3053-Ecologie de la paix - France Catholique
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La justice de Dieu
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3053-Ecologie de la paix

Les vœux adressés par Benoît XVI à l’humanité pour la journée mondiale de la paix du 1er janvier 2007 le posent en défenseur audacieux des droits universels de la personne humaine dans la tradition de son prédécesseur.
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A ceux qui trient dans les exhortations de l’Eglise, louant celles qui leur plaisent (même si elles sont loin d’être mises en œuvre) tout en blâmant celles qui les contrarient, Benoît XVI donne un témoignage de cohérence. « Outre les victimes de conflits armés, du terrorisme et des multiples formes de violence, il y a les morts silencieuses provoquées par la faim, par l’avortement, par l’expérimentation sur les embryons et par l’euthanasie. Comment ne pas voir en tout cela un attentat à la paix ? » Tout se tient. Ce message du jour de l’an du Pape rappelle ceux de la bienheureuse Mère Teresa.

Intitulé La personne humaine au cœur de la paix, il regroupe les exigences de la paix en une même logique : « le devoir de respecter la dignité de tout être humain ». Pour manifester cette cohérence, le Pape explique d’une part que « l’on ne peut pas disposer de la personne selon son bon plaisir » et d’autre part que « la paix a besoin que s’établisse une frontière entre ce qui est disponible et ce qui ne l’est pas ».

Benoît XVI rappelle le principe qui devrait constituer le « point de rencontre » entre tous les croyants et les non-croyants : « la reconnaissance et le respect de la loi naturelle », « présupposé fondamental pour une paix authentique ». Une loi naturelle, décrite comme « cette grammaire transcendante inscrite dans les consciences, dans le cœur de l’homme ». Jean Paul II avait expliqué, à propos des lois contre la vie votées par des parlements régulièrement élus, que sa transgression allait jusqu’à faire de la démocratie « un mot creux » dérivant vers « le totalitarisme » (Evangile de la vie).

Parmi les « droits fondamentaux de la personne » que « l’Eglise s’emploie à défendre », Benoît XVI choisit d’insister sur deux qu’elle « revendique en particulier » et qu’il lie dans une même expression : « le respect de la vie et de la liberté religieuse de chacun ». C’est en raison du « don de la vie » par son Créateur que l’homme n’en est pas maître. Pour le pape, « l’avortement et l’expérimentation sur les embryons constituent la négation directe de l’attitude d’accueil envers l’autre, qui est indispensable pour instaurer les relations de paix durables. »

Comment imaginer un monde pacifique, si les êtres humains les plus vulnérables sont à la merci des plus forts ? De même les persécutions subies par les croyants, chrétiens ou non, mais aussi la « dérision culturelle systématique des croyances religieuses » sont décrites comme de graves obstacles à la « convivialité pacifique ».

Comme l’avait fait Jean-Paul II dans l’Evangile de la vie, Benoît XVI brosse le panorama des atteintes à la vie et dénonce leurs causes d’une façon qui nous incite à prendre en compte ces enjeux dans leur globalité : parmi les « menaces contre la paix », il souligne « les innombrables et injustes inégalités » et surtout « dans l’accès aux biens essentiels comme la nourriture, l’eau, un toit, la santé » et « entre hommes et femmes ». Il explique que l’égalité correctement comprise est bien inscrite « dans la grammaire naturelle » de l’humanité. Nous retrouvons l’Eglise dans sa tradition d’avocate des faibles, des pauvres et du développement. Un engagement où on la sait respectée quoique trop peu suivie.

L’expression de Benoit XVI se fait novatrice – même si elle se situe, là encore, dans l’élan de Jean Paul II – lorsqu’il établit une relation audacieuse entre l’écologie et la paix. Le Pape fait appel au bons sens : « L’expérience montre que toute attitude irrespectueuse envers l’environnement porte préjudice à la convivialité humaine, et inversement. » Et de noter « un lien indissoluble » entre « la paix avec la création » et « la paix entre les hommes ».

Benoît XVI propose d’enrichir le concept de la défense de l’environnement en associant à « l’écologie de la nature », une « écologie humaine » et une « écologie sociale ». Le Pape les récapitule en une « écologie multiforme de la paix » qu’il inscrit dans la lignée du célèbre Cantique de saint François.

Actualisant cette analyse, Benoît XVI décrit les conflits qui naissent à propos des approvisionnements énergétiques à cause des inégalités d’accès et du pillage des ressources naturelles. Pour favoriser « la croissance de l’arbre de la paix », l’écologie humaine réfute les « conceptions anthropologiques qui renferment en elles-mêmes le germe d’oppositions et de violence » explique alors le Pape, dénonçant notamment « une conception relativiste de la personne ». On pense autant à la négation de l’humanité des embryons qu’à l’esclavage. D’autres conceptions, de Dieu cette fois, sont faussées par la violence. Elles sont taxées d’idéologiques : toute idée de « guerre au nom de Dieu » est ainsi récusée.

Défendant alors le droit international, le Pape en appelle à régler les différends autrement que par la menace et la guerre, à ne pas ajouter au terrorisme l’oubli des principes du droit humanitaire et à favoriser la désescalade nucléaire.

Les chrétiens entendront-ils l’appel pressant que leur lance finalement Benoît XVI pour qu’ils soient « fermes défenseurs de la vie humaine et courageux bâtisseurs de paix » ? Son pacte écologique serait d’une tout autre portée que celui proposé par Nicolas Hulot à nos partis politiques.

Tugdual DERVILLE