brûlé des exemplaires de la Bible et mis à mal une statue de Jésus.
Ces faits, malheureusement, ne sont pas isolés : ils font partie d’une longue série d’agressions contre les chrétiens, devenus ultra-minoritaires en Terre Sainte et bientôt étrangers dans leur propre pays ?