A l’approche de la fête des apôtres Pierre et Paul – jeudi 29 juin – les cérémonies d’ordination sacerdotale se préparent dans nos diocèses. C’est toujours une joie pour les chrétiens d’accueillir des jeunes prêtres qui continueront la mission sacramentelle de l’Eglise. La belle participation, qui accompagne l’évêque et son presbytérium dans une telle occasion, est le signe de l’adhésion des fidèles à ce signe si important de la vitalité ecclésiale. Pourtant, nombre de nos diocèses français, encore cette année, ne connaîtront pas ce bonheur, les vocations s’étant raréfiées jusqu’à quasiment disparaître en certains endroits. Il arrive qu’une unique ordination soit considérée comme un miracle là où il n’y en avait pas eu depuis bien longtemps. N’est-ce pas le cas de la Meuse où un jeune prêtre vient défier la « fatalité » qui s’acharnait depuis quinze ans sur la région natale de Jeanne d’Arc ?
Cette raréfaction alarmante provoque des réflexes qui ne sont pas toujours garantis par la lucidité spirituelle. Les solutions alternatives proposées sont souvent marquées par des idéologies séculières, éloignées des normes de la tradition ecclésiale, et qui, au surplus, supposent une sorte de résignation devant un déclin jugé inéluctable. S’il y a bien, aujourd’hui, une révolution à accomplir dans les mentalités, elle concerne cet abandon à une prétendue fatalité qui est le masque jeté sur notre renoncement à l’espérance et notre peu de foi. Il est grand temps de s’insurger contre des préjugés qui nous font le plus grand mal et s’opposent à toute renaissance de nos communautés.
Faut-il le redire avec le frère dominicain Thierry-Dominique Humbrecht, qui ne cesse d’en apporter la démonstration* ? L’éclosion des vocations est en raison directe de la vitalité de nos communautés chrétiennes. N’y a-t-il pas un sérieux examen à faire sur les dérives qui les ont affectées et qui sont toutes en relation avec « le manque de ferveur » dont parlait l’auteur de l’Apocalypse ? « Souviens-toi de ta ferveur première ! ». C’est avec cette formule que le cardinal Decourtray priait les Lyonnais de considérer la chance que constituait la venue de Jean-Paul II sur les pas de Pothin, d’Irénée et de Blandine. Comment les jeunes gens pourraient-ils prêter attention à l’appel au sacerdoce là où on s’endort, là où on n’a plus l’énergie d’annoncer la bonne nouvelle, là où on se résigne, ou on se laisse aller au conformisme ambiant ?
Il y a un demi-siècle, on était à peu près persuadé que l’Amérique latine était dans l’impossibilité de pourvoir elle-même à la constitution de son propre clergé. Il était entendu que seuls les prêtres venus d’Europe pouvaient suppléer à l’impossibilité que surgisse un clergé autochtone. D’où une mentalité post-coloniale qui se perpétuait, alors que les nations avaient acquis depuis longtemps leurs indépendances politiques. L’expérience a montré qu’il s’agissait d’un pseudo-déterminisme, démenti désormais par la croissance d’un clergé latino-américain. On pourrait donner l’exemple de l’Afrique et des chrétientés asiatiques. La vieille Europe doit se réveiller, abandonner ses idéologies absurdes et renouer avec la ferveur qui fera éclore les vocations dont elle doit avoir le plus urgent désir.
Gérard LECLERC