En octobre 2008, le synode des évêques se réunira pour la seconde fois depuis l’avènement de Benoît XVI pour réfléchir sur un sujet capital dans la vie de l’Eglise, puisqu’il s’agit de la Parole de Dieu, telle qu’elle est reçue et méditée par le peuple fidèle. Depuis les origines du christianisme, et à travers toutes les époques, cette Parole a nourri la communauté chrétienne, de telle façon qu’elle a toujours été intimement associée au partage de l’Eucharistie. Il n’y a jamais eu dissociation dans la proclamation du dogme entre le donné scripturaire, celui des deux Testaments, et la spéculation théologique. C’est une évidence chez les Pères de l’Eglise des premiers siècles dont la méthode exégétique constante tient dans la mise en tension de la Bible hébraïque et de l’Evangile, de la prophétie et de la promesse. C’est aussi vrai avec les grands docteurs médiévaux, contrairement à un préjugé tenace. Un saint Bernard a tellement intériorisé l’Ecriture qu’elle est sa langue naturelle et un saint Thomas d’Aquin n’a d’autre critère de vérification que la parole de Dieu, sans cesse approfondie.
Mais le synode des évêques, en dépit d’une continuité manifeste jusqu’au dernier concile œcuménique et au-delà, ne pourra éluder ce qui demeure sensible des grandes crises exégétiques que le christianisme a traversées à la Renaissance et à l’Age moderne. Au XVIe siècle, en effet, la Réforme a mis en cause une autorité magistérielle se substituant à celle de la Bible. Aux
siècles derniers, c’est l’autorité scientifique qui a voulu s’imposer pour formuler une interprétation de textes désormais soumis aux critères rationnels de l’Histoire. A Vatican II, l’Eglise a répondu aux objections toujours vivaces liées à ces deux provocations de fond, dans la Constitution Dei Verbum qui demeure le grand texte de référence sur l’Ecriture et la Tradition. A l’objection réformée, il est répondu que l’autorité du Magistère ne se substitue pas à celle de la Parole de Dieu mais s’interpose entre les diverses gloses qui prétendent en fixer le sens. A l’objection scientifique, il est fait pleinement droit dans ses requêtes légitimes mais pas au prix de ce qu’est l’Ecriture, c’est-à-dire le don que Dieu fait de lui-même et qui nous communique son mystère le plus intime.
Mais c’est à une crise tout à fait contemporaine que les évêques devront répondre et qui est aussi le produit des deux précédentes. En effet, déstabilisée, l’opinion apparaît souvent manipulée à la fois par les fondamentalistes qui excluent toute sage herméneutique et par des néo-gnostiques habiles à diffuser toutes sortes de légendes et de contre-sens jusqu’à l’absurde. Le temps est donc venu pour l’Eglise dans son ensemble de réassumer sa grande tradition de science éclairée et de méditation mystique pour annoncer au monde le Salut que Dieu lui propose dans un dialogue ininterrompu.